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04/07/2005 | FRANCE | N°263434

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 04 juillet 2005, 263434


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 janvier et 12 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE VULCO FRANCE, venant aux droits de la SOCIETE VULCO NORD, dont le siège social est situé à Europole, 27, rue Pierre Semard, BP 506 à Grenoble (38011 Cedex), représentée par son président en exercice ; la SOCIETE VULCO FRANCE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 30 octobre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a annulé, d'une part, le jugement du 9 octobre 2001 du tribu

nal administratif d'Orléans rejetant la demande présentée par M. A ten...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 janvier et 12 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE VULCO FRANCE, venant aux droits de la SOCIETE VULCO NORD, dont le siège social est situé à Europole, 27, rue Pierre Semard, BP 506 à Grenoble (38011 Cedex), représentée par son président en exercice ; la SOCIETE VULCO FRANCE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 30 octobre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a annulé, d'une part, le jugement du 9 octobre 2001 du tribunal administratif d'Orléans rejetant la demande présentée par M. A tendant à l'annulation des décisions des 27 juillet et 12 octobre 1998 de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement de ce dernier et, d'autre part, ces deux décisions ;

2°) statuant comme juge du fond, de rejeter la demande présentée par M. A ;

3°) de mettre à la charge de M. A la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yves Struillou, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Thouin-Palat, avocat de la SOCIETE VULCO FRANCE et de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Anne-Françoise Roul, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 436-1 du code du travail relatif aux conditions de licenciement des membres du comité d'entreprise, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou leur appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation économique de l'entreprise justifie le licenciement du salarié en tenant compte notamment de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié ; que, si la société demanderesse relève d'un groupe dont la société mère a son siège à l'étranger, l'autorité administrative ne peut se borner à prendre en considération la seule situation de la société demanderesse pour apprécier la situation économique mais est tenue de faire porter son appréciation sur l'ensemble des sociétés du groupe oeuvrant dans le même secteur d'activité que la société en cause sans qu'il y ait lieu de limiter cet examen à celles d'entre elles ayant leur siège social en France ni aux établissements de ce groupe situés en France ; que, toutefois, pour apprécier les possibilités de reclassement, l'administration ne doit faire porter son examen que sur les entreprises de ce groupe dont les activités ou l'organisation offrent au salarié concerné la possibilité d'exercer des fonctions comparables ;

Considérant que, pour annuler, par son arrêt du 30 octobre 2003, le jugement du 9 octobre 2001 par lequel le tribunal administratif d'Orléans avait rejeté les conclusions présentées par M. A dirigées contre la décision du 12 octobre 1998 de l'inspecteur du travail autorisant la SOCIETE VULCO NORD à procéder à son licenciement pour motif économique, la cour administrative d'appel de Nantes a jugé que l'employeur avait méconnu son obligation de reclassement faute d'avoir examiné les possibilités de reclassement dans les autres sociétés du groupe auquel appartenait la SOCIETE VULCO NORD ; qu'en s'abstenant ainsi de rechercher si les entreprises relevant du groupe offraient, en raison de leur activité ou de leur organisation, la possibilité au salarié d'exercer des fonctions comparables, la cour administrative d'appel n'a pas légalement motivé son arrêt ; que, dès lors, celui-ci doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, et dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;

Considérant, en premier lieu, que, comme l'a jugé le tribunal administratif d'Orléans par son jugement, qui est suffisamment motivé, la circonstance que l'autorité administrative aurait prorogé le délai d'instruction de quinze jours, fixé par l'article R. 436-4 du code du travail, sans rechercher si les nécessités de l'enquête justifiaient cette prorogation, est sans incidence sur la légalité de la décision de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement de M. A ;

Considérant, en deuxième lieu, que les difficultés économiques alléguées par la SOCIETE VULCO NORD ressortent des pièces du dossier ; que l'administration n'avait pas à faire porter son examen de la situation économique au niveau du groupe, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ce dernier, à la date à laquelle le licenciement de M. A a été autorisé, incluait des sociétés oeuvrant dans le même secteur d'activité économique que la SOCIETE VULCO NORD ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le poste de chef d'atelier occupé par M. A à l'agence de Tours a été supprimé dans le cadre de la réorganisation décidée par son employeur ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le salarié ait été ultérieurement remplacé dans ses fonctions par un autre salarié ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, faute de pouvoir reclasser M. A sur un emploi équivalent au sein de l'établissement de Tours, la société a proposé à l'intéressé un emploi de monteur au sein d'un autre établissement de l'entreprise que ce dernier a refusé ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'employeur ait été en mesure de procéder au reclassement de son salarié dans de meilleures conditions ; que l'employeur, qui soutient sans être utilement contredit par M. A, que, à la date des faits, le groupe VULCO n'incluait pas des sociétés offrant, en raison de leur activité ou de leur organisation, la possibilité au salarié d'exercer des fonctions comparables à celles qu'il occupait précédemment, n'était pas tenu d'examiner les possibilités de reclassement de l'intéressé au niveau du groupe ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'il n'appartient pas à l'autorité administrative de vérifier le respect de l'ordre des licenciements ;

Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la procédure de licenciement ait été en rapport avec les fonctions représentatives exercées par M. A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision autorisant son licenciement ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce soit mise à la charge de la SOCIETE VULCO FRANCE, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. A, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A la somme demandée par la SOCIETE VULCO FRANCE au même titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 30 octobre 2003 de la cour administrative d'appel de Nantes est annulé.

Article 2 : La requête présentée par M. A devant la cour administrative d'appel de Nantes et les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la SOCIETE VULCO FRANCE tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE VULCO FRANCE, à M. Jacques A et au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 04 jui. 2005, n° 263434
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Yves Struillou
Rapporteur public ?: Mme Roul Anne-Françoise
Avocat(s) : SCP THOUIN-PALAT ; SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Date de la décision : 04/07/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 263434
Numéro NOR : CETATEXT000022512858 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-07-04;263434 ?
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