Vu la requête, enregistrée le 30 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Pierre X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 1er juillet 2002 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a rejeté sa demande tendant au réexamen des modalités de liquidation de l'indemnité de changement de résidence qui lui a été allouée ;
2°) d'enjoindre à l'administration de réexaminer sa demande ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 98-844 du 22 septembre 1998 modifié fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des personnels civils de l'Etat à l'intérieur d'un territoire d'outre-mer, entre la métropole et un territoire d'outre-mer, entre deux territoires d'outre-mer et entre un territoire d'outre-mer et un département d'outre-mer, la collectivité territoriale de Mayotte ou celle de Saint-Pierre-et-Miquelon ;
Vu l'arrêté du 22 septembre 1998 modifié fixant les montants des indemnités forfaitaires de changement de résidence prévues aux articles 39 et 40 du décret n° 98-844 du 22 septembre 1998 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Guillaume Larrivé, Auditeur,
- les conclusions de Mme Marie-Hélène Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 23 du décret du 22 septembre 1998 modifié fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des personnels civils de l'Etat à l'intérieur d'un territoire d'outre-mer, entre la métropole et un territoire d'outre-mer, entre deux territoires d'outre-mer et entre un territoire d'outre-mer et un département d'outre-mer, la collectivité territoriale de Mayotte ou celle de Saint-Pierre-et-Miquelon : Le changement de résidence est celui que l'agent se trouve dans l'obligation d'effectuer lorsqu'il reçoit une affectation dans une résidence différente de celle dans laquelle il était affecté antérieurement ; que l'article 4 du même décret précise : Pour l'application du présent décret, sont considérés comme : - résidence administrative : le territoire de la commune sur lequel se situe le service où l'agent est affecté. Lorsqu'il est fait mention de la résidence de l'agent, cette résidence est sa résidence administrative ; qu'il est constant que M. X, conseiller au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, bénéficiait, à l'occasion de son affectation comme stagiaire pendant une durée de six mois au tribunal de grande instance de Strasbourg, consécutive à son détachement dans la magistrature judiciaire pour y exercer les fonctions de magistrat du premier grade à compter du 19 février 2002, des dispositions de l'article 40 du décret précité du 22 septembre 1998, selon lesquelles il devait être remboursé de tous les frais autres que les frais de transport de personnes au moyen d'une indemnité forfaitaire de changement de résidence dont le montant est déterminé suivant des modalités fixées par un arrêté conjoint du ministre chargé du budget, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé de l'outre-mer ; que le second alinéa de l'article 38 du même décret précise enfin : La prise en charge des frais de changement de résidence est limitée au parcours compris entre l'ancienne et la nouvelle résidence. La distance prise en compte dans le calcul du montant de l'indemnité forfaitaire de (…) changement de résidence est mesurée d'après l'itinéraire le plus court par la route ou la distance orthodromique ;
Considérant que l'arrêté interministériel du 22 septembre 1998 modifié pris pour l'application du décret précité définit dans son article 2 la formule de calcul de l'indemnité forfaitaire de changement de résidence, fixe dans son article 3 certaines distances orthodromiques et notamment, s'agissant des changements de résidence entre un territoire d'outre-mer et la métropole, la distance entre Paris et Nouméa tout en précisant que lorsque le trajet entre la métropole et un territoire d'outre-mer ou entre deux territoires d'outre-mer comporte un transit obligatoire par un autre lieu, il convient d'additionner entre elles les distances orthodromiques correspondantes ; que son article 4 dispose enfin : Pour les changements de résidence entre deux lieux qui ne sont pas reliés par la route ou entre plusieurs îles d'un même territoire, il y a lieu d'ajouter à l'indemnité déterminée conformément aux dispositions ci ;dessus une indemnité complémentaire dont le taux est fixé ainsi qu'il suit (en euros)… ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, pour le calcul de l'indemnité forfaitaire de changement de résidence, c'est la distance correspondant à la totalité du parcours entre l'ancienne et la nouvelle résidence qui doit être prise en compte ; que si, pour la commodité de ce calcul, l'arrêté précité du 22 septembre 1998 fournit, pour les changements de résidence entre la Nouvelle-Calédonie et la métropole, la distance orthodromique entre Nouméa et Paris, il convient, pour déterminer la distance totale lors des affectations en métropole de fonctionnaires résidant précédemment à Nouméa, d'ajouter à cette distance orthodromique compte tenu du transit nécessaire par Paris, la distance entre Paris et la commune de résidence ; qu'ainsi M. X avait droit à ce que l'indemnité de changement de résidence qui lui était due à l'occasion de son affectation à Strasbourg prenne en compte, outre la distance orthodromique entre Nouméa et Paris, celle correspondant à l'itinéraire le plus court par la route entre Paris et Strasbourg ;
Considérant, en revanche, que l'indemnité complémentaire prévue à l'article 4 précité de l'arrêté du 22 septembre 1998 a seulement pour objet de compenser les frais supplémentaires engendrés par un transport aérien ou maritime à l'intérieur d'un même territoire, en l'absence de liaison routière ; qu'il suit de là que M. X n'avait pas droit au bénéfice de cette indemnité au titre du changement de résidence entre Nouméa et Strasbourg ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à demander l'annulation de la décision en date du 1er juillet 2002 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a rejeté sa demande tendant au réexamen des modalités de liquidation de l'indemnité de changement de résidence qui lui avait été allouée en tant qu'elle a refusé la prise en compte de la distance totale entre Nouméa et Strasbourg et qu'il y a lieu de renvoyer M. X devant le ministre pour être procédé à la liquidation du complément d'indemnité auquel il a droit ;
D E C I D E :
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Article 1er : La décision du garde des sceaux, ministre de la justice en date du 1er juillet 2002, est annulée en tant qu'elle a refusé à M. X la prise en compte de la distance totale entre Nouméa et Strasbourg pour le calcul du montant de son indemnité forfaitaire de changement de résidence.
Article 2 : M. X est renvoyé devant le garde des sceaux, ministre de la justice pour être procédé à la liquidation du complément d'indemnité auquel il a droit.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. X est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Pierre X et au garde des sceaux, ministre de la justice.