Vu la requête, enregistrée le 21 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 3 mai 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 25 avril 2002 décidant la reconduite à la frontière de X... Joana Z ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Z devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention relative au droit de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Mary, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Z, ressortissante de la République du Cap-Vert, réside en France depuis 1990 avec son enfant qui y est né en 1996 ; qu'elle a perdu toute attache familiale dans son pays d'origine depuis le décès de sa mère, alors que son oncle et sa tante qui l'hébergent, séjournent régulièrement en France ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, l'arrêté du PREFET DU VAL-D'OISE en date du 25 avril 2002 décidant la reconduite à la frontière de l'intéressée a porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel cet arrêté a été pris, et a méconnu, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté en date du 25 avril 2002 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé ; que le III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dispose que : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas ;
Considérant que la présente décision confirme l'annulation pour excès de pouvoir d'un arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Z et non celle d'une décision refusant de lui délivrer une carte de séjour temporaire ; que, dès lors, elle n'implique pas nécessairement la délivrance d'une carte de séjour temporaire ; qu'en revanche, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée, au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au PREFET DU VAL-D'OISE de se prononcer sur la situation de Mme Z dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme Z et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête du PREFET DU VAL-D'OISE est rejetée.
Article 2 : Le PREFET DU VAL-D'OISE se prononcera sur la situation de Mme Z dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision.
Article 3 : L'Etat versera à Mme Z la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de Mme Z devant le Conseil d'Etat est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-D'OISE, à X... Joana Z et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.