Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er octobre et 31 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE JCB IMMOBILIER, dont le siège est 4 ter, rue Louise Michel à Rosny-sous-Bois (93110), représentée par son gérant en exercice ; la SOCIETE JCB IMMOBILIER demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 29 juillet 2004 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné l'Etat à lui verser la somme de 19 208,58 euros en réparation du préjudice résultant du refus de lui accorder le concours de la force publique pour la période postérieure au 17 mai 1997 ;
2°) statuant au fond, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 44 832,15 euros avec intérêts à compter du 11 juin 2003 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Damien Botteghi, Auditeur ;
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la SOCIETE JCB IMMOBILIER ;
- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des termes du jugement attaqué, qu'après avoir admis que la responsabilité de l'Etat était engagée à l'égard de la SOCIETE JCB IMMOBILIER à compter du 17 mai 1997 à la suite du refus opposé à sa demande de concours de la force publique pour assurer l'exécution d'une décision de justice autorisant l'expulsion de l'occupante d'un appartement dont celle ;ci est propriétaire à Saint ;Denis, le tribunal administratif de Cergy ;Pontoise a rejeté la demande de la société tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité représentative des taxes foncières et charges de copropriété qu'elle a dû supporter du 17 mai 1997 au 31 décembre 2004 en qualité de propriétaire, ainsi que du redressement fiscal dont elle a été l'objet en sa qualité de marchand de biens, en l'absence de revente de l'immeuble dans le délai prévu par l'article 1115 du code général des impôts qui expirait le 31 décembre 1998 ; qu'en écartant cette demande au motif que la société ne rapportait pas la preuve de tentatives infructueuses de vente alors qu'il ressortait des pièces du dossier soumis aux juges du fond que celle ;ci, dont l'objet est d'acheter des biens pour les revendre, avait depuis 1993 entrepris de nombreuses démarches pour faire libérer le bien et que l'impossibilité de le céder à des conditions économiques normales avait fait obstacle à son intention de le revendre, les premiers juges ont dénaturé les faits de l'espèce ; que la SOCIETE JCB IMMOBILIER est dans cette mesure fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Considérant qu'il y a lieu de juger dans cette même mesure l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821 ;2 du code de justice administrative ;
Considérant que le refus de concours de la force publique opposé à la SOCIETE JCB IMMOBILIER a fait perdre à cette société une chance sérieuse de vendre à des conditions économiques normales et dans un délai raisonnable l'immeuble qu'elle avait acquis ; que le préjudice résultant du redressement fiscal consécutif à l'impossibilité dans laquelle la société s'était trouvée de revendre le bien dans le délai prévu par l'article 1115 du code général des impôts doit, dans les circonstances de l'espèce, être regardé comme une conséquence directe du refus du concours de la force publique opposé par le préfet le 17 mars 1997 ; qu'il y a lieu en conséquence de condamner l'Etat à verser de ce chef à la société une indemnité de 5 558 euros, qui portera intérêts à compter du 11 juin 2003, date à laquelle la société a demandé le remboursement du redressement fiscal qui lui a été notifié le 2 avril 2003 ; qu'en revanche la société, qui a obtenu par la partie du jugement du tribunal administratif devenue définitive, une indemnité de 19 208, 58 euros réparant la perte des revenus locatifs afférents à l'appartement pour la période postérieure au 17 mai 1997, ne saurait prétendre en sus au remboursement des charges de copropriété et de la taxe foncière qu'elle a assumées au cours de cette période ;
Sur les conclusions relatives à la mise en oeuvre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros demandée par la société requérante au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 29 juillet 2004 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de la SOCIETE JCB IMMOBILIER tendant à ce que l'Etat soit condamné à l'indemniser des préjudices afférents aux charges de copropriété, aux taxes foncières et au redressement fiscal auxquels elle a été exposée postérieurement au 17 mai 1997 du fait du refus de l'Etat de lui accorder le concours de la force publique.
Article 2 : L'Etat est condamné à payer à la SOCIETE JCB IMMOBILIER une indemnité complémentaire de 5 558 euros qui portera intérêts à compter du 11 juin 2003.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à la SOCIETE JCB IMMOBILIER au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE JCB IMMOBILIER est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE JCB IMMOBILIER, au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.