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13/12/2005 | FRANCE | N°261718

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 13 décembre 2005, 261718


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 novembre 2003 et 12 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES CANADIENS, dont le siège social est 20, rue des Canadiens à Broglie (27270) ; la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES CANADIENS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 10 septembre 2003 par laquelle le président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa demande d'annulation du jugement du 30 avril 2003 du tribunal administratif de Rou

en ayant rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 novembre 2003 et 12 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES CANADIENS, dont le siège social est 20, rue des Canadiens à Broglie (27270) ; la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES CANADIENS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 10 septembre 2003 par laquelle le président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa demande d'annulation du jugement du 30 avril 2003 du tribunal administratif de Rouen ayant rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 25 février 1999 par laquelle l'agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) lui a demandé le reversement de l'acompte actualisé de 80 005 F, qu'elle a perçu sur le montant de la subvention accordée par l'ANAH pour des travaux sur l'immeuble situé 26, rue des Canadiens à Broglie et, d'autre part, à ce que soit enjoint à l'ANAH d'accorder les délais suffisants pour effectuer les travaux après établissement d'un règlement de copropriété et de nommer un expert afin de vérifier les conditions de calcul du montant de la subvention ou, le cas échéant, à ce qu'il calcule lui-même ce montant ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 300 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dumortier, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES CANADIENS et de la SCP Choucroy, Gadiou, Chevallier, avocat de l'agence nationale pour l'amélioration de l'habitat,

- les conclusions de Mme Anne-Françoise Roul, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 612-1 du code de justice administrative : « Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. / Toutefois, la juridiction d'appel ou de cassation peut rejeter de telles conclusions sans demande de régularisation préalable pour les cas d'irrecevabilité tirés de la méconnaissance d'une obligation mentionnée dans la notification de la décision attaquée conformément à l'article R. 751-5...» ; qu'aux termes de l'article R. 751-5 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : « ... la notification mentionne que la requête d'appel ou le pourvoi en cassation doit justifier de l'acquittement du droit de timbre prévu à l'article L. 411-1 ou de ce que le requérant remplit les conditions permettant de bénéficier de l'aide juridictionnelle.... » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la juridiction d'appel ne peut rejeter des conclusions entachées d'une irrégularité tirée de la méconnaissance d'une obligation mentionnée dans la notification de la décision attaquée sans demande de régularisation préalable que s'il est établi que leur auteur a été régulièrement destinataire de cette notification ; que cette condition ne peut être regardée comme remplie lorsque, la décision attaquée ayant été notifiée à l'intéressé par un courrier recommandé, à la suite d'une défaillance du service des postes, soit ce courrier n'a pas été présenté au domicile de l'intéressé, soit, ayant été présenté en son absence, n'a pas été conservé pendant le délai de mise en instance prévu par la réglementation postale ;

Considérant que, s'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le jugement du tribunal administratif de Rouen du 30 avril 2003 a fait l'objet d'une notification à la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES CANADIENS datée du 6 juin 2003 et que la lettre de notification comportait mention de l'obligation de timbrer la requête présentée en appel, il ressort des mêmes pièces que la société n'a pas reçu cette lettre de notification et que ce courrier a été retourné à la juridiction avant l'expiration du délai de mise en instance au bureau de poste ; que, dans ces conditions, la requérante ne peut être regardée comme ayant reçu le courrier de notification comportant les mentions prévues à l'article R. 751-5 du code de justice administrative ; qu'elle est, par suite, fondée à soutenir que le président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Douai, en rejetant comme irrecevable son appel sans l'inviter à régulariser sa requête, a entaché son ordonnance d'une erreur de droit, et à demander l'annulation de cette ordonnance ;

Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête :

Considérant que, le 11 juillet 1995, la commission d'amélioration de l'habitat de l'Eure a donné son accord à l'attribution à la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES CANADIENS d'une subvention pour la réalisation de travaux de rénovation d'un logement situé dans un immeuble sis 26, rue des Canadiens à Broglie ; que l'octroi de cette subvention était notamment subordonné, aux termes de l'engagement souscrit par le bénéficiaire, à l'achèvement des travaux dans un délai de deux ans, prorogé d'un an par une décision du 18 septembre 1997 ; qu'il est constant que cet engagement n'a pas été respecté ; que si la société requérante invoque un cas de force majeure qui aurait rendu impossible l'exécution des travaux, se prévalant, à ce titre, de ce que la rédaction d'un règlement de copropriété n'a pu intervenir, ce qui l'a empêché d'obtenir le prêt supplémentaire nécessaire à l'achèvement des travaux, elle n'établit pas que cet évènement était imprévisible au moment où la demande de subvention a été effectuée et, a fortiori, où l'aide a été versée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES CANADIENS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES CANADIENS la somme que l'agence nationale pour l'amélioration de l'habitat demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du 10 septembre 2003 du président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Douai est annulée.

Article 2 : Les conclusions présentées en appel par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES CANADIENS et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.

Article 3 : Les conclusions de l'agence nationale pour l'amélioration de l'habitat tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES CANADIENS, à l'agence nationale pour l'amélioration de l'habitat et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - FORMES DE LA REQUÊTE - IRRÉGULARITÉ SUSCEPTIBLE D'ÊTRE COUVERTE APRÈS L'EXPIRATION DU DÉLAI DE RECOURS - IRRÉGULARITÉ RÉSULTANT DE LA MÉCONNAISSANCE D'UNE OBLIGATION MENTIONNÉE DANS LA NOTIFICATION DE LA DÉCISION ATTAQUÉE - REJET DE LA REQUÊTE SUBORDONNÉ À UNE DEMANDE DE RÉGULARISATION PRÉALABLE - A) ABSENCE LORSQUE LA DÉCISION ATTAQUÉE A ÉTÉ RÉGULIÈREMENT NOTIFIÉE (ART - R - 612-1 ET R - 751-5 DU CJA) - B) EXISTENCE EN CAS DE NOTIFICATION IRRÉGULIÈRE.

54-01-08 a) Il résulte des dispositions des articles R. 612-1 et R. 751-5 du code de justice administrative que la juridiction d'appel ne peut rejeter des conclusions entachées d'une irrégularité tirée de la méconnaissance d'une obligation mentionnée dans la notification de la décision attaquée sans demande de régularisation préalable que s'il est établi que leur auteur a été régulièrement destinataire de cette notification.... ...b) Cette condition ne peut être regardée comme remplie lorsque, la décision attaquée ayant été notifiée à l'intéressé par un courrier recommandé, à la suite d'une défaillance du service des postes, soit ce courrier n'a pas été présenté au domicile de l'intéressé, soit, ayant été présenté en son absence, n'a pas été conservé pendant le délai de mise en instance prévu par la réglementation postale.

PROCÉDURE - VOIES DE RECOURS - APPEL - RECEVABILITÉ - IRRECEVABILITÉ SUSCEPTIBLE D'ÊTRE COUVERTE APRÈS L'EXPIRATION DU DÉLAI DE RECOURS - IRRÉGULARITÉ RÉSULTANT DE LA MÉCONNAISSANCE D'UNE OBLIGATION MENTIONNÉE DANS LA NOTIFICATION DE LA DÉCISION ATTAQUÉE - REJET DE LA REQUÊTE SUBORDONNÉ À UNE DEMANDE DE RÉGULARISATION PRÉALABLE - A) ABSENCE LORSQUE LA DÉCISION ATTAQUÉE A ÉTÉ RÉGULIÈREMENT NOTIFIÉE (ART - R - 612-1 ET R - 751-5 DU CJA) - B) EXISTENCE EN CAS DE NOTIFICATION IRRÉGULIÈRE.

54-08-01-01 a) Il résulte des dispositions des articles R. 612-1 et R. 751-5 du code de justice administrative que la juridiction d'appel ne peut rejeter des conclusions entachées d'une irrégularité tirée de la méconnaissance d'une obligation mentionnée dans la notification de la décision attaquée sans demande de régularisation préalable que s'il est établi que leur auteur a été régulièrement destinataire de cette notification.... ...b) Cette condition ne peut être regardée comme remplie lorsque, la décision attaquée ayant été notifiée à l'intéressé par un courrier recommandé, à la suite d'une défaillance du service des postes, soit ce courrier n'a pas été présenté au domicile de l'intéressé, soit, ayant été présenté en son absence, n'a pas été conservé pendant le délai de mise en instance prévu par la réglementation postale.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 13 déc. 2005, n° 261718
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: Mme Gaëlle Dumortier
Rapporteur public ?: Mme Roul
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET ; SCP CHOUCROY, GADIOU, CHEVALLIER

Origine de la décision
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Date de la décision : 13/12/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 261718
Numéro NOR : CETATEXT000008260277 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-12-13;261718 ?
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