Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 26 juin et 26 octobre 1995, présentés pour M. Abdelkrim X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 1er juin 1994 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 19 octobre 1993 refusant de lui délivrer un titre de séjour ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 15 000 F en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels publié par le décret n° 81-77 du 29 janvier 1981 ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Errera, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Boré, Xavier, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Honorat, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité externe de l'arrêté attaqué :
Considérant que l'arrêté attaqué du préfet du Rhône en date du 19 octobre 1993 refusant d'accorder à M. X... un certificat de résidence, après avoir visé l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et son premier avenant ainsi que la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, mentionne que la situation du requérant a fait l'objet d'un nouvel examen à la suite de l'annulation, par un jugement du 13 janvier 1993 du tribunal administratif de Lyon, de l'arrêté du 19 février 1992 ordonnant sa reconduite à la frontière, relève qu'il ne remplit aucune des conditions permettant la délivrance d'un certificat de résidence et précise que l'examen de sa situation personnelle ne permet pas de l'autoriser, à titre exceptionnel, à se maintenir en France ; que l'arrêté attaqué est ainsi suffisamment motivé au regard des prescriptions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant que l'arrêté attaqué a été signé, pour le préfet du Rhône, par le directeur de la réglementation qui avait reçu une délégation régulière de la signature du préfet en vertu d'un arrêté préfectoral du 5 janvier 1993 régulièrement publié ;
Considérant que, selon le deuxième alinéa de l'article 18 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée, la commission du séjour des étrangers est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser la délivrance d'une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15 ou à l'article 25 (1° à 6°) de l'ordonnance ; que M. X... ne se trouvant dans aucun des cas ainsi prévus, l'arrêté attaqué a pu être régulièrement pris sans consultation préalable de la commission ;
Sur la légalité interne de l'arrêté attaqué :
Considérant que la demande de M. X..., dirigée contre l'arrêté du 19 février 1992 décidant qu'il serait reconduit à la frontière, n'avait pas le même objet que sa demande d'annulation de l'arrêté du 19 octobre 1993 refusant de lui délivrer un certificat de résidence ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir qu'en rejetant, par le jugement attaqué, cette dernière demande, le tribunal administratif de Lyon aurait méconnu l'autorité de chose jugée qui s'attache au jugement du 13 janvier 1993 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal a annulé l'arrêté de reconduite du 19 février 1992 ;
Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 6 du pacte international relatifaux droits économiques, sociaux et culturels publié par le décret du 29 janvier 1981 : "Les Etats parties au présent pacte reconnaissent le droit au travail, qui comprend le droit qu'a toute personne d'obtenir la possibilité de gagner sa vie par un travail librement choisi ou accepté, et prendront des mesures appropriées pour sauvegarder ce droit" ; qu'eu égard à leur contenu, ces stipulations ne produisent pas d'effet direct dans l'ordre juridique interne ; qu'ainsi, le requérant ne peut se prévaloir utilement de leur méconnaissance ;
Considérant que si M. X... fait valoir que son père, sa belle-mère et ses frères et soeurs résident en France et que, depuis le décès de sa grand-mère, il n'a plus en Algérie d'attaches familiales, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision attaquée méconnaisse les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives au droit au respect de la vie familiale, eu égard à la circonstance que l'intéressé n'est entré pour la première fois en France qu'en 1981, à l'âge de 21 ans et qu'il a, depuis, effectué en Algérie, où résident sa mère et un de ses fils, plusieurs longs séjours, dont l'un de cinq ans ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Lyon du 1er juin 1994 rejetant sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 19 octobre 1993 refusant de lui délivrer un certificat de résidence ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à ce que l'Etat lui verse la somme de 15 000 F en application des dispositions de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 susvisée font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Abdelkrim X... et au ministre de l'intérieur.