Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 et 23 juin 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Aissatou A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 26 mai 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, faisant droit à la demande de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), a enjoint à Mme A et à tous les occupants de son chef de libérer et de remettre en état l'emplacement situé gare d'Austerlitz, 55 quai d'Austerlitz, Hall Banlieue au niveau dit la mezzanine banlieue, dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de ladite ordonnance, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
2°) statuant comme juge des référés, de faire droit à ses précédentes écritures ;
3°) de mettre à la charge de la Société nationale des chemins de fer français la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Thomas Andrieu, Auditeur,
- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. A et de Me Odent, avocat de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF),
- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-3 du code de justice administrative : En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative ; qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ;
Considérant que, par une ordonnance du 18 mai 2006, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté la requête de la SNCF tendant au versement d'une provision sur les sommes que Mme A lui auraient dues au titre d'une convention d'occupation du domaine public ferroviaire au motif que la convention conclue entre Mme A et la SNCF avait pris fin et que la SNCF ne pouvait dès lors réclamer à l'intéressée, qui occupait sans titre le domaine public, une redevance domaniale ; que, par l'ordonnance attaquée en date du 26 mai 2006, le même juge des référés a ordonné l'expulsion de Mme A du domaine public ferroviaire en relevant que, depuis l'expiration de la convention dont elle avait bénéficié, elle occupait ce domaine sans titre ; qu'en se prononçant ainsi, pour trancher le litige qui lui était soumis, sur la question de l'existence d'un titre permettant à Mme A d'occuper le domaine, à laquelle il avait déjà donné une réponse dans sa précédente ordonnance, le juge des référés a statué dans des conditions qui méconnaissent les exigences qui découlent du principe d'impartialité ; que Mme A est, par suite, fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'à la date de la présente décision, la SNCF ait prévu d'occuper le local en litige pour son propre compte ou de le confier à un nouvel occupant ; qu'ainsi, alors même que Mme A ne verserait aucune redevance à la SNCF au titre de l'occupation du local, la libération de ces locaux ne présente aucun caractère d'urgence ; que, par suite, la demande présentée par la SNCF devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris et tendant à l'expulsion de Mme A ne peut qu'être rejetée ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de la SNCF tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à sa charge le paiement à Mme A de la somme de 2 500 euros au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 26 mai 2006 du juge des référés du tribunal administratif de Paris est annulée.
Article 2 : La demande présentée par la SNCF devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La SNCF versera à Mme A la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Aissatou A, à la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.