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28/06/1999 | FRANCE | N°182136

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 28 juin 1999, 182136


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 septembre 1996 et 2 janvier 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Denise X..., demeurant ..., au Puy (43000) ; Mme X... demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 26 septembre 1995 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, sur le recours du ministre de l'intérieur, annulé le jugement du 26 janvier 1995 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand annulant l'arrêté du préfet de la Haute-Loire du 22 mars 1994 qui l'a placée en congé de longue durée pour six mo

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 septembre 1996 et 2 janvier 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Denise X..., demeurant ..., au Puy (43000) ; Mme X... demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 26 septembre 1995 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, sur le recours du ministre de l'intérieur, annulé le jugement du 26 janvier 1995 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand annulant l'arrêté du préfet de la Haute-Loire du 22 mars 1994 qui l'a placée en congé de longue durée pour six mois à compter du 15 mars 1994, avec demi-traitement, et rejeté la demande d'annulation de cet arrêté qu'elle avait présentée devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Pochard, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Bouthors, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable en l'espèce : "Le fonctionnaire en activité a droit : ( ...) 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse ou poliomyélite, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement ( ...)" ; que l'article 31 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 précise que, "lorsqu'un fonctionnaire a bénéficié d'un congé de longue durée au titre de l'une des affections énumérées à l'article 29 ci-dessus, tout congé accordé par la suite pour la même affection est un congé de longue durée, dont la durée s'ajoute à celle du congé déjà attribué" et que, "si le fonctionnaire contracte une autre affection ouvrant droit à congé de longue durée, il a droit à l'intégralité d'un nouveau congé de longue durée, accordé dans les conditions prévues à l'article 29 ci-dessus" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme X..., adjoint administratif à la préfecture de la Haute-Loire, qui avait bénéficié pour l'une des affections mentionnées au 4°, précité, de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, d'un congé de longue durée de trois ans à plein traitement du 15 septembre 1985 au 15 septembre 1988, a été, pour une maladie contractée en 1994, de nouveau placée en position de congé de longue durée, pour une période de six mois à compter du 15 mars 1994, par arrêté du préfet de la Haute-Loire du 22 mars 1994 ;
Considérant que la loi n° 79-588 du 11 juillet 1979, qui dispose, en son article 1er, que les décisions administratives individuelles défavorables doivent être motivées et range au nombre de ces décisions celles qui refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir, précise, en son article 3, que la motivation exigée "doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de fait et de droit qui constituent le fondement de la décision" ; que, pour juger suffisamment motivé l'arrêté du 22 mars 1994 du préfet de la Haute-Loire qui n'a assorti le nouveau congé de longue durée accordé à Mme X... que du droit à un demi-traitement, la cour administrative d'appel de Lyon a relevé qu'il visait les textes législatifs et réglementaires applicables et qu'il indiquait la chronologie des diverses mesures déjà intervenues en ce qui concerne la situation administrative de l'intéressée ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si l'arrêté du préfet comportait l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituaient le fondement de la décision prise par lui de ne pas faire droit à la demande de Mme X..., en tant que celle-ci avait sollicité l'octroi d'un congé avec plein traitement, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, Mme X... est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11, deuxième alinéa, de la loi du 31 décembre 1987, de régler l'affaire au fond ;

Considérant que le fonctionnaire qui a contracté l'une des affections mentionnées à l'article 34-4°, précité, de la loi du 11 janvier 1984, en raison de laquelle il a bénéficié d'un congé de longue durée, ne peut avoir droit à l'intégralité d'un nouveau congé de longue durée que si la maladie dont il se prévaut pour bénéficier de ce nouveau congé relève d'une autre catégorie d'affection que celle qui lui avait ouvert droit au premier congé ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, même si elle s'est manifestée de façon différente, la maladie contractée par Mme X... en 1994 relevait de la même catégorie d'affections que celle en raison de laquelle un premier congé de longue durée lui avait été accordé, avec plein traitement, du 15 septembre 1985 au 15 septembre 1988 ; qu'ainsi, en imputant les trois années de ce congé antérieur sur le nouveau congé de longue durée qu'il lui a accordé pour six mois, à compter du 15 mars 1994, et en n'assortissant ce dernier que d'un droit à demi-traitement, le préfet de la Haute-Loire n'a pas fait, par son arrêté du 22 mars 1994, une inexacte application des dispositions législatives et réglementaires ci-dessus rappelées ; que, par suite, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler cet arrêté, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand s'est fondé sur ce que la maladie contractée par l'intéressée, en 1994, devait être regardée comme constituant une affection distincte, ouvrant droit à un nouveau congé de longue durée à plein traitement ;
Considérant qu'il appartient, toutefois, au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par Mme X... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
Considérant que l'arrêté du préfet de la Haute-Loire du 22 mars 1994 se borne à faire état, dans ses visas, des textes statutaires applicables à la situation de Mme X... et à énumérer les six arrêtés qui, de 1985 à 1988, l'avaient placée et successivement maintenue, en position de congé de longue durée ; que, ne comportant pas ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision prise de n'accorder à Mme X... le congé de longue durée qu'elle avait sollicité qu'en l'assortissant du droit à un demi-traitement, cet arrêté ne satisfait pas aux prescriptions de l'article 3, précité, de la loi du 11 juillet 1979 ; que le ministre de l'intérieur n'est donc pas fondé à se plaindre de ce que, par son jugement du 26 janvier 1995, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a, dans la limite ci-dessus rappelée, annulé ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, de condamner l'Etat à payer à Mme X... la somme qu'elle avait demandée devant la cour administrative d'appel de Lyon, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 26 septembre 1995 est annulé.
Article 2 : Le recours présenté par le ministre de l'intérieur devant la cour administrative d'appel de Lyon est rejeté.
Article 3 : L'Etat paiera à Mme X... une somme de 8 000 F, au titre de l'article 75-Ide la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Denise X..., au préfet de la Haute-Loire et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 182136
Date de la décision : 28/06/1999
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

- RJ1 ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCEDURE - QUESTIONS GENERALES - MOTIVATION - MOTIVATION OBLIGATOIRE - MOTIVATION OBLIGATOIRE EN VERTU DES ARTICLES 1 ET 2 DE LA LOI DU 11 JUILLET 1979 - DECISION REFUSANT UN AVANTAGE DONT L'ATTRIBUTION CONSTITUE UN DROIT - Décision accordant à un fonctionnaire le bénéfice d'un congé de longue durée assorti seulement du droit à demi-traitement (1).

01-03-01-02-01-01-04, 36-05-04-02 L'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 relative à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction alors applicable, prévoyait que, pour certaines affections, le fonctionnaire en activité avait droit à un congé de longue durée de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. La décision par laquelle l'autorité administrative accorde à un fonctionnaire qui a sollicité l'octroi d'un congé avec plein traitement le bénéfice d'un tel congé mais assorti seulement du droit à un demi-traitement est au nombre des décisions administratives individuelles défavorables qui refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir. En vertu de la loi du 11 juillet 1979, cette décision doit être motivée.

- RJ1 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - POSITIONS - CONGES - CONGES DE LONGUE DUREE - Décision octroyant le congé assorti seulement du droit à demi-traitement - Motivation obligatoire - Existence (1).


Références :

Décret 86-442 du 14 mars 1986 art. 31
Loi 79-588 du 11 juillet 1979 art. 1, art. 3
Loi 84-16 du 11 janvier 1984 art. 34
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75

1. Comp. pour une décision accordant un permis de construire assorti de prescriptions spéciales, 1996-06-17, S.A.R.L. Scierie du Ternois et autres, T. p. 681 ;

pour une décision accordant une autorisation d'émettre assortie d'une puissance que le titulaire estime insuffisante, 1991-03-20, Association Foyer rural du Valois Multien, T. p. 666 ;

ou encore pour une autorisation d'émettre consentie pour une durée inférieure à la durée maximale prévue par la loi, 1996-06-26, Association "Radio Alpes Info", p. 244


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 1999, n° 182136
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Groux
Rapporteur ?: M. Pochard
Rapporteur public ?: M. Stahl

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:182136.19990628
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