Vu le recours, enregistré le 5 juin 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 2 avril 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 5 mai 1998 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a accordé au département du Lot-et-Garonne la décharge de l'obligation de payer la somme de 3 992 634 F correspondant au remboursement d'une attribution qui lui avait été consentie, à raison de la réalisation d'un parc récréatif, sur les ressources du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 88-13 du 5 janvier 1988 ;
Vu l'article 42 de la loi de finances rectificative pour 1988 n° 88 ;1193 du 29 décembre 1988 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Julie Burguburu, Auditeur,
- les observations de la SCP Delvolvé, Delvolvé, avocat du département du Lot-et-Garonne,
- les conclusions de M. Stéphane Verclytte, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une décision en date du 17 novembre 1993, le préfet du Lot-et-Garonne a demandé au département du Lot-et-Garonne de reverser une attribution du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée perçue au titre des dépenses que le département avait réalisées en 1990 et 1991 pour la création d'un parc récréatif, opération déclarée projet d'intérêt général par une décision du préfet en date du 17 novembre 1988 ; que cette demande de reversement était motivée par le fait que le département avait passé un bail emphytéotique d'une durée de trente-six ans portant sur la gestion des installations immobilières du parc récréatif avec la société commerciale d'exploitation Parc Agen, tiers non éligible au fonds ; que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 2 avril 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté son appel formé contre le jugement du 5 mai 1998 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cette décision ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes des dispositions, alors en vigueur, du III de l'article 42 de la loi de finances rectificative pour 1988 du 29 décembre 1988 : Dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, les cessions ou mises à disposition au profit d'un tiers ne figurant pas au nombre des collectivités ou établissements bénéficiaires du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée d'une immobilisation ayant donné lieu au versement d'une attribution dudit fonds entraînent le remboursement de ce versement… ; qu'il résulte tant des travaux préparatoires que des circonstances qui ont présidé à l'adoption de ces dispositions, que, par mises à disposition au profit d'un tiers, le législateur a entendu viser les seuls cas où les conditions dans lesquelles une immobilisation est remise ou confiée par la collectivité ou l'établissement qui l'a réalisée à un tiers, non bénéficiaire du fonds de compensation, font apparaître que l'investissement a principalement eu pour objet ou pour effet d'avantager ce tiers ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes du II de l'article 13 de la loi du 5 janvier 1988 d'amélioration de la décentralisation : Un bien immobilier appartenant à une collectivité territoriale peut faire l'objet, en faveur d'une personne privée, d'un bail emphytéotique prévu à l'article 451-1 du code rural, en vue de l'accomplissement, pour le compte de la collectivité territoriale, d'une mission de service public ou en vue de la réalisation d'une opération d'intérêt général relevant de sa compétence. (…) ; que le III du même article prévoit notamment que les droits résultant d'un tel bail ne peuvent être cédés qu'avec l'agrément de la collectivité territoriale et seulement à une personne subrogée au preneur dans les droits et obligations découlant de ce bail et, le cas échéant, des conventions non détachables conclues pour l'exécution du service public ou la réalisation de l'opération d'intérêt général ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre, les immobilisations données à bail emphytéotique par le département du Lot-et-Garonne à la société Parc Agen ne devaient pas être regardées comme mises à la disposition d'un tiers non éligible au sens des dispositions du III de l'article 42 de la loi du 29 décembre 1988 au seul motif qu'elles concouraient, en l'espèce, à la réalisation de l'objet social de la société anonyme ; que la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a ainsi pas commis l'erreur de droit reprochée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le département du Lot-et-Garonne et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros au département du Lot-et-Garonne au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, au département du Lot-et-Garonne et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.