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06/11/2006 | FRANCE | N°281072

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 06 novembre 2006, 281072


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er juin 2005 et 7 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION POUR LA PRESERVATION DES PAYSAGES EXCEPTIONNELS DU MEZENC, dont le siège est Le Moulinou à Moudeyres (43150), M. Jean-Pierre A, demeurant ..., Mme Evelyne B, demeurant ..., Mme Claudia C, demeurant ..., Mlle Eliane D, demeurant ..., M. Fernand E, demeurant ..., Mme Marie-Hélène F, demeurant ..., M. Bruno G, demeurant ..., M. Jean H, demeurant ..., M. Etienne I, demeurant ..., Mme Marine J, demeurant ...,

M. Antoine K, demeurant ..., Mme Cécile K, demeurant ..., ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er juin 2005 et 7 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION POUR LA PRESERVATION DES PAYSAGES EXCEPTIONNELS DU MEZENC, dont le siège est Le Moulinou à Moudeyres (43150), M. Jean-Pierre A, demeurant ..., Mme Evelyne B, demeurant ..., Mme Claudia C, demeurant ..., Mlle Eliane D, demeurant ..., M. Fernand E, demeurant ..., Mme Marie-Hélène F, demeurant ..., M. Bruno G, demeurant ..., M. Jean H, demeurant ..., M. Etienne I, demeurant ..., Mme Marine J, demeurant ..., M. Antoine K, demeurant ..., Mme Cécile K, demeurant ..., M. Gilbert L, demeurant ..., Mme Marie-Françoise M, demeurant ..., M. Christian N, demeurant ..., Mme Claire O, demeurant ..., M. Anthony P, demeurant ... et Mlle Catherine Q, demeurant ... ; l' ASSOCIATION POUR LA PRESERVATION DES PAYSAGES EXCEPTIONNELS DU MEZENC et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 5 avril 2005 en tant que par cet arrêt la cour administrative d'appel de Lyon n'a fait que partiellement droit à leurs demandes tendant à l'annulation du jugement du 18 décembre 2003 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand rejetant leurs demandes tendant à l'annulation des permis de construire tacites accordés par le préfet de la Haute-Loire à la société ENSELIA pour la construction de fermes éoliennes ;

2°) de mettre à la charge de la société ENSELIA la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 85/337, du Conseil, du 27 juin 1985 ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le décret n ° 77-1141 du 12 octobre 1977 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bertrand Dacosta, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Blondel, avocat de l'ASSOCIATION PRESERVATION DES PAYSAGES EXCEPTIONNELS DU MEZENC et autres et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société ENSELIA,

- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé les permis de construire accordés à la société ENSELIA par le préfet de la Haute-Loire en tant qu'ils portent sur quatre éoliennes et rejeté la requête de l'ASSOCIATION POUR LA PRESERVATION DES PAYSAGES EXCEPTIONNELS DU MEZENC et d'autres requérants en tant qu'elles portent sur les autres éoliennes dont l'implantation a été autorisée par les permis contestés ; que ces derniers demandent l'annulation de l'arrêt en tant qu'il a rejeté le surplus de leurs conclusions ; que, par la voie d'un pourvoi incident, la société ENSELIA demande l'annulation de l'arrêt en tant qu'il a annulé les autorisations de construire relatives aux éoliennes C1, C2, C4 et S6 ;

Sur les conclusions présentées par l'ASSOCIATION POUR LA PRESERVATION DES PAYSAGES EXCEPTIONNELS DU MEZENC et les autres requérants :

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la minute de l'arrêt attaqué porte les signatures exigées par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; que la circonstance que la copie de l'arrêt notifiée aux requérants ne porterait pas ces signatures est, par elle-même, sans incidence sur sa régularité ;

Considérant qu'en estimant que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand avait répondu, dans ses différentes branches, au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme, et en rejetant pour ce motif le moyen, invoqué devant elle, tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué, la cour administrative d'appel a suffisamment motivé son arrêt sans dénaturer les pièces du dossier ;

Sur le bien fondé de l'arrêt attaqué :

Considérant, en premier lieu, que les juges du fond n'ont pas dénaturé les pièces du dossier en estimant que les autorisations dont ils ont prononcé l'annulation étaient divisibles des autres autorisations accordées par les permis contestés ; que les moyens tirés par les requérants de ce que l'atteinte portée à l'ensemble du projet par l'annulation partielle prononcée par la cour serait de nature à remettre en cause la régularité de la procédure d'octroi des permis, notamment en dénaturant l'avis favorable donné par les communes intéressées qui était fondé sur le bilan positif de l'ensemble de l'opération, sont inopérants dès lors qu'ils tendent à contester la régularité d'une autorisation administrative à raison de l'effet sur celle-ci de la décision prise par le juge quant à sa légalité ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour rejeter le moyen tiré de l'insuffisante publicité donnée à l'étude d'impact, la cour s'est fondée sur ce que les exigences fixées par la directive du 27 juin 1985 n'étaient en tout état de cause applicables que lorsque l'Etat membre a lui-même décidé de soumettre un projet à étude d'impact ; qu'elle a pu, sans dénaturer les pièces du dossier, relever que la société ENSELIA avait réalisé de sa propre initiative une étude d'impact ; que, dès lors, en se fondant à titre principal sur ce que, dans l'état du droit en vigueur à la date d'intervention des permis contestés, les mesures de publicité de l'étude d'impact prévues par la directive ne constituaient pas une exigence applicable et que, par suite, la procédure n'était pas entachée d'irrégularité, les juges du fond n'ont commis aucune erreur de droit ;

Considérant, en troisième lieu, que si l'article R. 421-1-1 du code de l'urbanisme exige que le dossier soumis par le pétitionnaire soit, le cas échéant, accompagné d'une autorisation d'occupation du domaine public, la cour administrative d'appel n'a entaché son arrêt ni d'erreur de droit, ni de dénaturation des faits, en estimant que la seule circonstance que des éoliennes surplomberaient un sentier de grande randonnée, lequel emprunte des voies publiques ou privées, n'impliquait pas, par elle-même, une autorisation préalable des collectivités publiques traversées par ce sentier ; que la cour, par ailleurs, n'a pas dénaturé les écritures des requérants en écartant comme n'étant pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier la portée le moyen tiré de l'absence de délibération du conseil municipal autorisant le maire de la commune de Saint-Font à permettre le surplomb par une éolienne d'une parcelle appartenant à la commune ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en regardant les projets litigieux comme n'étant pas de nature à porter atteinte au site et en rejetant, pour ce motif, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique ;

Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, statuant sur le fondement de cette disposition, les juges du fond ont relevé qu'il était établi que des ruptures de pales ou, dans une moindre mesure, de mâts étaient survenues dans un rayon de 300 m et qu'un tel risque existait dans un rayon de 500 m ; qu'ils ont ensuite appliqué ce critère aux projets d'implantation d'éoliennes en tenant compte de la topographie des lieux, ce qui les a conduit à annuler les autorisations relatives à des projets situés à l'intérieur d'un périmètre regardé comme définissant la zone de risque, dans le cas où l'environnement était peu marqué par le relief, et à estimer que les autres projets situés dans le même périmètre, correspondant aux éoliennes C3 et C5, avaient pu, sans erreur manifeste, être autorisés compte tenu de la topographie des lieux ; qu'en statuant de la sorte, les juges du fond, qui n'ont pas commis d'erreur de droit en appliquant de façon différente aux situations qui leur étaient soumises le critère de distance qu'ils ont eux-mêmes dégagé, se sont livrés à une appréciation souveraine qu'il n'appartient pas au juge de cassation de contrôler ; qu'enfin, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier en estimant, au vu des écritures des requérants, que ceux-ci ne l'avaient pas saisie d'une argumentation tendant, sur le même fondement, à l'annulation des autres autorisations relatives à des éoliennes qui se seraient trouvées à une distance inférieure à 500 m d'habitations ou d'une route départementale ;

Considérant, enfin, que le moyen tiré du détournement de procédure est nouveau en cassation et, par suite, irrecevable ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a rejeté le surplus de leurs conclusions ;

Sur le pourvoi incident présenté par la société ENSELIA :

Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces et documents soumis aux juges du fond, en particulier le bail à long terme passé entre cette société et le propriétaire d'une des parcelles sur lesquelles devait être implantée l'installation litigieuse, que la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, aurait dénaturé les pièces du dossier en regardant la société ENSELIA comme dépourvue des titres ou qualités exigés du pétitionnaire par l'article R 421-1-1 du code de l'urbanisme en ce qui concerne sa demande d'autorisation relative à l'éolienne C2 ;

Considérant, en second lieu, que c'est par une appréciation souveraine des pièces du dossier qui leur était soumis, exempte de dénaturation, que les juges du fond ont regardé comme entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, l'autorisation d'implantation des éoliennes C1, C4 et S6 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société ENSELIA n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a annulé les autorisations de construire accordées pour les éoliennes C1, C2, C4 et S6 ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu de mettre à la charge de chacune des parties la somme demandée par la partie adverse sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION POUR LA PRESERVATION DES PAYSAGES EXCEPTIONNELS DU MEZENC et des autres requérants est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du pourvoi incident de la société ENSELIA sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION POUR LA PRESERVATION DES PAYSAGES EXCEPTIONNELS DU MEZENC à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, mandataire unique de l'association et de l'ensemble des requérants et chargée, à ce titre, de leur donner connaissance de cette décision, au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, à la société ENSELIA et au ministre de l'écologie et du développement durable.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 281072
Date de la décision : 06/11/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - VOIES DE RECOURS - CASSATION - CONTRÔLE DU JUGE DE CASSATION - RÉGULARITÉ INTERNE - APPRÉCIATION SOUVERAINE DES JUGES DU FOND - PERMIS DE CONSTRUIRE - DIVISIBILITÉ.

54-08-02-02-01-03 Le juge de cassation exerce un contrôle limité à la dénaturation sur le caractère divisible des dispositions d'un permis de construire.

URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - DIVISIBILITÉ - CONTRÔLE DU JUGE DE CASSATION - APPRÉCIATION SOUVERAINE DES JUGES DU FOND.

68-03 Le juge de cassation exerce un contrôle limité à la dénaturation sur le caractère divisible des dispositions d'un permis de construire.


Publications
Proposition de citation : CE, 06 nov. 2006, n° 281072
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Bertrand Dacosta
Rapporteur public ?: M. Aguila
Avocat(s) : BLONDEL ; SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:281072.20061106
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