Vu la requête, enregistrée le 3 septembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Isabelle X, demeurant ... ; Mme X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 28 juin 2002 portant nomination de magistrats en tant qu'il ne la nomme pas président de chambre hors-hiérarchie ;
2°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice, de proposer sa nomination hors-hiérarchie et au Président de la République de procéder à cette nomination ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa candidature, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
3°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice, de procéder à sa reconstitution de carrière au 1er janvier 2002 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;
Vu le décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Olivier Henrard, Auditeur,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de Mme X,
- les conclusions de M. Francis Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le moyen tiré de ce que la délibération du 29 mai 2002 au cours de laquelle le Conseil supérieur de la magistrature a donné son avis sur les nominations envisagées aurait été entachée d'irrégularités n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 dans la rédaction qui lui a été donnée par la loi organique du 25 juin 2001 : Sont placés hors-hiérarchie : / (...) 3°) Les présidents de chambre des cours d'appel et les avocats généraux près lesdites cours (...) ; que ces dispositions ont pour seul objet, ainsi qu'il résulte d'ailleurs des travaux préparatoires à leur adoption, et pour seul effet de classer hors-hiérarchie les emplois qu'elles mentionnent et non de placer hors-hiérarchie les personnes qui occupent ces emplois ; qu'au demeurant, aux termes de l'article 17 du décret du 7 janvier 1993 qui ne fait que tirer les conséquences de ces dispositions : Si le niveau de l'emploi occupé ou de la fonction exercée par un magistrat est modifié, le magistrat concerné conserve son grade et sa rémunération ; qu'ainsi l'accès à la hors-hiérarchie de chacune des personnes qui occupent les emplois mentionnés à l'article 3 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 est subordonné à l'intervention d'une décision individuelle procédant à une telle nomination ; que ni l'ordonnance du 22 décembre 1958 ni aucun principe n'imposaient au ministre de la justice de nommer hors-hiérarchie l'intéressée alors même qu'elle remplissait les conditions requises pour cette nomination ; qu'ainsi Mme X, qui n'a pas été personnellement placée hors-hiérarchie, ne peut prétendre bénéficier du traitement afférent aux emplois de ce grade ;
Considérant que Mme X soutient que le Conseil supérieur de la magistrature, dont l'avis conforme est requis préalablement à la nomination des magistrats du siège, et le ministre de la justice, qui propose ces nominations au Président de la République, se seraient interdit, par principe, de nommer hors-hiérarchie, sur place, les magistrats qui occupent leur emploi depuis moins de deux ans ou depuis plus de cinq ans, créant ainsi une condition nouvelle d'accès à la hors-hiérarchie non prévue par l'ordonnance du 22 décembre 1958 ; que toutefois Mme X, qui occupait son poste depuis plus de deux ans et moins de cinq ans, ne peut utilement soutenir que ces critères de nomination auraient été illégalement mis en oeuvre par les auteurs du décret attaqué dès lors qu'ils ne sont pas applicables à sa situation ;
Considérant qu'il est loisible au Conseil supérieur de la magistrature et au garde des sceaux de rendre publics les critères qui les guident pour les nominations et les mutations de magistrats, dans le respect du principe d'égalité et compte tenu d'objectifs légitimes tels qu'une plus grande mobilité des personnes concernées ou une meilleure adéquation des profils aux emplois ; que, toutefois, en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires expresses, l'application de ces critères ne saurait en aucun cas conduire à fixer des règles nouvelles ou à écarter le principe selon lequel il revient aux autorités administratives de se livrer à un examen particulier des données propres à chaque dossier ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la situation individuelle de Mme X a été examinée par les auteurs du décret attaqué ; que dès lors, Mme X n'est pas fondée à soutenir que le Conseil supérieur de la magistrature et le ministre de la justice auraient commis une erreur de droit en refusant de la placer hors-hiérarchie ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à demander l'annulation du décret du 28 juin 2002 en tant qu'il ne la nomme pas hors-hiérarchie ; que sa requête doit, dès lors, être rejetée, ainsi que ses conclusions à fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Isabelle X et au garde des sceaux, ministre de la justice.