Vu la requête, enregistrée au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat le 25 mai 1999, présentée pour le SYNDICAT GENERAL DE L'EDUCATION NATIONALE (SGEN)-CFDT, dont le siège est ..., représenté par son secrétaire national en exercice ; le SGEN-CFDT demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par l'administration pendant plus de quatre mois par le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, le ministre délégué à la ville et le secrétaire d'Etat chargé du budget, sur la demande qu'il leur a adressée le 27 novembre 1998 et tendant à ce que soit pris l'arrêté prévu au 2° de l'article 1er du décret n° 95-313 du 21 mars 1995 relatif au droit de mutation prioritaire et au droit à l'avantage spécifique d'ancienneté accordés à certains agents de l'Etat affectés dans les quartiers urbains particulièrement difficiles ;
2°) prescrive à l'Etat de prendre ledit arrêté, sous astreinte de 5000 F par jour de retard ;
3°) condamne l'Etat à lui verser la somme de 15 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 modifiée et notamment son article 11 ;
Vu le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 ;
Vu le décret n° 2001-48 du 16 janvier 2001 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Vialettes, auditeur,
- les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges Thouvenin, avocat du SGEN-CFDT,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions à fin de non-lieu du ministre de l'éducation nationale :
Considérant que le SGEN-CFDT demande l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par l'autorité administrative pendant plus de quatre mois sur la demande qu'il lui a adressée le 27 novembre 1998 et tendant à ce que soit pris l'arrêté prévu au 2° de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 relatif au droit de mutation prioritaire et au droit à l'avantage spécifique d'ancienneté accordés à certains agents de l'Etat affectés dans les quartiers urbains particulièrement difficiles ; que la publication de l'arrêté du 16 janvier 2001 fixant la liste des écoles et des établissements d'enseignement prévue au 2° de l'article 1er dudit décret au Journal officiel de la République française daté du 18 janvier 2001 n'a pas eu pour effet de priver la requête de son objet ; que, par suite, les conclusions susanalysées ne sauraient être accueillies ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 modifiée portant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " les fonctionnaires de l'Etat et les militaires de la gendarmerie affectés pendant une durée fixée par décret en Conseil d'Etat dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, ont droit, pour le calcul de l'ancienneté requise au titre de l'avancement d'échelon, à un avantage spécifique d'ancienneté dans les conditions fixées par ce même décret " ; que l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 modifiée portant diverses dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat prévoit que " l'autorité compétente procède aux mouvements de fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires (.). Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée (.) aux fonctionnaires qui exercent leurs fonctions pendant une durée et selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles " ; qu'enfin, aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 21 mars 1995 modifié : " Les quartiers urbains où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles (.) doivent correspondre : / 2° En ce qui concerne les fonctionnaires relevant du ministre chargé de l'éducation nationale, à des écoles et établissements d'enseignement désignés par arrêté conjoint du ministre chargé de l'éducation, du ministre chargé de la ville, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget " ;
Considérant que l'application au profit des fonctionnaires relevant du ministre chargé de l'éducation nationale de ces dispositions législatives et réglementaires est subordonnée à l'intervention de l'arrêté interministériel prévu par le 2° de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 ; que pour en assurer la mise en oeuvre, les ministre intéressés étaient tenus de prendre dans un délai raisonnable l'arrêté interministériel qu'elles appellent ; qu'à supposer même que l'élaboration de cet arrêté ait présenté des difficultés particulières, ce délai était dépassé à la date de la décision implicite attaquée ; que, dès lors, le SGEN-CFDT est fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite par laquelle ces ministres ont rejeté sa demande tendant à ce que soit pris cet arrêté ;
Sur les conclusions tendant à la prescription de mesures d'exécution de la présente décision :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6-1 de la loi du 16 juillet 1980 modifiée repris à l'article L.911-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'il règle un litige au fond par une décision qui implique nécessairement une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le Conseil d'Etat, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure et peut assortir sa décision d'une astreinte à compter d'une date qu'il détermine " ; que l'arrêté du 16 janvier 2001 a fixé la liste des écoles et des établissements d'enseignement prévue au 2° de l'article 1er du décret susvisé du 21 mars 1995 ; que par suite, il n'y a pas lieu pour le Conseil d'Etat de faire application de ces dispositions ;
Sur les conclusions du SGEN-CFDT tendant au remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer au SGEN-CFDT la somme de 15 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La décision implicite par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, le ministre délégué à la ville et le secrétaire d'Etat chargé du budget ont rejeté la demande adressée le 27 novembre 1998 tendant à ce que soit pris l'arrêté prévu au 2° de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 est annulée.
Article 2 : Les conclusions du SGEN-CFDT tendant à l'application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : L'Etat versera au SGEN-CFDT une somme de 15 000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au SGEN-CFDT, au ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, au ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, au ministre délégué à la ville et au ministre de l'économie, des finances, et de l'industrie.