Vu la requête, enregistrée le 26 août 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Aymeric de X..., demeurant ... ;
M. de X... demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret du 17 août 1998 en tant qu'il autorise M. Bernard Y... et M. Arnaud Y... à substituer à leur nom celui de "de Y..." ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le décret n° 94-52 du 20 janvier 1994 relatif à la procédure de changement de nom ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 97-1177 du 24 décembre 1997 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Mary, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de M. Aymeric de X...,
- les conclusions de M. Honorat, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions du garde des sceaux, ministre de la justice tendant à ce que le Conseil d'Etat donne acte du désistement de la requête de M. de X... :
Considérant que, dans sa requête introductive d'instance enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 26 octobre 1998, M. de X... n'a pas annoncé la production d'un mémoire complémentaire ; que, par suite, il ne saurait être réputé s'être désisté de sa requête, à défaut de production d'un tel mémoire dans le délai de quatre mois prévu par l'article 53-3 du décret susvisé du 30 juillet 1963 ;
Sur l'opposition formée par M. de X... :
Considérant que si la requête de M. de X..., dirigée contre le décret du 17 août 1998 en tant qu'il autorise M. Bernard Y... et M. Arnaud Y... à substituer à leur nom celui de "de Y...", et enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 26 août 1998, a été présentée sans le ministère d'un avocat au Conseil d'Etat, contrairement aux dispositions de l'article 41 de l'ordonnance du 31 juillet 1945, le vice de forme dont cette requête se trouvait entachée, a été régularisé par la production d'un nouveau mémoire signé d'un avocat au Conseil d'Etat et présenté au nom de M. de X... ; que, par suite, le garde des sceaux, ministre de la justice, qui ne saurait utilement se prévaloir de ce que cette régularisation est intervenue après l'expiration du délai d'opposition ouvert par l'article 61-1 du code civil, n'est pas fondé à soutenir que la requête est irrecevable ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Bernard Y... et M. Arnaud Y... ont demandé à porter le nom de "de Y..." sous lequel leur famille, et notamment certains de leurs ascendants qui furent artistes peintres, serait connue depuis plusieurs générations ; que, toutefois, la notoriété alléguée de ce nom n'est pas de nature à lui conférer l'illustration qui aurait donné un intérêt légitime à leur demande de changement de nom ; que, par ailleurs, les éléments de possession acquisitive de ce nom qu'ils invoquent, sont insuffisants pour donner un intérêt légitime à leur demande ; qu'il résulte de ce qui précède que M. de X... est fondé à demander l'annulation du décret du 17 août 1998 en tant qu'il autorise M. Bernard Y... et M. Arnaud Y... à changer leur nom en "de Y...";
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-1 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner M. Bernard Y... et M. Arnaud Y... à payer à M. de X... la somme de 10.000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le décret du 17 août 1998 en tant qu'il autorise M. Bernard Y... et M. Arnaud Y... à substituer à leur nom celui de "de Y...", est annulé.
Article 2 : M. Bernard Y... et M. Arnaud Y... paieront conjointement à M. Aymeric de X... la somme globale de 10.000 F au titre de l'article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Aymeric de X..., à M. Bernard Y..., à M. Arnaud Y... et au garde des sceaux, ministre de la justice.