Vu la requête enregistrée le 21 septembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la FEDERATION JUSTICE CFDT dont le siège social est situé ... (75019) ; la FEDERATION JUSTICE CFDT demande l'annulation pour excès de pouvoir de la circulaire du 22 juillet 1998 traitant des mutations et réintégrations des fonctionnaires des services judiciaires de catégorie A, B, C ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 92-413 du 30 avril 1992 ;
Vu le décret n° 92-414 du 30 avril 1992 ;
Vu le décret n° 92-415 du 30 avril 1992 ;
Vu le décret n° 94-1016 du 18 novembre 1994 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fougier, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la FEDERATION JUSTICE CFDT demande l'annulation pour excès de pouvoir de certaines dispositions de la circulaire en date du 22 juillet 1998 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a défini les règles applicables à la gestion des emplois et aux procédures d'affectation et de mutation des agents des services judiciaires ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le garde des sceaux, ministre de la justice :
Considérant que le Syndicat justice CFDTqui regroupe douze syndicats régionaux dont les personnels sont concernés par la circulaire attaquée justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour ester en justice au titre de la défense des intérêts professionnels de ces personnels ; qu'ainsi, le garde des sceaux, ministre de la justice n'est pas fondé à contester la qualité pour agir du syndicat requérant ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation des dispositions relatives à la gestion des emplois de greffiers et de greffiers en chef et à la limitation du nombre de candidatures :
Considérant qu'en décidant par la circulaire du 22 juillet 1998 d'opérer un classement fonctionnel des postes vacants offerts aux greffiers et aux greffiers en chef lors des mouvements annuels de ces fonctionnaires, en prescrivant pour certains postes, en raison de leur spécificité, l'établissement de profils d'emploi à l'effet d'améliorer pour les greffiers en chef, candidats à une mutation, la connaissance des emplois déclarés vacants et des qualifications qu'ils nécessitent et, en outre, en instituant l'obligation pour les agents candidats à une affectation sur des postes ayant fait l'objet d'un profil d'emploi, d'avoir avec les responsables des juridictions ou les chefs de service concernés un entretien préalable permettant à ces responsables d'émettre un avis sur les candidats déclarés et de compléter, ainsi, l'information de la commission administrative compétente, le ministre de la justice n'a pas édicté de règles statutaires ; qu'il s'est borné à prendre des dispositions qui entrent dans le champ des mesures qu'il est habilité à prendre en qualité de chef de service ; que le syndicat requérant n'est donc pas fondé à soutenir qu'elles seraient entachées d'incompétence ;
Considérant qu'il en va pareillement des dispositions de la circulaire qui limitent à cinq le nombre des emplois qu'un fonctionnaire candidat à une mutation pourrait solliciter au titre de sa demande ;
Sur les autres dispositions de la circulaire et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués :
En ce qui concerne l'institution d'une durée minimale de services effectifs avant mutation :
Considérant que le garde des sceaux, ministre de la justice, signataire de la circulaire du 22 juillet 1998, a entendu instituer, ainsi que cela ressort expressément de la correspondance adressée aux premiers présidents et aux procureurs généraux à laquelle la circulaire est annexée, une durée minimum d'affectation des agents, différenciée selon les catégories sans réserver la possibilité d'examen des situations particulières ; que le ministre de la justice a ainsi édicté une disposition de caractère statutaire qu'il n'était pas compétent pour prendre ; que la FEDERATION JUSTICE CFDT est par suite fondée à en demander l'annulation ;
En ce qui concerne les dispositions relatives au rapprochement des conjoints :
Considérant qu'en précisant dans la circulaire du 22 juillet 1998, au titre du développement consacré aux motifs des demandes de mutation, que la séparation est constituée lorsque au jour de la commission paritaire, les résidences professionnelles des époux ou concubins sont distantes d'au moins quarante kilomètres, le ministre de la justice a fixé une norme de caractère statutaire qu'il n'avait pas compétence pour édicter ; que la fédération requérante est, également, fondée à en demander l'annulation ;
Article 1er : Sont annulés :
- Dans la lettre du garde des sceaux, ministre de la justice, du 22 juillet 1998 aux premiers présidents et aux procureurs généraux dans le paragraphe intitulé "concilier le désir de mobilité des agents avec la nécessité d'une durée minimum d'affectation", l'alinéa ainsi rédigé : "A cette fin, il est institué une durée minimum d'affectation des agents, différenciée selon les catégories".
- Dans la circulaire annexée à la correspondance du 22 juillet 1998 à la rubrique 3- les demandes de mutation, le paragraphe intitulé " les agents ayant effectué une durée minimum de services effectifs" ainsi que le paragraphe intitulé "dispositions particulières relatives à la durée d'affectation" et à la rubrique 4- les motifs de la demande, l'alinéa ainsi rédigé : "Ainsi, la séparation est constituée lorsque, au jour de la commission paritaire, les résidences professionnelles des époux ou concubins sont distantes l'une de l'autre d'au moins 40 kms".
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la FEDERATION JUSTICE CFDT est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION JUSTICE CFDT et au garde des sceaux, ministre de la justice.