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06/04/2007 | FRANCE | N°265702

France | France, Conseil d'État, Section du contentieux, 06 avril 2007, 265702


Vu le recours, enregistré le 18 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE ; le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 02NT00085 du 30 décembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, à la demande de M. et Mme Serge A, a annulé, d'une part, le jugement du tribunal administratif d'Orléans en date du 20 novembre 2001 en tant qu'il avait rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de la décision de la commission d

partementale d'aménagement foncier du Loiret du 8 juin 2000 en tant...

Vu le recours, enregistré le 18 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE ; le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 02NT00085 du 30 décembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, à la demande de M. et Mme Serge A, a annulé, d'une part, le jugement du tribunal administratif d'Orléans en date du 20 novembre 2001 en tant qu'il avait rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du Loiret du 8 juin 2000 en tant qu'elle avait statué sur les comptes de propriété de Mme A et, d'autre part, ladite décision ;

2°) statuant au fond, de rejeter les conclusions présentées par M. et Mme A devant la cour administrative d'appel de Nantes ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Carine Soulay, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Brouchot, avocat de M. et Mme A,

- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;




Considérant que, par jugement du 6 février 2001, confirmé par un arrêt n° 01NT00535/675 de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 30 décembre 2003, le tribunal administratif d'Orléans a annulé, à la demande de M. Serge A, l'arrêté du préfet du Loiret du 7 août 1991 ordonnant un remembrement des propriétés foncières dans la commune de Pithiviers-le-Vieil, avec extension sur une partie des territoires des communes limitrophes d'Escrennes, Greneville-en-Beauce, Guigneville et Pithiviers, et en fixant le périmètre, ainsi que l'arrêté préfectoral du 20 octobre 1993 modifiant ce périmètre ; que, par jugement du 20 novembre 2001, le tribunal administratif d'Orléans, à la demande de M. Serge A et de son épouse, Mme Françoise A, d'une part, a annulé la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du Loiret du 8 juin 2000 en tant que celle-ci avait statué sur les biens relevant du compte de propriété commun à M. et Mme A, par voie de conséquence de l'annulation contentieuse des arrêtés préfectoraux du 7 août 1991 et du 20 octobre 1993 et, d'autre part, a rejeté comme tardives les conclusions tendant à l'annulation de cette décision en tant que celle-ci avait statué sur les comptes n° 82 et 83 des biens propres à Mme A ; que, par un arrêt n° 02NT00085 du 30 décembre 2003, contre lequel le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 20 novembre 2001 en tant qu'il a rejeté la demande d'annulation de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du Loiret du 8 juin 2000 en tant que celle-ci avait statué sur les biens des comptes n°s 82 et 83 de Mme A, ainsi que cette décision en tant qu'elle portait sur lesdits comptes ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-10 du code rural, dans sa rédaction issue de la loi du 11 décembre 1992, applicable au litige : « La commission départementale d'aménagement foncier a qualité pour modifier les opérations décidées par la commission communale ou intercommunale d'aménagement foncier. Ses décisions peuvent, à l'exclusion de tout recours administratif, faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir par les intéressés ou par le préfet devant la juridiction administrative. » ; qu'aux termes de l'article L. 123-12 du même code, dans sa rédaction issue de la loi du 11 décembre 1992, applicable au litige : « Du jour du transfert de propriété résultant de la clôture des opérations de remembrement, les immeubles qui en sont l'objet ne sont plus soumis qu'à l'exercice des droits et actions nés du chef du nouveau propriétaire. / La date de clôture des opérations est celle du dépôt en mairie du plan définitif du remembrement, ce dépôt étant constaté par un certificat délivré par le maire (…) » ; qu'aux termes de l'article R. 121-29 du même code, dans sa rédaction issue du décret du 11 décembre 1992 : « Au vu du plan du ou des aménagements fonciers approuvé par la commission communale ou intercommunale et si aucune réclamation n'a été introduite devant la commission départementale dans le délai prévu à l'article R. 121-6 ou, dans le cas contraire, au vu du plan approuvé par la commission départementale, le préfet ordonne le dépôt en mairie du plan et constate la clôture des opérations à la date de ce dépôt » ;

Considérant que le propriétaire de parcelles incluses dans le périmètre d'une opération d'aménagement foncier peut contester les effets de cette opération sur ses biens en formant devant la juridiction administrative un recours pour excès de pouvoir à l'encontre de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier statuant sur sa réclamation, et, le cas échéant, obtenir, même après la clôture de cette opération, la modification de ses attributions si celles-ci n'ont pas été déterminées conformément aux règles applicables à l'aménagement foncier ; que ledit propriétaire peut également demander l'annulation de l'acte ordonnant la réalisation de l'opération d'aménagement foncier, laquelle, si elle est prononcée par le juge, est, en principe, de nature à entraîner par voie de conséquence celle de tout acte pris sur le fondement de cet arrêté qui a été déféré au juge de l'excès de pouvoir dans le délai de recours contentieux ; que toutefois, eu égard à l'atteinte excessive à l'intérêt général et au respect du droit de propriété des autres intéressés qui résulterait d'une remise en cause générale des opérations d'aménagement foncier à une date postérieure à celle du transfert de propriété, le juge de l'excès de pouvoir ne peut annuler l'acte ordonnant les opérations ou suspendre son exécution que jusqu'à la date du transfert de propriété ; que, statuant après cette date sur un recours dirigé contre un acte pris dans le cadre des opérations d'aménagement foncier, il ne peut faire droit à une exception tirée de l'illégalité de l'acte ordonnant ces opérations que si celui-ci a fait l'objet d'une annulation ou d'une suspension avant le transfert de propriété ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'arrêté du préfet du Loiret du 7 août 1991 ordonnant un remembrement des propriétés foncières dans la commune de Pithiviers-le-Vieil a été annulé le 6 février 2001, postérieurement à la date du dépôt en mairie du nouveau plan parcellaire ordonné par arrêté du 9 juin 1994 ; que, par suite, en se fondant sur cette annulation pour prononcer celle de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du Loiret du 8 juin 2000, la cour a commis une erreur de droit justifiant l'annulation de son arrêt ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués par M. et Mme A à l'appui de leur requête d'appel ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-4 du code de justice administrative : Dans les affaires où ne s'appliquent pas les dispositions de l'article R. 431-2, les requêtes et les mémoires doivent être signés par leur auteur et, dans le cas d'une personne morale, par une personne justifiant de sa qualité pour agir ;

Considérant que par sa décision du 8 juin 2000, prise à la suite de l'annulation d'une précédente décision en date du 16 décembre 1993, la commission départementale d'aménagement foncier du Loiret a statué sur la réclamation de M. et Mme A relative au compte n° 52 des biens appartenant à la communauté des époux et aux comptes n°s 82 et 83 des biens propres de Mme A ; que cette décision a été déférée devant le tribunal administratif d'Orléans, dans le délai de recours contentieux, par une requête signée par M. A ; qu'en apposant sa signature sur un mémoire en réplique présenté le 16 mars 2001, Mme A doit être regardée comme ayant présenté une demande personnelle de nature à régulariser les conclusions relatives aux comptes n°s 82 et 83 ; qu'il suit de là que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ces conclusions comme tardives ; que le jugement du 6 février 2001 doit être annulé dans cette mesure ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif d'Orléans ;

Considérant qu'eu égard à la date à laquelle l'arrêté du 7 août 1991 ordonnant le remembrement a été annulé, l'exception tirée de l'illégalité de cet arrêté, soulevée à l'encontre de la décision attaquée de la commission départementale d'aménagement foncier du Loiret, ne peut être accueillie ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-1 du code rural, dans sa rédaction issue de la loi du 11 décembre 1992 applicable au litige : « Le remembrement, applicable aux propriétés rurales non bâties, se fait au moyen d'une nouvelle distribution des parcelles morcelées et dispersées. / Il a principalement pour but, par la constitution d'exploitations rurales d'un seul tenant ou à grandes parcelles bien groupées, d'améliorer l'exploitation agricole des biens qui y sont soumis » ; qu'aux termes de l'article L. 123-3 du même code, dans sa rédaction issue de la même loi : « Doivent être réattribués à leurs propriétaires, sauf accord contraire, et ne subir que les modifications de limites indispensables à l'aménagement :… 5° De façon générale, les immeubles dont les propriétaires ne peuvent bénéficier de l'opération de remembrement, en raison de l'utilisation spéciale desdits immeubles » ;

Considérant que si la présence sur la parcelle ZD 8 d'un puits en maçonnerie de 50 mètres de profondeur confère à cette parcelle le caractère d'un immeuble à utilisation spéciale au sens des dispositions précitées de l'article L. 123-3 du code rural, l'existence de canalisations souterraines installées par M. A afin d'irriguer les parcelles ZC 31 et ZC 69, et de points de sortie d'eau sur ces parcelles, non contiguës à la parcelle ZD 8, ne suffit pas, dans les circonstances de l'espèce, à faire regarder ces parcelles comme des immeubles à utilisation spéciale ; que, par suite la commission départementale d'aménagement foncier, qui, en exécution du jugement annulant sa précédente décision, a réattribué la parcelle ZD 8 au compte n° 52 des biens de communauté de M. et Mme A, n'était pas tenue de réattribuer aux comptes n°s 82 et 83 des biens propres de Mme A les parcelles ZC 31 et ZC 69 ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que les conditions d'exploitation de ces comptes aient été détériorées en raison de la non-réattribution de ces parcelles, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 123-1 du code rural ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du Loiret du 8 juin 2000 en tant qu'elle concerne les comptes n°s 82 et 83 ;

Sur les conclusions de M. et Mme A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme que demandent M. et Mme A devant le Conseil d'Etat et la cour administrative d'appel de Nantes au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;



D E C I D E :
--------------

Article 1er : L'arrêt n° 02NT00085 du 30 décembre 2003 de la cour administrative d'appel de Nantes et le jugement du 6 février 2001 du tribunal administratif d'Orléans sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif d'Orléans est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. et Mme A devant le Conseil d'Etat et la cour administrative d'appel de Nantes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE, à M. Serge A et Mme Françoise A.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 06 avr. 2007, n° 265702
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: Mme Carine Soulay
Rapporteur public ?: M. Chauvaux
Avocat(s) : BROUCHOT

Origine de la décision
Formation : Section du contentieux
Date de la décision : 06/04/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 265702
Numéro NOR : CETATEXT000018005918 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2007-04-06;265702 ?
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