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19/03/2003 | FRANCE | N°224370

France | France, Conseil d'État, 8eme et 3eme sous-sections reunies, 19 mars 2003, 224370


Vu, 1°) sous le n° 224370, la requête, enregistrée le 22 août 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Lago X, demeurant chez M. Y, ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler, dans le deuxième alinéa du 3) de la lettre du 10 juillet 1997 adressée par le garde des sceaux, ministre de la justice, au président du bureau d'aide juridictionnelle de Paris, ayant pour objet la recherche d'harmonisation dans l'interprétation de la loi par les bureaux d'aide juridictionnelle, les mots peut sembler de la première phrase, ainsi que la dernièr

e phrase relative à la prise en compte, dans la décision d'octroi de ...

Vu, 1°) sous le n° 224370, la requête, enregistrée le 22 août 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Lago X, demeurant chez M. Y, ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler, dans le deuxième alinéa du 3) de la lettre du 10 juillet 1997 adressée par le garde des sceaux, ministre de la justice, au président du bureau d'aide juridictionnelle de Paris, ayant pour objet la recherche d'harmonisation dans l'interprétation de la loi par les bureaux d'aide juridictionnelle, les mots peut sembler de la première phrase, ainsi que la dernière phrase relative à la prise en compte, dans la décision d'octroi de l'aide juridictionnelle, d'avantages en nature dont bénéficie le demandeur de cette aide du fait de son hébergement chez un tiers ;

2°) d'ordonner au ministre de la justice de produire une nouvelle lettre dans le délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 F (76,22 euros) par jour de retard ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser de la somme de 5 000 F (762,25 euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 2°) sous le n° 225378, la requête, enregistrée le 21 septembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. X... A, demeurant chez M. Moussa Z...
... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler, dans le deuxième alinéa du 3) de la lettre du 10 juillet 1997 adressée par le garde des sceaux, ministre de la justice, au président du bureau d'aide juridictionnelle de Paris, ayant pour objet la recherche d'harmonisation dans l'interprétation de la loi par les bureaux d'aide juridictionnelle, les mots peut sembler de la première phrase ainsi que la dernière phrase, relative à la prise en compte d'avantages en nature dans la décision d'octroi de l'aide juridictionnelle ;

2°) d'ordonner au ministre de la justice de produire une nouvelle lettre dans le délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 F (76,22 euros) par jour de retard ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser de la somme de 500 F (76,22 euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. El Nouchi, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de MM. Y... et A tendent à l'annulation, dans la lettre que le garde des sceaux, ministre de la justice a adressée le 10 juillet 1997 au président du bureau d'aide juridictionnelle de Paris, de deux passages du deuxième alinéa du 3) ainsi rédigé : Dans le cas particulier où le demandeur à l'aide est hébergé de manière habituelle chez des tiers, il peut sembler excessif de tenir compte des ressources des hébergeants. Cette pratique reviendrait à rattacher les hébergeants au foyer du requérant, qui précisément en est dépourvu. Les bureaux d'aide juridictionnelle doivent cependant apprécier la réalité de la situation financière du demandeur, au regard notamment des éléments extérieurs de son train de vie (article 5 de la loi du 10 juillet 1991). Aussi peuvent-ils être amenés à fonder leur décision sur la prise en compte des avantages en nature résultant de l'usage d'un logement, de la fourniture de repas gratuits et d'une manière générale de toute aide matérielle dont bénéficie le requérant du fait de son hébergement chez un tiers ; qu'il y a lieu de joindre ces requêtes pour statuer par une seule décision ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation des mots peut sembler de la première phrase de l'alinéa litigieux :

Considérant que le juge administratif, lorsqu'il est saisi de conclusions tendant à l'annulation partielle d'un acte dont les dispositions forment un ensemble indivisible, est tenu de rejeter ces conclusions quelle que soit, au demeurant, la nature des moyens susceptibles d'être invoqués à l'encontre de la décision attaquée ; qu'en l'espèce, les mots peut sembler dont l'annulation est demandée présentent un caractère indivisible du reste de l'alinéa litigieux, et en particulier de la phrase suivante auxquels ils se rattachent directement ; que, par suite, les conclusions tendant à leur annulation sont irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la dernière phrase de l'alinéa litigieux :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des requêtes :

Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 10 juillet 1991 : (...) sont prises en considération les ressources de toute nature dont le demandeur a directement ou indirectement la jouissance ou la libre disposition. Il est tenu compte des éléments extérieurs du train de vie (...) Il est encore tenu compte, dans l'appréciation des ressources, de celles du conjoint du demandeur de l'aide juridictionnelle, ainsi que de celles des personnes vivant habituellement à son foyer (...) ; qu'aux termes de l'article 35 du décret du 19 décembre 1991 pris pour son application : La déclaration des ressources (...) contient : / 1° L'indication de la situation familiale et professionnelle du requérant ; / 2° L'énumération complète et détaillée des ressources de toute nature dont le requérant a eu directement ou indirectement la jouissance ou la libre disposition au cours de la dernière année civile (...) ainsi que des ressources de son conjoint et, le cas échéant, de celles des autres personnes vivant habituellement à son foyer et de celles des personnes éventuellement à charge ; (...) / 4° Les éléments extérieurs de son train de vie (...) ;

Considérant que saisi d'une demande d'interprétation de l'alinéa 3 de l'article 5 de la loi du 10 juillet 1991 par le président du bureau d'aide juridictionnelle de Paris, le garde des sceaux, ministre de la justice a pu, sans excéder ses compétences, rappeler qu'en vertu des dispositions précitées, les avantages en nature dont peuvent bénéficier les demandeurs du fait d'un hébergement habituel chez des tiers doivent être pris en compte dans l'appréciation de leur situation financière ; qu'en énumérant ces avantages en nature, il n'a pas méconnu le sens et la portée de l'article 5 de la loi du 10 juillet 1991, lequel vise la prise en compte des ressources de toute nature dont le demandeur a directement ou indirectement la jouissance ou la libre disposition, ces ressources devant être distinguées des revenus des hébergeants qui ne sauraient être pris en compte dans l'appréciation de la situation financière du demandeur ; que cette interprétation ne méconnaît pas davantage la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment ses articles 6, 8 et 14 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de la dernière phrase du deuxième alinéa du 3) de la lettre du 10 juillet 1997 du garde des sceaux, ministre de la justice ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions à fin d'annulation des requêtes, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions susanalysées ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer aux requérants la somme que ceux-ci demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes de MM. Y... et A sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Lago X, à M. X... A et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 8eme et 3eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 224370
Date de la décision : 19/03/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - RÈGLES GÉNÉRALES DE PROCÉDURE - AIDE JURIDICTIONNELLE - NOTE DU GARDE DES SCEAUX PRÉVOYANT LA PRISE EN COMPTE DES AVANTAGES EN NATURE RÉSULTANT DE L'HÉBERGEMENT CHEZ DES TIERS DANS L'APPRÉCIATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE DU DEMANDEUR - LÉGALITÉ - EXISTENCE [RJ1].

37-03 Saisi d'une demande d'interprétation de l'alinéa 3 de l'article 5 de la loi du 10 juillet 1991 par le président du bureau d'aide juridictionnelle de Paris, le garde des sceaux, ministre de la justice, a pu, sans excéder ses compétences, rappeler qu'en vertu des dispositions de cet article et de l'article 35 du décret du 19 décembre 1991 pris pour son application, les avantages en nature dont peuvent bénéficier les demandeurs de l'aide juridictionnelle du fait d'un hébergement habituel chez des tiers doivent être pris en compte dans l'appréciation de leur situation financière. En énumérant ces avantages en nature, il n'a pas méconnu le sens et la portée de l'article 5 de la loi du 10 juillet 1991, lequel vise la prise en compte des ressources de toute nature dont le demandeur a directement ou indirectement la jouissance ou la libre disposition, ces ressources devant être distinguées des revenus des hébergeants qui ne sauraient être pris en compte dans l'appréciation de la situation financière du demandeur.

PROCÉDURE - JUGEMENTS - FRAIS ET DÉPENS - AIDE JUDICIAIRE - NOTE DU GARDE DES SCEAUX PRÉVOYANT LA PRISE EN COMPTE DES AVANTAGES EN NATURE RÉSULTANT DE L'HÉBERGEMENT CHEZ DES TIERS DANS L'APPRÉCIATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE DU DEMANDEUR - LÉGALITÉ - EXISTENCE [RJ1].

54-06-05-09 Saisi d'une demande d'interprétation de l'alinéa 3 de l'article 5 de la loi du 10 juillet 1991 par le président du bureau d'aide juridictionnelle de Paris, le garde des sceaux, ministre de la justice, a pu, sans excéder ses compétences, rappeler qu'en vertu des dispositions de cet article et de l'article 35 du décret du 19 décembre 1991 pris pour son application, les avantages en nature dont peuvent bénéficier les demandeurs de l'aide juridictionnelle du fait d'un hébergement habituel chez des tiers doivent être pris en compte dans l'appréciation de leur situation financière. En énumérant ces avantages en nature, il n'a pas méconnu le sens et la portée de l'article 5 de la loi du 10 juillet 1991, lequel vise la prise en compte des ressources de toute nature dont le demandeur a directement ou indirectement la jouissance ou la libre disposition, ces ressources devant être distinguées des revenus des hébergeants qui ne sauraient être pris en compte dans l'appréciation de la situation financière du demandeur.


Références :

[RJ1]

Comp. 31 mai 2000, Traoré et Diatta, n° 195626 et 207366, à mentionner aux Tables.


Publications
Proposition de citation : CE, 19 mar. 2003, n° 224370
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: M. Marc El Nouchi
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:224370.20030319
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