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15/06/2005 | FRANCE | N°256824

France | France, Conseil d'État, 9eme sous-section jugeant seule, 15 juin 2005, 256824


Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. André X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision en date du 13 mars 2003 par laquelle le ministre de la défense a refusé d'inclure dans les bases de liquidation de sa pension la bonification d'ancienneté pour enfants prévue au b) de l'article L. 12 et à l'article R. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

2°) d'enjoindre au ministre de modifier, dans un délai de deux mois, les bases de liquidation de sa

pension en tenant compte de cette bonification, de la revaloriser rétroact...

Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. André X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision en date du 13 mars 2003 par laquelle le ministre de la défense a refusé d'inclure dans les bases de liquidation de sa pension la bonification d'ancienneté pour enfants prévue au b) de l'article L. 12 et à l'article R. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

2°) d'enjoindre au ministre de modifier, dans un délai de deux mois, les bases de liquidation de sa pension en tenant compte de cette bonification, de la revaloriser rétroactivement et de lui verser ces sommes assorties des intérêts au taux légal capitalisés au jour de leur demande ;

3°) subsidiairement, de mettre à la charge de l'Etat la réparation, d'une part, du préjudice résultant pour lui de la privation du supplément de pension auquel il était en droit de prétendre depuis l'entrée en jouissance de sa pension par l'allocation d'un capital, augmentée des intérêts de droit à compter de sa requête gracieuse et de leur capitalisation et, d'autre part, du préjudice résultant de la perte de supplément de pension pour l'avenir jusqu'à l'extinction de sa pension par l'allocation d'une rente ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le Traité de Rome instituant la Communauté économique européenne devenue la Communauté européenne ;

Vu le Traité sur l'Union européenne et les protocoles qui y sont annexés ;

Vu l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le premier protocole additionnel à cette convention, notamment son article 1er ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu la loi n° 2003-775 du 21 août 2003, notamment son article 48 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Julie Burguburu, Auditeur,

- les observations de la SCP Tiffreau, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Laurent Vallée, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions principales de M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : La pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : / A tout moment en cas d'erreur matérielle ; / Dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit ;

Considérant que, pour demander la révision de la pension de retraite qui lui a été concédée, M. X soutient que celle-ci a été liquidée sans qu'il ait été tenu compte des droits que lui ouvraient les dispositions du b) de l'article L. 12 du même code dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites ; que l'erreur invoquée par M. X, qui a consisté à réserver aux femmes fonctionnaires le bénéfice de ces dispositions, résulte d'une mauvaise application des textes en vertu desquels la pension devait être liquidée ; que l'intéressé invoque ainsi une erreur de droit ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que M. X s'est vu concéder une pension militaire de retraite par un arrêté du 13 juillet 1998 dont il a accusé réception le 28 juillet 1998 ; que la circonstance qu'il n'a constaté l'erreur de droit alléguée qu'au vu d'une décision rendue par le Conseil d'Etat, le 29 juillet 2002, dans un litige concernant un autre pensionné est sans incidence sur le point de départ et la durée du délai d'un an prévu par les dispositions précitées de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; qu'ainsi, le délai imparti à M. X pour exciper, au soutien d'une demande de révision de sa pension, de l'erreur de droit qu'aurait commise l'administration en ne prenant pas en compte dans les éléments de liquidation de celle-ci la bonification d'ancienneté mentionnée au b) de l'article L. 12 et à l'article R. 13 du même code, était expiré lorsque le requérant a saisi, le 11 février 2003, le ministre de la défense d'une telle demande ;

Considérant, d'autre part, que la circonstance que, statuant sur une question préjudicielle relative à cette bonification d'ancienneté, la Cour de justice des Communautés européennes a rendu, le 29 novembre 2001, un arrêt interprétant une disposition du droit communautaire sans limiter les effets dans le temps de cet arrêt n'affecte pas le droit d'un Etat membre de la Communauté européenne d'opposer aux demandes de révision de pensions établies en violation de cette disposition un délai de forclusion, dès lors que ce délai, mentionné à l'article L. 55 précité du code des pensions civiles et militaires de retraite, s'applique de la même manière aux demandes de révision de pension qui sont fondées sur le droit communautaire et à celles qui sont fondées sur le droit interne et ne rend pas impossible ou excessivement difficile l'exercice de droits tirés de règles communautaires ; qu'ainsi M. X n'est pas fondé à soutenir que les dispositions précitées de l'article L. 55 seraient contraires au droit communautaire ;

Considérant, enfin, que les dispositions de l'article L. 55 précitées ont pour objet d'ouvrir, aussi bien aux pensionnés qu'à l'administration, un droit à révision des pensions concédées dans le cas où la liquidation de celles-ci est entachée d'une erreur de droit et de prévoir que ce droit est ouvert dans les mêmes conditions de délai aux pensionnés et à l'administration ; que, d'une part, le délai de révision ainsi prévu bénéficie aussi bien aux pensionnés dont les droits à pension sont définitivement acquis au terme de ce délai, qu'à l'administration qui est, postérieurement à l'expiration de ce même délai, mise à l'abri de contestations tardives et que, d'autre part, l'instauration d'un délai d'un an s'avère suffisante pour permettre aux pensionnés de faire valoir utilement leurs droits devant les juridictions ; qu'ainsi ces dispositions ne méconnaissent ni le droit d'accès à un tribunal, ni le droit à un recours effectif, ni les exigences qui s'attachent à la protection d'un droit patrimonial, tels qu'ils découlent des dispositions de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, le ministre de la défense a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions de M. X tendant à l'obtention de la bonification prévue par les dispositions du b) de l'article L. 12 et de l'article R. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite, n'appelle sur ce point aucune mesure d'exécution au sens des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ; que, dès lors, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. X ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions subsidiaires de M. X :

Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, les conclusions de M. X tendant à la revalorisation de sa pension doivent être rejetées ; que les conclusions subsidiaires de M. X tendent à l'obtention d'une indemnité correspondant à la revalorisation qu'il demande de sa pension, en réparation du préjudice que la privation de cette somme constitue pour lui et par le moyen que ce préjudice est imputable au retard apporté par l'Etat français à harmoniser le droit interne avec le principe d'égalité des rémunérations entre fonctionnaires masculins et féminins ; que ces conclusions ont, ainsi, en réalité, le même objet que les conclusions pécuniaires tendant à la revalorisation de sa pension ; que, par suite, ces conclusions sont irrecevables ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. André X, au ministre de la défense et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 15 jui. 2005, n° 256824
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. de Vulpillières
Rapporteur ?: Mme Julie Burguburu
Rapporteur public ?: M. Vallée
Avocat(s) : SCP TIFFREAU

Origine de la décision
Formation : 9eme sous-section jugeant seule
Date de la décision : 15/06/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 256824
Numéro NOR : CETATEXT000008228112 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-06-15;256824 ?
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