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08/07/2005 | FRANCE | N°262182

France | France, Conseil d'État, 6eme et 1ere sous-sections reunies, 08 juillet 2005, 262182


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 novembre et 5 décembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Xavier X demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 24 septembre 2003 par laquelle le Premier ministre a rejeté sa demande d'abrogation du second alinéa de l'article 52 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir le second alinéa de l'article 52 du décret du 27 novembre 1991 organisant

la profession d'avocat ;

3°) d'enjoindre à l'autorité administrative, sous a...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 novembre et 5 décembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Xavier X demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 24 septembre 2003 par laquelle le Premier ministre a rejeté sa demande d'abrogation du second alinéa de l'article 52 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir le second alinéa de l'article 52 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ;

3°) d'enjoindre à l'autorité administrative, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, d'abroger le second alinéa de l'article 52 du décret du 27 novembre 1991 et le second alinéa de l'article 5 du décret du 2 avril 1980 relatif à la formation des futurs avocats et au certificat d'aptitude à la profession d'avocat (CAPA) ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 89/48/CEE, du Conseil, du 21 décembre 1988 relative à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans ;

Vu la directive 92/51/CEE, du Conseil, du 18 juin 1992 relative à un deuxième système général de reconnaissance des formations professionnelles, qui complète la directive 89/48/CEE ;

Vu la directive 98/5/CE, du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 1998 visant à faciliter l'exercice permanent de la profession d'avocat dans un État membre autre que celui où la qualification a été acquise ;

Vu la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines profession judiciaires et juridiques ;

Vu le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Henrard, Auditeur,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'article 53 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques prévoit que des décrets en Conseil d'État fixent « 1° Les conditions d'accès à la profession d'avocat (…) » ; que le titre II du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, pris pour l'application de cette disposition, régit l'accès à la profession d'avocat et, notamment, l'organisation des centres régionaux de formation professionnelle d'avocats et les conditions d'accès à ces centres ; que l'article 52 du titre II de ce décret dispose : « Pour être admis à se présenter à l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle, les candidats doivent être titulaires d'un des titres ou diplômes prévus à l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971 précitée./ Nul ne peut se présenter plus de trois fois à cet examen » ;

Considérant que, par une décision du 24 septembre 2003, le Premier ministre a opposé un refus à la demande de M. X tendant à l'abrogation du second alinéa de l'article 52 du décret du 27 novembre 1991, qui limite à trois le nombre de candidatures à l'examen d'accès aux centre régionaux de formation professionnelle ; que les conclusions de M. X doivent, compte tenu de ses écritures, être regardées comme dirigées contre ce refus ;

Considérant que M. Serge Lasvignes, directeur au secrétariat général du Gouvernement, disposait d'une délégation prise par arrêté du 6 mai 2002 et publiée au Journal officiel du 7 mai 2002 pour signer, « en cas d'absence ou d'empêchement de M. Jean-Marc Sauvé, secrétaire général du Gouvernement (…), au nom du Premier ministre, tous actes, arrêtés et décisions à l'exclusion des décrets » ; qu'en premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le secrétaire général du Gouvernement n'ait pas été absent ou empêché à la date du 24 septembre 2003 ; qu'en second lieu, le refus de donner suite à une demande d'abrogation d'un décret, qui n'est pas un décret, pouvait être signé par le directeur au secrétariat général du Gouvernement dans le cadre de la délégation de signature consentie par le Premier ministre ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté ;

Considérant que l'autorité compétente, saisie d'une demande tendant à l'abrogation d'un règlement illégal, est tenue d'y déférer, soit que ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature, soit que l'illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date ;

Considérant que les dispositions contestées du décret du 27 novembre 1991 se justifient, notamment, par la volonté de garantir la qualité du recrutement des centres régionaux de formation professionnelle ; que la règle de la limitation à trois du nombre de candidatures ne méconnaît pas le principe d'égalité, dès lors que le critère choisi est objectif et identique pour tous les candidats ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X, la limitation à trois du nombre de candidatures à l'examen d'accès aux centres régionaux de formation professionnelle n'est pas une peine applicable aux crimes et délits au sens de l'article 34 de la Constitution, qui relèverait de la seule compétence du législateur et que le pouvoir réglementaire était, en tout état de cause, compétent pour instituer un tel dispositif ; que le moyen tiré de la méconnaissance du principe constitutionnel d'égal accès à l'instruction n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que le principe de la liberté du commerce et de l'industrie ne saurait être utilement invoqué en l'espèce, dès lors que l'accès à la profession d'avocat est soumis par le législateur à de multiples conditions ;

Considérant que le requérant ne peut utilement invoquer, à l'encontre de la décision attaquée, la méconnaissance, par les dispositions contestées du décret du 27 novembre 1991, des objectifs de la directive 89/48/CEE, du Conseil, du 21 décembre 1988 relative à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans, de la directive 92/51/CEE, du Conseil, du 18 juin 1992 relative à un deuxième système général de reconnaissance des formations professionnelles, qui complète la directive 89/48/CEE et de la directive 98/5/CE, du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 1998 visant à faciliter l'exercice permanent de la profession d'avocat dans un Etat membre autre que celui où la qualification a été acquise, dès lors que ces textes ont pour objet de régir la situation des ressortissants d'un Etat membre qui, déjà membres ou non de la profession d'avocat, veulent l'exercer dans un autre Etat membre ; que le requérant ne peut utilement se prévaloir des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui sont sans rapport avec le litige ;

Considérant que la circonstance, alléguée par le requérant, selon laquelle la règle de la limitation du nombre de candidatures aux examens et concours serait tombée en désuétude dans d'autres secteurs d'activité professionnelle n'est, en tout état de cause, pas de nature à être utilement invoquée à l'encontre de la disposition contestée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision attaquée du 24 septembre 2003 ; que ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Xavier X, au Premier ministre et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 6eme et 1ere sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 262182
Date de la décision : 08/07/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

01-02-05-02 ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS. - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - COMPÉTENCE. - DÉLÉGATIONS, SUPPLÉANCE, INTÉRIM. - DÉLÉGATION DE SIGNATURE. - DÉLÉGATION EXCLUANT LES DÉCRETS DE SON CHAMP D'APPLICATION - POSSIBILITÉ POUR LE DÉLÉGATAIRE DE SIGNER UNE DÉCISION DE REFUS DE DONNER SUITE À UNE DEMANDE D'ABROGATION D'UN DÉCRET - EXISTENCE.

01-02-05-02 Une délégation de signature autorisant le délégataire à signer tous actes, arrêtés et décisions à l'exclusion des décrets autorise son titulaire à signer un refus de donner suite à une demande d'abrogation d'un décret, qui n'est pas un décret.


Publications
Proposition de citation : CE, 08 jui. 2005, n° 262182
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Olivier Henrard
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:262182.20050708
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