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10/03/2003 | FRANCE | N°226662

France | France, Conseil d'État, 9eme et 10eme sous-sections reunies, 10 mars 2003, 226662


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 octobre 2000 et 27 février 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE, dont le siège est Place de l'Eglise à Mane (04300), représentée par son président en exercice ; la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt en date du 21 juillet 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 27 juin 1997 par lequel le tribunal administra

tif de Marseille a, d'une part, annulé la délibération du consei...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 octobre 2000 et 27 février 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE, dont le siège est Place de l'Eglise à Mane (04300), représentée par son président en exercice ; la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt en date du 21 juillet 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 27 juin 1997 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, annulé la délibération du conseil de la communauté du 29 mars 1996 relative au vote des taux des taxes foncières, de la taxe d'habitation et de la taxe professionnelle pour 1996 en tant que le taux de la taxe professionnelle de la zone d'activités économiques adopté était supérieur au taux maximum autorisé, d'autre part, rejeté ses conclusions aux fins d'indemnisation par l'Etat ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Ménéménis, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE,

- les conclusions de M. Vallée, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1636 B sexies du code général des impôts : I. 1. Sous réserve des dispositions des articles 1636 B septies et 1636 B decies les conseils régionaux autres que celui de la région d'Ile-de-France, les conseils généraux, les conseils municipaux et les instances délibérantes des organismes de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre votent chaque année les taux des taxes foncières, de la taxe d'habitation et de la taxe professionnelle. Ils peuvent : a) Soit faire varier dans une même proportion les taux des quatre taxes appliqués l'année précédente ; b) Soit faire varier librement entre eux les taux des quatre taxes. Dans ce cas, le taux de taxe professionnelle : - ne peut, par rapport à l'année précédente, être augmenté dans une proportion supérieure à l'augmentation du taux de la taxe d'habitation ou, si elle est moins élevée, à celle du taux moyen de la taxe d'habitation et des taxes foncières, pondéré par l'importance relative des bases de ces trois taxes pour l'année d'imposition ; - ou doit être diminué, par rapport à l'année précédente, dans une proportion au moins égale, soit à la diminution du taux de la taxe d'habitation ou à celle du taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des taxes foncières, soit à la plus importante de ces diminutions lorsque ces deux taux sont en baisse ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'en application des dispositions précitées, la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE a, par une délibération en date du 1er avril 1995, fixé le taux de la taxe professionnelle en zone d'activités économiques à 21 % pour l'année 1995 ; que, par la délibération litigieuse du 29 mars 1996, elle a fixé le taux de cette même taxe à 20,35 % pour l'année 1996 ;

Considérant qu'après avoir censuré le motif retenu par le tribunal administratif de Marseille pour annuler, sur déféré du préfet des Alpes de Haute-Provence, les dispositions susmentionnées de la délibération du 29 mars 1996, la cour administrative d'appel de Marseille se trouvait nécessairement saisie, par l'effet dévolutif de l'appel, des moyens en défense présentés devant le tribunal administratif par la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE ; que celle-ci soulevait notamment un moyen tiré de ce que, la délibération en date du 1er avril 1995 n'ayant pas été attaquée dans le délai du recours contentieux, le préfet ne pouvait exciper de l'illégalité dont il la prétendait entachée pour soutenir que la délibération litigieuse du 29 mars 1996 était elle-même illégale ; qu'omettant de répondre à ce moyen, qui n'était pas inopérant, l'arrêt du 21 juillet 2000 est entaché d'irrégularité ; que la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE est, par suite, fondée à en demander l'annulation ;

Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

En ce qui concerne la délibération du 29 mars 1996 :

Sur la régularité du jugement du tribunal administratif de Marseille du 27 juin 1997 :

Considérant qu'il résulte des termes mêmes du dispositif du jugement du 27 juin 1997 que le tribunal administratif de Marseille a annulé la délibération du 29 mars 1996 en tant seulement qu'elle concernait le taux de la taxe professionnelle en zone d'activités économiques ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu'il aurait, en annulant la totalité de cette délibération, statué au-delà des conclusions dont il était saisi par le déféré du préfet des Alpes de Haute-Provence doit être écarté ;

Sur la légalité de la délibération du 29 mars 1996 :

Considérant qu'aux termes de l'article 1639 A du code général des impôts : I. Sous réserve des dispositions de l'article 1639 A bis, les collectivités locales et organismes compétents font connaître aux services fiscaux, avant le 31 mars de chaque année, les décisions relatives soit aux taux, soit aux produits, selon le cas, des impositions directes perçues à leur profit. Toutefois, lorsque la communication aux collectivités locales des informations indispensables à l'établissement de leur budget, telle qu'elle est prévue aux articles L. 232-2 et L. 232-3 du code des juridictions financières, n'intervient pas avant le 15 mars, la notification aux services fiscaux s'effectue dans un délai de quinze jours à compter de la communication de ces informations. (...) A défaut, les impositions peuvent être recouvrées selon les décisions de l'année précédente ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE n'a reçu communication des informations indispensables à l'établissement de son budget pour l'année 1995 que le 25 mars 1995 ; que, dès lors, en faisant connaître aux services fiscaux le 7 avril 1995 le taux de la taxe professionnelle pour l'année 1995 en zone d'activités économiques, elle n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article 1639 A du code général des impôts qui lui permettaient de procéder à cette notification dans un délai de quinze jours à compter du 25 mars 1995 ; qu'ainsi, c'est en tout état de cause à tort que le tribunal administratif de Marseille, d'une part, s'est fondé sur une telle méconnaissance pour juger que, pour voter le taux de taxe professionnelle applicable en 1996 en zone d'activités économiques, la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE aurait dû appliquer un coefficient de variation non au taux retenu par la délibération du 7 avril 1995 pour l'année 1995 mais au taux décidé pour 1994, que l'administration avait cru pouvoir appliquer, en vertu du dernier alinéa du I de l'article 1639 A du code général des impôts, pour procéder au recouvrement de la taxe en 1995, d'autre part, en a déduit que la délibération du 29 mars 1996 était illégale ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le préfet des Alpes de Haute-Provence devant le tribunal administratif de Marseille ;

Considérant que le préfet n'était pas recevable à exciper de l'illégalité dont était selon lui entachée la délibération du 1er avril 1995 du fait d'une méconnaissance des dispositions de l'article 1636 B sexies du code général des impôts pour demander l'annulation de la délibération du 29 mars 1996, dès lors que cette dernière n'était pas une mesure d'application de la délibération du 1er avril 1995 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er de son jugement du 27 juin 1997, le tribunal administratif de Marseille a annulé sa délibération du 29 mars 1996 ;

En ce qui concerne les conclusions reconventionnelles de la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE :

Considérant que la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE a saisi le tribunal administratif de Marseille, en réponse au déféré du préfet des Alpes de Haute-Provence, de conclusions reconventionnelles tendant à ce que soit réparé le préjudice qui serait résulté pour elle de l'application par l'administration, pour le recouvrement de la taxe professionnelle en zone d'activités économiques, de taux différents de ceux qu'elle avait votés et de la prise en compte de tels taux pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement à laquelle elle avait droit ; que de telles conclusions, qui soulevaient un litige distinct de celui dont le tribunal administratif de Marseille était saisi à titre principal étaient irrecevables et ne pouvaient, en tout état de cause, qu'être rejetées ; qu'il suit de là que la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par l'article 2 du jugement du 27 juin 1997, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions reconventionnelles ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 21 juillet 2000 est annulé.

Article 2 : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Marseille du 27 juin 1997 est annulé.

Article 3 : Le déféré du préfet des Alpes de Haute-Provence devant le tribunal administratif de Marseille est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera à la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus de la requête de la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE devant la cour administrative d'appel de Marseille et les conclusions reconventionnelles présentées par elle devant le tribunal administratif de Marseille sont rejetés.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE HAUTE-PROVENCE et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 9eme et 10eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 226662
Date de la décision : 10/03/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - DÉLIBÉRATION FIXANT LE TAUX APPLICABLE POUR UNE ANNÉE - MESURE D'APPLICATION DE LA DÉLIBÉRATION FIXANT LE TAUX APPLICABLE L'ANNÉE PRÉCÉDENTE - ABSENCE.

19-03-04 Le préfet n'est pas recevable à exciper de l'illégalité dont est selon lui entachée la délibération par laquelle une collectivité locale ou une structure intercommunale à fiscalité propre fixe, en application des dispositions de l'article 1636 B sexies du code général des impôts, le taux de la taxe professionnelle en zone d'activités économiques pour une année pour demander l'annulation de la délibération fixant ce taux pour l'année suivante, dès lors que cette seconde délibération n'est pas une mesure d'application de la première.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GÉNÉRALES - MOYENS - EXCEPTION D'ILLÉGALITÉ - IRRECEVABILITÉ - DÉLIBÉRATION FIXANT LE TAUX DE TAXE PROFESSIONNELLE APPLICABLE POUR UNE ANNÉE - MOYEN TIRÉ DE L'ILLÉGALITÉ DE LA DÉLIBÉRATION FIXANT LE TAUX APPLICABLE L'ANNÉE PRÉCÉDENTE.

54-07-01-04-04-01 Le préfet n'est pas recevable à exciper de l'illégalité dont est selon lui entachée la délibération par laquelle une collectivité locale ou une structure intercommunale à fiscalité propre fixe, en application des dispositions de l'article 1636 B sexies du code général des impôts, le taux de la taxe professionnelle en zone d'activités économiques pour une année pour demander l'annulation de la délibération fixant ce taux pour l'année suivante, dès lors que cette seconde délibération n'est pas une mesure d'application de la première.


Références :



Publications
Proposition de citation : CE, 10 mar. 2003, n° 226662
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: M. Alain Ménéménis
Rapporteur public ?: M. Vallée
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:226662.20030310
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