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23/11/2005 | FRANCE | N°276841

France | France, Conseil d'État, 6eme et 1ere sous-sections reunies, 23 novembre 2005, 276841


Vu la requête, enregistrée le 24 janvier 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Pierre A, élisant domicile ... M. DARBÉDA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 23 septembre 2004 par laquelle le procureur général près la cour d'appel de Paris a fixé à 5 % le taux d'attribution individuelle de sa prime modulable pour le quatrième trimestre 2004 ;

2°) d'enjoindre au procureur général près la cour d'appel de Paris de fixer ce taux à 8 % ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 58-1270

du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ;

Vu la loi...

Vu la requête, enregistrée le 24 janvier 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Pierre A, élisant domicile ... M. DARBÉDA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 23 septembre 2004 par laquelle le procureur général près la cour d'appel de Paris a fixé à 5 % le taux d'attribution individuelle de sa prime modulable pour le quatrième trimestre 2004 ;

2°) d'enjoindre au procureur général près la cour d'appel de Paris de fixer ce taux à 8 % ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le décret n° 2003-1284 du 26 décembre 2003 relatif au régime indemnitaire de certains magistrats de l'ordre judiciaire ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Henrard, Auditeur,

- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le décret du 26 décembre 2003 relatif au régime indemnitaire de certains magistrats de l'ordre judiciaire prévoit, à son article 1er, qu'une indemnité peut être allouée aux magistrats de l'ordre judiciaire exerçant leurs fonctions en juridiction ; que cette indemnité, destinée à rémunérer l'importance et la valeur des services rendus et à tenir compte des sujétions afférentes à l'exercice de leurs fonctions, comprend notamment une prime modulable attribuée, en vertu de l'article 3 du décret, « en fonction de la contribution du magistrat au bon fonctionnement de l'institution judiciaire » ; que l'article 7 du décret précise que « La prime modulable est calculée en pourcentage du traitement indiciaire brut. Elle est versée mensuellement. / Le montant des crédits disponibles au titre de la prime modulable pour les magistrats du siège, d'une part, et du parquet, d'autre part (…), est déterminé par application d'un taux moyen à la masse des traitements indiciaires des magistrats concernés. / Le taux d'attribution individuelle de la prime modulable est fixé : / - pour les magistrats exerçant en juridiction, (…) par le procureur général près la cour d'appel ou le procureur de la République près le tribunal supérieur d'appel pour chaque magistrat du parquet de leur ressort, sur proposition du chef de juridiction sous l'autorité duquel est placé le magistrat pour ceux qui sont affectés dans une juridiction du premier degré (…) » ; que l'arrêté interministériel du 17 septembre 2004, pris pour l'application de ce décret et applicable à la prime modulable attribuée au titre du premier trimestre 2005, précise à son article 2 : « Le taux moyen de la prime modulable (…) est fixé à 8 %. / Le taux maximal d'attribution individuelle de cette prime est fixé à 15 % (…) » ;

Considérant que M. A, substitut du procureur général près la cour d'appel de Paris, demande au Conseil d'État d'annuler la décision du 23 septembre 2004 par laquelle le procureur général a fixé à 5 % le taux d'attribution individuelle de sa prime modulable pour le quatrième trimestre 2004 ;

Sur le moyen tiré du défaut de motivation de la décision attaquée :

Considérant qu'en vertu de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, doivent notamment être motivées les décisions qui infligent une sanction ou qui refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ;

Considérant, d'une part, que la décision par laquelle l'autorité qui en est chargée détermine, dans les conditions fixées par le décret cité du 26 décembre 2003 et l'arrêté du 17 septembre 2004 pris pour son application, le montant des indemnités d'un magistrat au regard de sa contribution au bon fonctionnement du service public de la justice, n'a en aucun cas le caractère d'une sanction disciplinaire ;

Considérant, d'autre part, qu'il ne ressort d'aucune des dispositions réglementaires fixant le régime de la prime modulable non plus que d'aucun texte législatif ni d'aucun principe, que les magistrats aient droit à ce que cette prime leur soit attribuée à un taux déterminé ; qu'il suit de là qu'en fixant au taux de 5 % la prime modulable de M. A, la décision attaquée n'a refusé à l'intéressé aucun avantage dont l'attribution constituerait un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de l'illégalité du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime indemnitaire de certains magistrats de l'ordre judiciaire :

Considérant que si les dispositions citées du décret du 26 décembre 2003, par suite du caractère limité du montant des crédits disponibles au titre de la prime modulable, ont nécessairement pour effet que la contribution d'un magistrat au bon fonctionnement de l'institution judiciaire doit être appréciée, à l'occasion de la fixation de son taux individuel de prime, relativement à celle des autres magistrats du même ressort, cette circonstance ne méconnaît pas par elle-même le principe d'égalité ; qu'il suit de là que M. A n'est pas fondé à exciper, à l'encontre de la décision attaquée, de l'illégalité du décret au regard de ce principe ;

Sur le moyen tiré de l'erreur de droit :

Considérant que s'il ressort des termes mêmes du décret du 26 décembre 2003 que l'attribution de la prime modulable ne peut être légalement fondée que sur l'appréciation de la qualité et de la quantité du travail fourni par un magistrat et, de manière générale, de sa contribution au bon fonctionnement du service public de la justice, aucun texte législatif ni réglementaire, ni aucun principe, ne s'opposent à ce que les chefs de cour fassent connaître, par avance, sans fixer de règles impératives, les aspects de cette contribution qu'ils entendent plus particulièrement prendre en compte à l'occasion de la fixation des taux individuels de prime ; qu'en se fondant, ainsi qu'il ressort de la note du 29 octobre 2004 adressée aux magistrats du parquet général près la cour d'appel de Paris, sur des éléments relatifs à la disponibilité et aux contraintes particulières des magistrats, à leur engagement, à leur contribution au bon fonctionnement général du service et à la maîtrise technique acquise, le procureur général, contrairement à ce que soutient M. A, n'a pas illégalement ajouté au décret en subordonnant l'attribution de la prime modulable à d'autres considérations que la contribution des magistrats au bon fonctionnement de l'institution judiciaire, mais s'est borné à expliciter les aspects de cette contribution qu'il entendait plus particulièrement prendre en compte ;

Sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation :

Considérant que les éléments relatifs à la manière de servir du requérant qui ressortent des pièces du dossier ne font pas apparaître qu'en fixant à 5 % le taux de prime contesté, le procureur général près la cour d'appel de Paris ait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. A le paiement à l'Etat de la somme que le garde des sceaux, ministre de la justice, demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le garde des sceaux, ministre de la justice, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à monsieur Pierre A et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 23 nov. 2005, n° 276841
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Olivier Henrard
Rapporteur public ?: M. Aguila

Origine de la décision
Formation : 6eme et 1ere sous-sections reunies
Date de la décision : 23/11/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 276841
Numéro NOR : CETATEXT000008223653 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-11-23;276841 ?
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