Vu la requête, enregistrée le 10 avril 1995 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMUNE D'HEYRIEUX (38540), représentée par son maire en exercice, autorisé par délibération du conseil municipal du 31 mars 1995 ; la COMMUNE D'HEYRIEUX demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 95-149 du 6 février 1995 relatif à la prime d'aménagement du territoire, en tant que ce décret l'inclut dans la liste des cantons et communes énumérés à l'annexe III délimitant les zones visées à l'article 3 dudit décret, dont les entreprises sont susceptibles de bénéficier de la prime d'aménagement du territoire au titre de leurs programmes de délocalisation d'activités ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Mitjavile, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Seban, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la COMMUNE D'HEYRIEUX demande l'annulation du décret susvisé du 6 février 1995 relatif à la prime d'aménagement du territoire, en tant que ce décret l'inclut dans la liste des cantons et communes énumérés à l'annexe III délimitant les zones visées à l'article 3 dudit décret, dont les entreprises qui y sont implantées sont susceptibles de bénéficier de la prime d'aménagement du territoire au titre de leurs programmes de délocalisation d'activités ;
Considérant que le Premier ministre a pu légalement, sans méconnaître le principe de libre administration des collectivités territoriales, et sans excéder sa compétence au regard de celle du législateur qui, par l'article 42 de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire susvisée du 4 février 1995, a renvoyé au pouvoir réglementaire la délimitation des zones prioritaires de développement économique qu'il avait définies, déterminer par décret les zones prioritaires dans lesquelles pourrait être octroyée la prime d'aménagement du territoire ainsi que les zones exclues du bénéfice de cette prime et dans lesquelles les entreprises sont susceptibles de bénéficier d'une telle prime au titre de leurs programmes de délocalisation d'activités ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du pouvoir réglementaire doit être écarté ;
Considérant que les dispositions attaquées, quelle que soit leur incidence budgétaire éventuelle pour les collectivités locales, ne sont pas au nombre des "dispositions réglementaires à caractère financier concernant les collectivités locales" au sens de l'article L. 234-21 du code des communes applicable à la date du décret attaqué ; que, par suite, le décret attaqué n'est pas entaché d'irrégularité du fait qu'il n'a pas été précédé de la consultation du comité des finances locales nécessaire pour de telles dispositions ;
Considérant que si la commune requérante soutient que le décret serait illégal au motif qu'aucun organisme représentant les collectivités territoriales n'a été associé à son élaboration alors que l'article 1er de la loi d'orientation susvisée du 4 février 1995 prévoit que la politique d'aménagement est conduite par l'Etat en association avec les collectivités territoriales, le législateur n'a édicté en application de ces dispositions aucune obligation de consultation ou de concertation préalable ;
Considérant enfin que la commune requérante soutient qu'en incluant dans les zones visées à l'article 3 du décret du 9 mai 1995 une commune qui appartient à l'agglomération lyonnaise mais dont la situation économique, caractérisée notamment par son potentiel fiscal par habitant et par son taux de chômage, ne se distingue pas de celle d'autres communes de l'agglomération lyonnaise non visées par cette mesure, le Premier ministre a méconnu le principe d'égalité devant la loi et commis une erreur manifeste d'appréciation et qu'un tel choix, ne reposant sur aucune justification, est entaché de détournement de pouvoir ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que la délimitation de la zone de l'agglomération lyonnaise inscrite à l'annexe III du décret du 9 mai 1995, repose sur le critère de la proximité de Lyon et de la facilité d'accès à cette ville, et sur le critère de la situation économique des communes et qui inclut, en Isère, toutes les communes situées à 20 km de Lyon à l'exception des communes de moins de 2 000 habitants, de la commune de Valencin qui allait atteindre ce seuil et des communes dont le taux de chômage dépassait 10 % au recensement de 1990, ainsi que des deux communes de Janneyrias et de Satolas-et-Bonce compte tenu de l'implantation de l'aéroport de Satolas ; que, dans ces conditions, la décision attaquée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ni d'une méconnaissance du principe d'égalité ; que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE D'HEYRIEUX n'est pas fondée à demander l'annulation du décret attaqué en tant qu'il l'inscrit à l'annexe III au nombre des communes visées par les dispositions de l'article 3 du même décret ;
Article 1er : La requête de la COMMUNE D'HEYRIEUX est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE D'HEYRIEUX, au Premier ministre, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, au ministre de l'intérieur et au ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.