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27/07/2006 | FRANCE | N°278122

France | France, Conseil d'État, 6eme sous-section jugeant seule, 27 juillet 2006, 278122


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er mars 2005 et 14 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 30 décembre 2004 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer les documents nécessaires à l'enregistrement de sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile, d'examiner cette demande et de lui délivrer une autorisation prov

isoire de séjour ;

2°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer l...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er mars 2005 et 14 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 30 décembre 2004 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer les documents nécessaires à l'enregistrement de sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile, d'examiner cette demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

2°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer les documents nécessaires à l'enregistrement de sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile, d'examiner cette demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son profit de la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 52 ;893 du 25 juillet 1952, modifiée notamment par la loi n° 2003 ;1176 du 10 décembre 2003 ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 ;

Vu le décret n° 2004-814 du 14 août 2004 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Chavanat, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public (…) aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale » ; qu'aux termes de l'article L. 522-3 du même code : « Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article L. 522-1 » ; que le juge des référés délégué par le président du tribunal administratif de Paris, saisi par M. A d'une demande tendant à ce que, sur le fondement de l'article L. 521-2, il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer les documents nécessaires à l'enregistrement de sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile, d'examiner cette demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, a rejeté cette demande en application de l'article L. 522-3 ; qu'en application des dispositions combinées des articles L. 331-1 et L. 523-1 du code de justice administrative, M. A se pourvoit en cassation contre cette ordonnance ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que le droit constitutionnel d'asile, qui a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié, a le caractère d'une liberté fondamentale ; qu'il suit de là qu'en jugeant que le droit d'asile n'est pas une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, le juge des référés a commis une erreur de droit ; qu'ainsi, l'ordonnance attaquée doit être annulée ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la loi du 25 juillet 1952 en vigueur jusqu'au 28 février 2005 : Lorsqu'un étranger, se trouvant à l'intérieur du territoire français, demande à bénéficier de l'asile, l'examen de sa demande d'admission au séjour relève du préfet compétent et, à Paris, du préfet de police (…) l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (…) / 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente (…) /. Dans le cas où l'admission au séjour a été refusée pour l'un des motifs mentionnés aux 2° à 4°, l'étranger qui souhaite bénéficier de l'asile peut saisir l'office de sa demande ; qu'aux termes de l'article 9 de la même loi : « Lorsqu'il est admis à séjourner en France en application des dispositions de l'article 8, l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. L'office ne peut être saisi qu'après la remise de ce document au demandeur. (…) » que l'article 10 dispose : L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article 8 bénéficie du droit à se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée aux articles 19, 22, 23 ou 26 de l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'office français de protection des réfugiés et apatrides a, par une décision du 30 août 2002, refusé à M. A l'admission au statut de réfugié qu'il avait sollicitée ; que la commission de recours des réfugiés a confirmé cette décision le 23 mai 2003 ; que le 8 décembre 2003 l'intéressé a fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière ; qu'il a présenté, le 20 juillet 2004 une nouvelle demande d'asile ; que le préfet de police lui a refusé le droit au séjour au motif que cette demande n'était présentée que pour faire échec à l'arrêté de reconduite à la frontière prononcé à son encontre ;

Considérant qu'alors même que ne lui avait pas été délivrée d'autorisation provisoire de séjour, M. A pouvait saisir l'office français de protection des réfugiés et apatrides de sa demande et bénéficier du droit à se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'office ; qu'au surplus il ressort des pièces du dossier que M. A s'était vu délivrer le 5 novembre 2004 une nouvelle convocation à la préfecture de police pour le 17 février 2005 en vue d'un réexamen de sa demande l'invitant à produire « de nouvelles preuves de persécution » ; qu'il suit de là que sa demande présentée le 29 décembre 2004 ne peut être regardée comme étant justifiée par l'urgence et qu'il n'est pas fondé à soutenir qu'a été portée une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constituent le droit d'asile et son corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié ; qu'ainsi, sa requête ne satisfait pas aux conditions cumulatives posées par l'article L. 521 ;2 du code de justice administrative ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du 30 décembre 2004 du juge des référés du tribunal administratif de Paris est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X... A et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 6eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 278122
Date de la décision : 27/07/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2006, n° 278122
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bonichot
Rapporteur ?: M. Bruno Chavanat
Rapporteur public ?: M. Aguila
Avocat(s) : SCP ROGER, SEVAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:278122.20060727
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