Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 juin et 14 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Christophe A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 30 septembre 2004 par laquelle le président de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation, d'une part, du jugement du 28 juin 2004 du tribunal administratif de Melun qui a rejeté sa demande d'annulation de la décision du recteur de l'académie de Créteil du 14 mai 2002 opérant une retenue sur son traitement, d'autre part, de cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Henri Plagnol, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Tiffreau, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;
Sur la requête présentée devant le Conseil d'Etat :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : ... dans les litiges énumérés aux 1°, 4°, 5°, 6°, 7°, 8° et 9° de l'article R. 222-13, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort. Il en va de même pour les litiges visés au 2° et au 3° de cet article, sauf pour les recours comportant des conclusions tendant au versement ou à la décharge de sommes d'un montant supérieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15. ; que le 2° de l'article R. 222-13 concerne les litiges relatifs à la situation individuelle des fonctionnaires ou agents de l'Etat... à l'exception de ceux concernant l'entrée au service, la discipline et la sortie du service ; qu'aux termes de l'article R. 351-2 du même code : Lorsqu'une cour administrative d'appel ou un tribunal administratif est saisi de conclusions qu'il estime relever de la compétence du Conseil d'Etat, son président transmet sans délai le dossier au Conseil d'Etat qui poursuit l'instruction de l'affaire... ; qu'aux termes de l'article R. 351-4 du code de justice administrative : Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi un tribunal administratif, une cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat relève de la compétence d'une juridiction administrative, le tribunal administratif, la cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat, selon le cas, est compétent, nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance ou pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur tout ou partie des conclusions ; qu'en l'espèce, le litige n'ayant pas de caractère disciplinaire, la cour administrative d'appel était saisie d'un recours dirigé contre un jugement d'un tribunal administratif statuant en dernier ressort ; qu'en l'absence d'irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance ou de constatation d'un non-lieu à statuer, son président devait transmettre sans délai le dossier au Conseil d'Etat ; qu'ainsi, en rejetant comme entachée d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance la requête de M. A, le président de la troisième chambre de la cour administrative d'appel de Paris a méconnu son office et commis une erreur de droit ; que, dès lors, il y a lieu de faire droit aux conclusions tendant à l'annulation de son ordonnance du 30 septembre 2004 ;
Sur la requête présentée devant la cour administrative d'appel de Paris dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Melun :
Considérant qu'aux termes de l'article 35 de la loi du 11 janvier 1984 : Des décrets en Conseil d'Etat fixent les modalités des différents régimes de congé et déterminent leurs effets sur la situation administrative des fonctionnaires (...) Ils déterminent, en outre, les obligations auxquelles les fonctionnaires demandant le bénéfice ou bénéficiant des congés (...) sont tenus de se soumettre en vue, d'une part, de l'octroi ou du maintien de ces congés et, d'autre part, du rétablissement de leur santé, sous peine de voir réduire ou supprimer le traitement qui leur avait été conservé ; qu'aux termes de l'article 24 du décret du 14 mars 1986 : (...) en cas de maladie dûment constatée et mettant le fonctionnaire dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, celui-ci est de droit mis en congé de maladie ; que, selon le deuxième alinéa de l'article 25 du même décret : L'administration peut faire procéder à tout moment à la contre-visite du demandeur par un médecin agréé ; le fonctionnaire doit se soumettre, sous peine d'interruption du versement de sa rémunération, à cette contre-visite ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A, professeur d'éducation physique et sportive, a été placé en arrêt de travail pour maladie du 28 janvier au 3 février 2002 ; que, lorsque le médecin agréé mandaté par l'inspecteur d'académie de Seine-et-Marne pour effectuer une contre-visite s'est présenté au domicile de M. A, celui-ci, sans invoquer de circonstances particulières, a refusé de le laisser accéder à son appartement et lui a proposé de procéder à la contre-visite soit dans le hall de l'immeuble, soit à son cabinet médical ; qu'à la suite de ces faits, l'administration a décidé le 14 mai 2002 d'opérer une retenue sur le traitement qu'elle lui a versé ; que M. A se pourvoit en cassation contre le jugement par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en annulation de cette décision ;
Considérant qu'après avoir relevé les faits rappelés ci-dessus, le tribunal administratif de Melun a pu, sans les dénaturer et sans méconnaître, ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni le principe du respect de la vie privée, ni encore les dispositions des articles 24 et 25 du décret du 14 mars 1986, juger, d'une part, que M. A avait refusé de se soumettre à la contre-visite, d'autre part, que, dans ces conditions, l'administration avait pu légalement décider d'opérer une retenue sur son traitement ; que, dès lors, M. A n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du président de la troisième chambre de la cour administrative d'appel de Paris en date du 30 septembre 2004 est annulée.
Article 2 : La requête présentée par M. A contre le jugement du tribunal administratif de Melun en date du 28 juin 2004 est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Christophe A et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.