Vu la requête, enregistrée le 31 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET D'EURE-ET-LOIR ; le PREFET D'EURE-ET-LOIR demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 26 février 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 28 janvier 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Messaouda X... épouse Y ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. J. Boucher, Auditeur,
- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de Mme X... épouse Y,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X... épouse Y, de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 2 avril 2002, de la décision du 25 mars 2002 par laquelle le PREFET D'EURE-ET-LOIR a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a invitée à quitter le territoire ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, Mme X... épouse Y, qui avait quitté l'Algérie en raison des menaces qu'elle estimait peser sur ses enfants à la suite d'incidents dont ils avaient été victimes, vivait en France avec ces derniers, âgés de 7 à 17 ans et scolarisés, ainsi qu'avec sa mère malade, à laquelle elle apportait une assistance ; que ses quatre frères séjournaient régulièrement en France ; que, séparée de son mari, elle devait être regardée comme ne conservant plus en Algérie aucune attache familiale ; que, dans ces conditions, l'arrêté attaqué a porté au droit de Mme X... épouse Y au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET D'EURE-ET-LOIR n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 28 janvier 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... épouse Y ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête du PREFET D'EURE-ET-LOIR est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET D'EURE-ET-LOIR, à Mme Messaouda X... épouse Y et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.