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06/02/2006 | FRANCE | N°265785

France | France, Conseil d'État, 1ere sous-section jugeant seule, 06 février 2006, 265785


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 mars et 21 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Joël X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 20 janvier 2004 par lequel la cour régionale des pensions de Rouen, faisant droit à l'appel formé par le ministre de la défense, a annulé le jugement du 28 janvier 2003 du tribunal départemental des pensions militaires de l'Eure qui avait annulé les décisions de rejet opposées à sa demande d'intérêts moratoires au ta

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 mars et 21 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Joël X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 20 janvier 2004 par lequel la cour régionale des pensions de Rouen, faisant droit à l'appel formé par le ministre de la défense, a annulé le jugement du 28 janvier 2003 du tribunal départemental des pensions militaires de l'Eure qui avait annulé les décisions de rejet opposées à sa demande d'intérêts moratoires au taux légal à valoir sur une somme de 195 852,51 F en raison du versement tardif des arrérages de sa pension militaire d'invalidité et a rejeté les prétentions de M. X ;

2°) réglant l'affaire au fond, de condamner l'Etat au paiement de la somme de 29 731,36 euros correspondant aux intérêts moratoires dus avec intérêts de droit à compter du 21 avril 1986 et capitalisation des intérêts à la date du 15 mai 1995 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. X de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine de Salins, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Jacques-Henri Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. X, qui a bénéficié à titre temporaire d'une pension militaire d'invalidité du 21 avril 1977 au 20 avril 1986 en raison d'une tuberculose pulmonaire contractée pendant son service militaire, s'est vu refuser le renouvellement de cette pension ; que cependant, par un arrêt en date du 22 novembre 1989, la cour régionale des pensions de Rouen a annulé cette décision et a accordé à l'intéressé le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité définitive au taux de 65 % au titre de cette infirmité à compter du 21 avril 1986, date de sa demande de renouvellement ; que les arrérages correspondant lui ont été versés le 15 mai 1995 ; que si, par jugement en date du 28 janvier 2003, le tribunal départemental des pensions de l'Eure a fait droit à sa demande de paiement d'intérêts moratoires sur la somme ainsi versée, en raison du retard apporté à ce versement, la cour régionale des pensions de Rouen, par l'arrêt attaqué en date du 20 janvier 2004, a infirmé ce jugement et rejeté la demande d'intérêts moratoires de M. X ;

Considérant que les bénéficiaires de pensions militaires d'invalidité ont droit, sur leur demande, en cas de retard apporté au versement de sommes qui leur sont dues, au versement d'intérêts moratoires ; que, dès lors, en jugeant que les dispositions des articles 1153 et suivants du code civil ne s'appliquaient pas au litige dont elle était saisie, la cour a fait une inexacte application de la loi ; que son arrêt doit, par suite, être annulé ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article L. 821 ;2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Sur l'appel principal du ministre :

Considérant, ainsi qu'il vient d'être dit ci ;dessus, que les bénéficiaires de pensions militaires d'invalidité ont droit, sur leur demande, en cas de retard apporté au versement de sommes qui leur sont dues, au versement d'intérêts moratoires ; qu'il est constant que M. X n'a perçu que le 15 mai 1995 les arrérages de la pension militaire d'invalidité qui lui étaient dus depuis le 21 avril 1986, soit la somme de 195 852,51 F (29 857,52 euros) ; que, dans ces conditions, le ministre de la défense n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal départemental des pensions de l'Eure, faisant droit à la demande de l'intéressé, lui a accordé des intérêts moratoires au taux légal sur cette somme à compter du 21 avril 1986 jusqu'au 15 mai 1995 et décidé que le taux légal serait majoré de cinq points à compter du 1er mai 1990 ;

Sur l'appel incident de M. X tendant au bénéfice des intérêts sur les intérêts moratoires :

Considérant que, dans le cas où le débiteur s'étant acquitté de sa dette au principal, a interrompu le cours des intérêts moratoires mais ne les a pas payés, les intérêts qui étaient dus au jour du paiement du principal forment eux ;mêmes une créance productive d'intérêts dans les conditions de l'article 1153 du code civil ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal départemental des pensions a rejeté ses conclusions tendant à ce que la somme due au titre des intérêts moratoires porte elle ;même intérêt au taux légal à compter du 15 mai 1995 jusqu'à la date de versement de ces derniers ;

Considérant, enfin, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande M. X tendant à ce qu'en application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative, l'Etat lui verse la somme de 3 000 euros au titre des frais qu'il a exposés dans le cadre de la présente instance et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Rouen en date du 20 janvier 2004 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de l'appel du ministre de la défense sont rejetées.

Article 3 : L'Etat versera à M. X les intérêts au taux légal sur le montant des intérêts moratoires dont le jugement du tribunal départemental des pensions de l'Eure en date du 28 janvier 2003 a mis le paiement à sa charge, pour la période du 15 mai 1995 jusqu'à la date du paiement de ces intérêts moratoires.

Article 4 : Le jugement du tribunal départemental des pensions de l'Eure en date du 28 janvier 2003 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 3.

Article 5 : L'Etat versera à M. X la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Joël X et au ministre de la défense.


Synthèse
Formation : 1ere sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 265785
Date de la décision : 06/02/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 06 fév. 2006, n° 265785
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: Mme Catherine de Salins
Rapporteur public ?: M. Stahl
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:265785.20060206
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