Vu la requête, enregistrée le 2 mai 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE-MARNE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 20 février 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 11 février 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... Y ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. J. Boucher, Auditeur,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y, de nationalité congolaise, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 2 janvier 2003, de la décision du PREFET DU VAL-DE-MARNE du 4 décembre 2002 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;
Considérant que si Mme Y, entrée en France dans le courant de l'année 2000, est mère d'un enfant né le 10 décembre 2002, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions du séjour de l'intéressée sur le territoire national, du caractère récent de sa vie commune avec le père de son enfant, de ce qu'elle n'apporte aucun élément de nature à prouver la perte de ses attaches familiales au Congo, et en l'absence de toute circonstance l'empêchant d'emmener son enfant avec elle, la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été décidée ; que le PREFET DU VAL-DE-MARNE est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler son arrêté du 11 février 2003, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun s'est fondé sur la violation, par cet arrêté, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, toutefois, qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme Y devant le tribunal administratif de Melun ;
Considérant, d'une part, que la circonstance que Mme Y ait demandé au PREFET DU VAL-DE-MARNE de procéder au réexamen de sa situation antérieurement à l'édiction de l'arrêté litigieux est sans influence sur la légalité de cet arrêté ;
Considérant, d'autre part, que le moyen tiré par Mme Y des risques qu'elle encourrait en cas de retour au Congo ne peut utilement être invoqué à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté litigieux, qui ne mentionne pas le pays à destination duquel elle doit être reconduite ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU VAL-DE-MARNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté en date du 11 février 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Y ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 20 février 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme Y devant le tribunal administratif de Melun est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-DE-MARNE, à Mme X... Y et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.