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08/07/2005 | FRANCE | N°267636

France | France, Conseil d'État, 6eme et 1ere sous-sections reunies, 08 juillet 2005, 267636


Vu la requête, enregistrée le 17 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Jacques X, demeurant ..., Mayotte ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 20 avril 2004 par laquelle le préfet de Mayotte a rejeté sa demande tendant à la prise en charge des frais de voyage exposés à l'occasion des congés annuels intervenant au titre de la deuxième année d'affectation à Mayotte, pour son partenaire de pacte civil de solidarité ;

2°) de condamner l'Etat à payer la somme de 2 188,05 euros au titre du rembourse

ment du coût du billet d'avion de son partenaire, avec intérêts au taux légal ...

Vu la requête, enregistrée le 17 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Jacques X, demeurant ..., Mayotte ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 20 avril 2004 par laquelle le préfet de Mayotte a rejeté sa demande tendant à la prise en charge des frais de voyage exposés à l'occasion des congés annuels intervenant au titre de la deuxième année d'affectation à Mayotte, pour son partenaire de pacte civil de solidarité ;

2°) de condamner l'Etat à payer la somme de 2 188,05 euros au titre du remboursement du coût du billet d'avion de son partenaire, avec intérêts au taux légal à compter du 29 avril 2004 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le nouveau code de procédure civile ;

Vu la loi n° 99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité ;

Vu le décret n° 98-844 du 22 septembre 1998 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des personnels civils de l'Etat à l'intérieur d'un territoire d'outre-mer, entre la métropole et un territoire d'outre-mer, entre deux territoires d'outre-mer et entre un territoire d'outre-mer et un département d'outre-mer, Mayotte ou la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Bonnot, Rapporteur,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par le garde des sceaux, ministre de la justice :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de justice administrative : Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, le silence gardé pendant plus de deux mois sur une réclamation par l'autorité compétente vaut décision de rejet./ Les intéressés disposent, pour se pourvoir contre cette décision implicite, d'un délai de deux mois à compter du jour de l'expiration de la période mentionnée au premier alinéa. Néanmoins, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient dans ce délai de deux mois, elle fait à nouveau courir le délai du pourvoi. ; qu'aux termes de l'article R. 421-7 du même code : Les délais supplémentaires de distance prévus aux articles 643 et 644 du nouveau code de procédure civile s'ajoutent au délai de deux mois prévus à l'article R. 421-1... ; qu'en vertu de l'article 643 du nouveau code de procédure civile, le délai supplémentaire de distance applicable à un requérant demeurant à Mayotte est de un mois ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, le 9 décembre 2003, M. X, magistrat en poste à Mayotte, a demandé au préfet de Mayotte, au titre de son congé annuel prévu par l'article 41 du décret du 22 septembre 1998, la prise en charge des frais de voyages de son partenaire de pacte civil de solidarité ; que, du silence gardé par l'administration pendant deux mois sur cette demande, une décision implicite de rejet est née le 9 février 2004 que, si le délai dont disposait M. X pour contester cette décision expirait le 10 mai 2004, toutefois, par une décision explicite du 20 avril 2004 notifiée le lendemain, le préfet de Mayotte a rejeté la demande ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, cette décision explicite, intervenue dans le délai de recours, a fait à nouveau courir ce délai ; qu'ainsi, la requête de M. X, enregistrée au Conseil d'Etat le 17 mai 2004, est recevable ;

Considérant, en second lieu, que, dans le dernier état de ses conclusions, M. X précise que sa requête ne tend qu'à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du préfet de Mayotte ; qu'ainsi, sa requête n'avait pas à être précédée d'une demande préalable auprès de l'administration ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

Considérant qu'aux termes des quatrième et cinquième alinéas de l'article 41 du décret du 22 septembre 1998 dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : Les congés annuels intervenant au titre de la deuxième année de séjour d'un agent affecté à Mayotte dans les conditions prévues au décret du 26 novembre 1996 susvisé ouvrent droit à la prise en charge des frais de voyage aller-retour entre son lieu d'affectation et sa résidence habituelle. / Dans tous les cas, sont également pris en charge les frais de voyage du conjoint et des membres de la famille ;

Considérant que le préfet de Mayotte s'est fondé sur ces dispositions pour en refuser l'application au partenaire de pacte civil de solidarité de M. X ;

Considérant d'une part, que si le garde des sceaux, ministre de la justice, soutient que les dispositions relatives au pacte civil de solidarité ne sont entrées en vigueur à Mayotte qu'à compter du 1er juin 2004, soit postérieurement à la date de la demande de M. X, cette circonstance ne saurait avoir d'influence à l'égard des droits et obligations résultant du pacte civil de solidarité que M. X a conclu en métropole le 4 avril 2001 ;

Considérant, d'autre part, que le Gouvernement était tenu de tirer les conséquences réglementaires de la loi du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité dans un délai raisonnable ; qu'à la date de la demande de M. X, le décret du 22 septembre 1998 n'avait pas été modifié en application de la loi et était, dès lors, devenu illégal ; qu'ainsi, le préfet de Mayotte a commis une erreur de droit en opposant ce texte à M. X ; que sa décision doit dès lors, être annulée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. X qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande le garde des sceaux, ministre de la justice au titre des frais exposés par l'Etat et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 500 euros au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du 20 avril 2004, par laquelle le préfet de Mayotte a refusé la prise en charge des frais de voyage du partenaire de pacte civil de solidarité de M. X, est annulée

Article 2 : L'Etat versera la somme de 500 euros à M. X au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par le garde des sceaux, ministre de la justice, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Jacques X et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 6eme et 1ere sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 267636
Date de la décision : 08/07/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COMPÉTENCE - COMPÉTENCE À L'INTÉRIEUR DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - COMPÉTENCE DU CONSEIL D'ETAT EN PREMIER ET DERNIER RESSORT - LITIGES RELATIFS À LA SITUATION INDIVIDUELLE DES FONCTIONNAIRES NOMMÉS PAR DÉCRET DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE - LITIGE PORTANT SUR LA PRISE EN CHARGE - EN APPLICATION DU DÉCRET DU 22 SEPTEMBRE 1998 - DES FRAIS DE VOYAGE DE LA PERSONNE LIÉE AU FONCTIONNAIRE PAR UN PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ (SOL - IMPL - ).

17-05-02-02 Magistrat demandant, en application du décret du 22 septembre 1998, la prise en charge des frais de voyage de la personne liée à lui par un pacte civil de solidarité. Préfet lui opposant un refus. Litige concernant l'application d'un texte à un fonctionnaire à l'occasion de l'exercice des fonctions résultant de son statut et portant donc sur la situation individuelle de ce fonctionnaire nommé par décret. En conséquence, compétence en premier et dernier ressort du Conseil d'Etat.

OUTRE-MER - DROIT APPLICABLE DANS LES COLLECTIVITÉS D'OUTRE-MER ET EN NOUVELLE-CALÉDONIE - DROIT APPLICABLE AUX FONCTIONNAIRES SERVANT OUTRE-MER - CONGÉS ADMINISTRATIFS - AVANTAGES FINANCIERS ATTACHÉS AU CONGÉ ADMINISTRATIF - PRISE EN CHARGE DES FRAIS DE VOYAGE (ART - 41 DU DÉCRET DU 22 SEPTEMBRE 1998) D'UNE PERSONNE LIÉE À UN MAGISTRAT PAR UN PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ - LITIGE PORTANT SUR CETTE PRISE EN CHARGE RELEVANT DE LA COMPÉTENCE EN PREMIER ET DERNIER RESSORT DU CONSEIL D'ETAT (SOL - IMPL - ).

46-01-09-05-02 Magistrat demandant, en application du décret du 22 septembre 1998, la prise en charge des frais de voyage de la personne liée à lui par un pacte civil de solidarité. Préfet lui opposant un refus. Litige concernant l'application d'un texte à un fonctionnaire à l'occasion de l'exercice des fonctions résultant de son statut et portant donc sur la situation individuelle de ce fonctionnaire nommé par décret. En conséquence, compétence en premier et dernier ressort du Conseil d'Etat.


Publications
Proposition de citation : CE, 08 jui. 2005, n° 267636
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Frédéric Bonnot
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:267636.20050708
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