Vu 1°) sous le numéro 290963, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 mars et 3 juillet 2006, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M.Yves A et M. Rémy A demeurant ... et pour la société Yves et Rémy A, dont le siège est 1737, route de la Madrague, Giens, à Hyères (83400) ; MM. Yves A et Rémy A et la société Yves et Rémy A demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 27 décembre 2005 portant classement parmi les sites du département du Var de l'ensemble formé par la presqu'île de Giens, les îles et îlots avoisinants, l'étang et les salins des Pesquiers et les Vieux Salins, sur le territoire des communes d'Hyères-les-Palmiers et de La Londe-les-Maures ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 2°) sous le numéro 290970, la requête, enregistrée le 3 mars 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le COMITE D'INTERET LOCAL POUR LA DEFENSE DE LA PRESQU'ILE DE GIENS, association représentée par son président en exercice, dont le siège est 1737, route de la Madrague, Giens à Hyères (83400), le collectif « SOS PRESQU'ILE » CONTRE LE CLASSEMENT DE LA PRESQU'ILE DE GIENS ET POUR LA DEFENSE DU TERROIR, association représentée par son président en exercice, dont le siège est 1669, route de la Madrague, Giens à Hyères (83400), MM. Yves et Rémy A, demeurant ..., M. Philippe B, demeurant ..., Mmes Catherine C et Jacqueline D, demeurant ..., M. Jean E, demeurant ..., et M. Serge F, demeurant ... ; le COMITE D'INTERET LOCAL POUR LA DEFENSE DE LA PRESQU'ILE DE GIENS et les autres requérants demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 27 décembre 2005 portant classement parmi les sites du département du Var de l'ensemble formé par la presqu'île de Giens, les îles et îlots avoisinants, l'étang et les salins des Pesquiers et les Vieux Salins, sur le territoire des communes d'Hyères-les-Palmiers et de La Londe-les-Maures ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la note en délibéré présentée le 25 juin 2007 par le COMITE D'INTERET LOCAL POUR LA DEFENSE DE LA PRESQU'ILE DE GIENS ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le décret n° 69-607 du 13 juin 1969 portant application des articles 4 et 5-1 de la loi modifiée du 2 mai 1930 sur la protection des sites ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Patrick Gérard, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de M. A et autres,
- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de MM. Yves A et Rémy A et autre et du COMITE D'INTERET LOCAL POUR LA DEFENSE DE LA PRESQU'ILE DE GIENS et autres sont dirigées contre le même décret du 27 décembre 2005 classant parmi les sites du département du Var l'ensemble formé par la presqu'île de Giens, les îles et îlots avoisinants, l'étang et les salins des Pesquiers et les Vieux Salins sur le territoire des communes d'Hyères-les-Palmiers et de La Londe-les-Maures ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit donné acte du désistement de la requête n° 290970 :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-22 du code de justice administrative, dans sa rédaction alors applicable : « Lorsque la requête ou le recours mentionne l'intention du requérant ou du ministre de présenter un mémoire complémentaire, la production annoncée doit parvenir au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat dans un délai de quatre mois à compter de la date à laquelle la requête a été enregistrée. / Si ce délai n'est pas respecté, le requérant ou le ministre est réputé s'être désisté à la date d'expiration de ce délai, même si le mémoire complémentaire a été ultérieurement produit. Le Conseil d'Etat donne acte de ce désistement » ;
Considérant que, dans leur requête, enregistrée le 3 mars 2006, le COMITE D'INTERET LOCAL POUR LA DEFENSE DE LA PRESQU'ILE DE GIENS et autres n'ont pas mentionné l'intention de produire un mémoire complémentaire ; que contrairement à ce que soutient le ministre, ils ne peuvent donc être réputés s'être désistés de cette requête en application des dispositions de l'article R. 611-22 du code de justice administrative ;
Sur la légalité du décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 341-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction en vigueur à la date du décret attaqué : « Il est établi dans chaque département une liste des monuments naturels et des sites dont la conservation ou la préservation présente, au point de vue artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, un intérêt général. / La commission départementale des sites, perspectives et paysages prend l'initiative des inscriptions qu'elle juge utiles (…) / L'inscription sur la liste est prononcée par arrêté du ministre chargé des sites (…)» ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 341-2 du même code : «Les monuments naturels et les sites inscrits ou non sur la liste dressée par la commission départementale peuvent être classés (…)» ; qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 341-6 du même code, dans leur rédaction alors en vigueur : « Le monument naturel ou le site (…) est classé par arrêté du ministre chargé des sites, après avis de la commission départementale des sites, perspectives et paysages, s'il y a consentement du propriétaire (…). / A défaut du consentement du propriétaire, le classement est prononcé, après avis de la commission supérieure, par décret en Conseil d'Etat… » ;
Sur la légalité externe :
Considérant que le décret attaqué, après avoir été soumis à l'avis du Conseil d'Etat, a été signé par le Premier ministre et contresigné par le ministre de l'écologie et du développement durable ; que le moyen tiré de ce qu'il ne porterait pas les signatures requises doit par suite être écarté ;
Considérant que les propriétaires de sites faisant l'objet d'un projet de classement doivent, aux termes de l'article L. 341-3 du code de l'environnement, être « invités à présenter leurs observations selon une procédure fixée par décret en Conseil d'Etat » ; que le décret du 13 juin 1969 pris pour l'application de ces dispositions précise qu'une enquête est organisée par un arrêté du préfet qui désigne le chef de service chargé de conduire la procédure et que celui-ci recueille les observations des personnes intéressées, qui peuvent également adresser des observations au préfet dans les vingt jours suivant la clôture de l'enquête ; que l'attribution d'une telle compétence au responsable d'un service administratif ne saurait être considérée en elle-même comme contraire au principe d'impartialité ;
Considérant que les allégations du COMITE D'INTERET LOCAL POUR LA DEFENSE DE LA PRESQU'ILE DE GIENS et autres quant à la violation de règles relatives aux dates, au déroulement de l'enquête, ou à la mise à disposition du dossier, ne sont assorties d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'ainsi le moyen tiré de l'irrégularité de l'enquête doit être écarté ;
Considérant que l'autorité administrative a la faculté de soustraire de la mesure de classement des parcelles qui étaient comprises dans le périmètre soumis à l'enquête dès lors que ce retrait n'a pas pour effet de dénaturer le site ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le retrait des parcelles cadastrées n° 1553, 1554, 1555, 1598, 1589 et 2209, en raison de leur situation géographique, ait modifié la nature du projet ; qu'ainsi une nouvelle enquête n'était pas nécessaire avant la signature du décret attaqué ;
Sur la légalité interne :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le périmètre du site classé, qui comprend deux secteurs littoraux séparés de quatre kilomètres, permet de maintenir un équilibre dans des milieux très fragiles et de constituer un site homogène dont la préservation présente un intérêt général au sens de l'article L. 341-1 du code de l'environnement ; que le classement des parcelles constituant ce site a d'ailleurs recueilli les avis favorables de la commission départementale des sites et de la commission supérieure des sites ; que, contrairement à ce qu'affirment les requérants, les différents services de l'Etat ont recherché dans l'élaboration du périmètre continuité et cohérence ; que la circonstance que des parcelles seraient déjà protégées par un classement en zone naturelle du plan d'occupation des sols ou par d'autres législations, notamment de protection du littoral, est sans effet sur la légalité du classement dès lors que ces législations n'ont ni le même objet ni le même effet que la législation sur la protection des monuments naturels ou des sites dont elles sont distinctes ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'interdit le classement de secteurs partiellement construits ;
Considérant en particulier que s'il ressort des pièces du dossier que le parc de stationnement appartenant à M. Yves A et M. Rémy A ne présente pas la même qualité de paysage que les autres parties du site, son classement est, en raison de sa situation géographique, justifié dès lors qu'il contribue à la sauvegarde du site ; qu'ainsi le moyen tiré d'une erreur d'appréciation dans l'application de l'article L. 341-1 du code de l'environnement doit être écarté ; que s'il est constant que le décret a exclu du périmètre les parcelles n° 1553, 1554, 1555, 1598, 1589 appartenant à la commune d'Hyères, les requérants n'apportent pas, à l'appui de leur moyen tiré de cette exclusion, de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant toutefois qu'en excluant de la liste des parcelles classées le parc de stationnement du domaine public départemental, le décret contesté s'est abstenu de classer des espaces qui, au regard de l'objet de la législation sur les sites, ne se distinguent en rien des parcelle voisines de M. Yves A et M. Rémy A et sont nécessaires à la cohérence de la protection qu'il a eu pour objet d'instituer ; que cette exclusion l'entache sur ce point d'illégalité ; qu'il y a lieu dès lors de prononcer l'annulation du décret en tant qu'il ne classe pas le parc de stationnement du domaine public départemental ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède d'une part que le COMITE D'INTERET LOCAL POUR LA DEFENSE DE LA PRESQU'ILE DE GIENS et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret attaqué, d'autre part que M. Yves A et M. Rémy A et la société A ne sont fondés à demander l'annulation de ce décret que dans la mesure où son article 1er n'inclut pas dans le classement le parc de stationnement du domaine public départemental ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3000 euros à verser, à raison de 1000 euros chacun, à M. Yves A, à M. Rémy A et à la société A ; qu'en revanche la demande présentée sur le même fondement par le COMITE D'INTERET LOCAL POUR LA DEFENSE DE LA PRESQU'ILE DE GIENS et autres doit être rejetée ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le décret du 27 décembre 2005 est annulé en tant qu'il exclut du périmètre du classement le parc de stationnement du domaine départemental.
Article 2 : L'Etat versera à M. Yves A, à M. Rémy A et à la société A une somme de 3000 euros, à raison de 1000 euros chacun, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus de la requête de M. Yves A et M. Rémy A et de la société A ainsi que la requête du COMITE D'INTERET LOCAL POUR LA DEFENSE DE LA PRESQU'ILE DE GIENS et autres sont rejetés.
Article 4 : Les conclusions du ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables tendant à ce qu'il soit donné acte du désistement de la requête n°290970 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à MM. Yves A et Rémy A , à la société Yves et Rémy A, au COMITE D'INTERET LOCAL POUR LA DEFENSE DE LA PRESQU'ILE DE GIENS, à l'avocat du collectif « SOS PRESQU'ILE » CONTRE LE CLASSEMENT DE LA PRESQU'ILE DE GIENS ET POUR LA DEFENSE DU TERROIR, de M. Philippe B, Mmes Catherine C et Jacqueline D, M. Jean E et M. Serge F, au Premier ministre et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.