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21/05/2007 | FRANCE | N°275479

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 21 mai 2007, 275479


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 décembre 2004 et 20 avril 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme A, demeurant... ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 14 octobre 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, à la demande de la commune de Pinols, annulé le jugement du 11 juin 1998 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'il a enjoint à la commune d'inscrire M. et Mme A sur la liste des affouagistes de l'année 1996 ;

2°) statuant

au fond, d'enjoindre à la commune d'inscrire M. A sur la liste des affouag...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 décembre 2004 et 20 avril 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme A, demeurant... ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 14 octobre 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, à la demande de la commune de Pinols, annulé le jugement du 11 juin 1998 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'il a enjoint à la commune d'inscrire M. et Mme A sur la liste des affouagistes de l'année 1996 ;

2°) statuant au fond, d'enjoindre à la commune d'inscrire M. A sur la liste des affouagistes de l'année 1996 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code forestier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cabrera, Auditeur,

- les observations de Me Le Prado, avocat de M. et Mme A et de la SCP Laugier, Caston, avocat de la commune de Pinols,

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une délibération du 4 juillet 1996, le conseil municipal de la commune de Pinols a radié M. A de la liste des affouagistes de cette commune pour l'année 1996 au motif qu'il ne remplissait pas la condition de résidence permanente pendant au moins six mois et un jour dans cette commune ; que M. et Mme A se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 14 octobre 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a annulé le jugement du 11 juin 1998 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, en tant que ce jugement a enjoint à la commune de Pinols d'inscrire M. et Mme A sur la liste des affouagistes de l'année 1996 ;

Considérant que M. et Mme A ont entendu contester le bien-fondé de la délibération du conseil municipal de Pinols radiant M. A de la liste des affouagistes pour l'année 1996 et obtenir du juge administratif la révision de cette décision ; que la cour administrative d'appel, ayant annulé le jugement du tribunal administratif en tant qu'il ordonnait l'inscription sur la liste des affouagistes de M. et de Mme A, devait à son tour, comme juge de plein contentieux de l'affaire qui lui était soumise, se prononcer sur le droit des intéressés à obtenir l'inscription de leur feu sur cette liste et le cas échéant ordonner cette inscription ; qu'en s'abstenant de le faire, la cour a commis une erreur de droit ; qu'ainsi, les requérants sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu, pour le Conseil d'Etat, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 145-1 du code forestier : Pour chaque coupe des forêts des communes et sections de commune, le conseil municipal ou l'une des commissions visées aux articles L. 162-1, L. 162-3 et L. 162-5 du code des communes peut décider d'affecter tout ou partie du produit de la coupe au partage en nature entre les bénéficiaires de l'affouage pour la satisfaction de leurs besoins ruraux ou domestiques, sous réserve de la possibilité, pour ces bénéficiaires, de ne vendre que les bois de chauffage qui leur ont été délivrés en nature (...) ; qu'aux termes de l'article L. 145-2 du même code : S'il n'y a titre contraire, le partage de l'affouage, qu'il s'agisse des bois de chauffage ou des bois de construction, se fait de l'une des trois manières suivantes : / 1º Ou bien par feu, c'est-à-dire par chef de famille ou de ménage ayant domicile réel et fixe dans la commune avant la publication du rôle ; / 2º Ou bien moitié par chef de famille ou de ménage et moitié par tête d'habitant remplissant les mêmes conditions de domicile. / La personne qui a réellement et effectivement la charge et la direction d'une famille ou qui possède un ménage distinct où elle demeure et où elle prépare sa nourriture, est dans les deux cas précédents seule considérée comme chef de famille ou de ménage. / Toutefois, ont droit à l'affouage les ascendants vivant avec leurs enfants, sans qu'il y ait lieu de rechercher s'ils ont, ou non, la charge effective d'une famille ; / 3º Ou bien par tête d'habitant ayant domicile réel et fixe dans la commune avant publication du rôle. / Chaque année, dans la session de printemps, le conseil municipal détermine lequel de ces trois modes de partage sera appliqué ; que, selon l'article L 145-3 du même code : En cas de partage par feu et par tête, ou seulement de partage par tête, le conseil municipal a la faculté de décider que, pour avoir droit de participer au partage par tête de l'affouage, il est nécessaire, au moment de la publication du rôle, de posséder depuis un temps qu'il détermine, mais qui n'excède pas six mois, un domicile réel et fixe dans la commune. / Les usages contraires à ces modes de partage sont et demeurent abolis (...) ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées que lorsqu'une commune décide de procéder à un partage par feu de l'affouage, la liste des affouagistes est établie au nom des chefs de famille ou de ménage remplissant les conditions requises ; que la commune de Pinols soutient que, par suite, le tribunal administratif ne pouvait lui enjoindre de procéder à l'inscription de M. et Mme A ; qu'il ressort toutefois des termes mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif, en enjoignant à la commune de Pinols, qui avait décidé de procéder à un partage par feu, d'inscrire M. et Mme A sur la liste des affouagistes pour l'année 1996, n'a entendu ordonner que l'inscription du foyer et non pas celle de chacun des deux époux ;

Considérant, en second lieu, que, si la commune de Pinols a, par une délibération de son conseil municipal du 10 août 1998, prise postérieurement au jugement attaqué, maintenu l'exclusion de M. A du rôle de l'affouage pour 1996, il résulte de l'instruction que M. A établit, par les attestations et états de consommation d'électricité, d'eau et de téléphone qu'il produit, qui ne sont pas suffisamment contredits par les documents et témoignages apportés de son côté par la commune, qu'il n'a pas cessé de remplir, en 1996, la condition de domicile réel et fixe requise par les textes et rappelée par la délibération précitée pour être inscrit au rôle d'affouage ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Pinols n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 11 juin 1998, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, en annulant la délibération du 4 juillet 1996 et en enjoignant à la commune de procéder à l'inscription de M. et Mme A sur la liste des affouagistes pour l'année 1996, a estimé que M. A avait droit à être inscrit sur cette liste ; que, par suite, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme A, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la commune de Pinols au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de celle-ci une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A devant les juges du fond ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 14 octobre 2004 est annulé.

Article 2 : La requête présentée devant la cour administrative d'appel par la commune de Pinols est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Pinols présentées devant le Conseil d'Etat et tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La commune de Pinols versera à M. A la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. ou Mme A et à la commune de Pinols.

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 275479
Date de la décision : 21/05/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 mai. 2007, n° 275479
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Laurent Cabrera
Rapporteur public ?: M. Glaser Emmanuel
Avocat(s) : LE PRADO ; SCP LAUGIER, CASTON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:275479.20070521
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