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25/05/2007 | FRANCE | N°285326

France | France, Conseil d'État, 4ème ssjs, 25 mai 2007, 285326


Vu 1°), sous le n° 285326, l'ordonnance du 13 septembre 2005, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 21 septembre 2005, par laquelle le président du tribunal administratif de Dijon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à ce tribunal par M. A...B..., demeurant... ;

Vu la demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Dijon le 28 octobre 2004, présentée par M. B...tendant à :

1°) la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant de

13 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi, d'une par...

Vu 1°), sous le n° 285326, l'ordonnance du 13 septembre 2005, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 21 septembre 2005, par laquelle le président du tribunal administratif de Dijon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à ce tribunal par M. A...B..., demeurant... ;

Vu la demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Dijon le 28 octobre 2004, présentée par M. B...tendant à :

1°) la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant de 13 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi, d'une part, du fait de la méconnaissance de son droit à une durée raisonnable de procédure par le tribunal administratif de Strasbourg et le Conseil d'Etat statuant sur le litige l'opposant à son administration quant à la prise en compte, dans le calcul de son ancienneté ainsi qu'au titre de ses droits à avancement et à pension, de la période de service militaire qu'il avait accomplie dans l'armée belge, d'autre part, du fait de la faute qui résulterait de ce que les juridictions administratives auraient rendu des décisions contradictoires, au regard de l'application du droit communautaire, et dans des conditions irrégulières ;

2°) la mise à la charge de l'Etat de la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°), sous le n° 285327, l'ordonnance du 13 septembre 2005, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 21 septembre 2005, par laquelle le président du tribunal administratif de Dijon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à ce tribunal par M. A...B..., demeurant... ;

Vu la demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Dijon le 22 septembre 2004, présentée par M. B...et tendant à :

1°) la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant de 13 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi, d'une part, du fait de la méconnaissance de son droit à une durée raisonnable de procédure par le tribunal administratif de Strasbourg et le Conseil d'Etat statuant sur le litige l'opposant à son administration quant à la prise en compte, dans le calcul de son ancienneté ainsi qu'au titre de ses droits à avancement et à pension, de la période de service militaire qu'il avait accomplie dans l'armée belge, d'autre part, du fait de la faute qui résulterait de ce que les juridictions administratives auraient rendu des décisions contradictoires, au regard de l'application du droit communautaire, et dans des conditions irrégulières ;

2°) la mise à la charge de l'Etat de la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gérard-David Desrameaux, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. B...,

- les conclusions de M. Yves Struillou, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de M. B...présentent à juger la même question ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant, en premier lieu, que M. B...a demandé au ministre de l'intérieur, le 11 juillet 1988, que sa période de service militaire accomplie dans l'armée belge soit prise en compte dans le déroulement de sa carrière comme attaché de préfecture ; qu'à la suite du rejet de cette demande, M. B...a saisi le tribunal administratif de Strasbourg qui a confirmé ce rejet, puis le Conseil d'Etat, qui a rejeté son appel pour irrecevabilité le 15 juin 1994 ;

Considérant, en deuxième lieu, que, se fondant sur de nouvelles dispositions issues de la loi du 16 décembre 1996, M. B...a présenté au ministre de l'intérieur, le 15 janvier 1997, une nouvelle demande, ayant le même objet que la première, qui a d'abord été rejetée par l'administration puis qui a été partiellement accueillie, au cours de l'instance que M. B...avait introduite devant le tribunal administratif de Strasbourg ; que ce tribunal, par un jugement du 6 juillet 2001, a fait intégralement droit à la demande de M. B...et a enjoint à l'administration de reconstituer la carrière de l'intéressé en prenant en compte son temps de service militaire dans l'armée belge dès le début de sa carrière de fonctionnaire ;

Considérant, en troisième lieu, que M. B...a alors demandé au ministre de l'intérieur de réparer le préjudice qu'il aurait subi du fait d'une discrimination à raison de sa nationalité ; que le ministre ayant rejeté sa demande, M. B...a saisi le tribunal administratif de Strasbourg qui a jugé, par une décision du 6 novembre 2003, que l'administration avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité et a condamné l'Etat à verser à l'intéressé 1 500 euros en réparation des troubles subis dans ses conditions d'existence ;

Considérant, en quatrième lieu, que M. B...a saisi le 19 novembre 2003 le garde des sceaux d'une demande tendant à la réparation des préjudices qu'il estimait avoir subis du fait des dysfonctionnements de la justice administrative ; qu'à la suite des rejets implicite puis exprès de sa demande, M. B...a saisi successivement le tribunal administratif de Paris, puis le tribunal administratif de Strasbourg de demandes tendant à la condamnation de l'Etat ; que ses demandes ont été transmises au Conseil d'Etat ;

Considérant que la demande de M. B...au garde des sceaux du 19 novembre 2003 tend à la réparation des préjudices qu'il aurait subis du fait des dysfonctionnements de la justice en raison de fautes résultant selon lui, d'une part, des délais excessifs de jugement de ses affaires, d'autre part, de ce que les juridictions administratives auraient rendu des décisions contradictoires, au regard de l'application du droit communautaire, et dans des conditions irrégulières ;

Considérant qu'eu égard à la connexité existant entre les conclusions des requêtes de M.B..., le Conseil d'Etat est compétent, en application de l'article R. 341-1 du code de justice administrative, pour connaître en premier ressort de l'ensemble de ces conclusions ;

Sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice résultant des délais excessifs de jugement :

Considérant que M. B...recherche la responsabilité de l'Etat à raison de la méconnaissance de son droit à un délai raisonnable de jugement par la juridiction administrative statuant sur ses deux recours successifs tendant à la prise en compte, dans le calcul de son ancienneté ainsi qu'au titre de ses droits à avancement et à pension, de la période de service militaire qu'il avait accomplie dans l'armée belge ;

Considérant qu'il résulte des principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions administratives que les justiciables ont droit à ce que leurs requêtes soient jugées dans un délai raisonnable ;

Considérant que, si la méconnaissance de cette obligation est sans incidence sur la validité de la décision juridictionnelle prise à l'issue de la procédure, les justiciables doivent néanmoins pouvoir en faire assurer le respect ; qu'ainsi, lorsque la méconnaissance du droit à un délai raisonnable de jugement leur a causé un préjudice, ils peuvent obtenir la réparation de l'ensemble des préjudices, tant matériels que moraux, directs et certains, ainsi causés par le fonctionnement défectueux du service public de la justice ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. B...a saisi le tribunal administratif de Strasbourg, le 18 novembre 1988, d'un recours tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet du ministre de l'intérieur de sa demande du 11 juillet 1988 tendant à la prise en compte, dans le calcul de son ancienneté ainsi qu'au titre de ses droits à avancement et à pension, de la période de service militaire qu'il avait accomplie dans l'armée belge ; que sa demande a été rejetée par un jugement du 5 septembre 1991 ; qu'il a fait appel de ce jugement par une requête enregistrée au greffe du secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 23 septembre 1991 et qui a été rejetée le 15 juin 1994 ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, la durée de cinq ans et sept mois mise, au total, par la juridiction administrative pour statuer sur cette affaire n'est pas excessive ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. B...a saisi le tribunal administratif de Strasbourg, le 16 juillet 1997, d'un recours tendant à l'annulation de la décision du 20 mai 1997 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande du 15 janvier 1997, identique à celle formulée le 11 juillet 1988 ; que la circonstance que cette demande ait le même objet que celle formulée à l'occasion de la première instance ne saurait rendre ces deux instances identiques, dès lors que la première instance avait été close par l'arrêt du Conseil d'Etat du 15 juin 1994, devenu définitif ; que M. B...a produit, au cours de cette instance, cinq mémoires datés des 16 juillet et 28 août 1997, du 4 mars 1998, du 2 mars et du 2 avril 2001 ; que le ministre de l'intérieur a pris, le 26 mars 2001, un arrêté faisant partiellement droit à ses conclusions ; que cet arrêté a conduit le tribunal administratif de Strasbourg à se prononcer sur la question du non lieu à statuer ; qu'il a été fait droit à sa demande par un jugement du 6 juillet 2001 ;

Considérant que la durée de quatre ans mise par le tribunal administratif de Strasbourg pour statuer sur la demande de M. B...s'explique notamment par les nombreuses productions effectuées par celui-ci ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, cette durée n'est pas excessive ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que son droit à un délai raisonnable de jugement a été méconnu ; que, dès lors, les conclusions analysées ci-dessus doivent être rejetées ;

Sur les autres conclusions des requêtes :

Considérant que M. B...invoque le préjudice qu'il aurait subi du fait de la faute résultant des décisions contradictoires rendues par les juridictions administratives, au regard de l'application du droit communautaire, et dans des conditions irrégulières ;

Considérant, d'une part, que le tribunal administratif de Strasbourg a enjoint au ministre de l'intérieur, par un jugement du 6 juillet 2001, devenu définitif, de reconstituer la carrière de M. B...en prenant en compte son temps de service militaire dans l'armée belge dès le début de sa carrière de fonctionnaire ; que, d'autre part, ce même tribunal a condamné l'Etat, par un jugement du 6 novembre 2003, à lui verser la somme de 1 500 euros en raison des troubles dans les conditions d'existence qu'il a subis et du préjudice né de la reconnaissance tardive de ses droits ; qu'ainsi ces jugements ont intégralement réparé les préjudices subis par l'intéressé ; qu'en outre, M. B...ne justifie d'aucun autre préjudice ; que, dès lors, les conclusions analysées ci-dessus doivent être rejetées ;

Sur les conclusions de M. B...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à M. B...la somme qu'il demande, devant le tribunal administratif de Dijon comme devant le Conseil d'Etat, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes de M. B...sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B...et au garde des sceaux, ministre de la justice. Copie en sera adressée pour information au chef de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives.


Synthèse
Formation : 4ème ssjs
Numéro d'arrêt : 285326
Date de la décision : 25/05/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 25 mai. 2007, n° 285326
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Gérard-David Desrameaux
Rapporteur public ?: M. Struillou
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:285326.20070525
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