Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 juillet 1996 et 26 novembre 1996 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS", dont le siège est ..., agissant par son liquidateur Me X..., et le SCIENTOLOGY INTERNATIONAL RESERVES TRUST, dont le siège est à East Grinstead en Angleterre ; les requérants demandent au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite née du silence gardé pendant plus de quatre mois par le Premier ministre sur leur demande du 29 janvier 1996 tendant à l'abrogation des articles 11 ter et 11 quater du décret n° 89-938 du 29 décembre 1989 réglementant les relations financières avec l'étranger ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité en date du 25 mars 1957 modifié, instituant la communauté économique européenne ;
Vu la loi n° 66-1008 du 28 décembre 1966 modifiée réglementant les relations financières avec l'étranger ;
Vu la loi n° 96-109 du 14 février 1996 relative aux relations financières avec l'étranger en ce qui concerne les investissements étrangers en France ;
Vu le décret n° 89-938 du 29 décembre 1989 modifié ;
Vu le décret n° 96-117 du 14 février 1996 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Gounin, Auditeur,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" et de SCIENTOLOGY INTERNATIONAL RESERVES TRUST, et de la SCP Ancel, Couturier-Heller, avocat du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie,
- les conclusions de Mme Daussun, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" et le SCIENTOLOGY INTERNATIONAL RESERVES TRUST ont demandé le 1er février 1996 au Premier ministre d'abroger les articles 11 ter et 11 quater du décret du 29 décembre 1989 modifié ; que si le décret du 14 février 1996 a abrogé ces articles, le régime d'autorisation préalable qu'ils définissaient a été maintenu aux articles 11 bis et 12 du décret du 29 décembre 1989, tel qu'il a été modifié par le décret du 14 février 1996 susmentionné ; que, par suite, la décision implicite résultant du silence gardé par le Premier ministre sur la demande du 1er février 1996 doit être regardée comme refusant d'abroger les articles 11 bis et 12 du décret du 29 décembre 1989 dans leur rédaction issue du décret du 14 février 1996 ; que les associations requérantes ont intérêt à contester pour excès de pouvoir cette décision de refus devant le Conseil d'Etat ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant que les associations requérantes invoquent à l'encontre de la décision qu'elles contestent la méconnaissance des stipulations des articles 73 B à 73 G du traité de Rome modifié ; que la réponse à ce moyen est subordonnée à la question de savoir si ces stipulations, selon lesquelles l'interdiction de toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre Etats membres ne porte pas atteinte au droit qu'ont les Etats membres "de prendre des mesures justifiées par des motifs liés à l'ordre public ou à la sécurité publique", permettent à un Etat membre, en dérogation au régime de totale liberté ou de déclaration applicable aux investissements étrangers sur son territoire, de prévoir un régime d'autorisation préalable pour les seuls investissements de nature à mettre en cause l'ordre public, la santé publique ou la sécurité publique, étant précisé que cette autorisation est réputée acquise un mois après la réception de la déclaration d'investissement présentée au ministre, sauf si celui-ci a, dans le même délai, prononcé l'ajournement de l'opération concernée ; que cette question soulève une contestation sérieuse ; que, par suite, il y a lieu, en application de l'article 177 du traité du 25 mars 1957 de surseoir à statuer sur la requête de l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" et du SCIENTOLOGY INTERNATIONAL RESERVES TRUST jusqu'à ce que la Cour de justice des communautés européennes se soit prononcée sur cette question ;
Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS" jusqu'à ce que la Cour de justice des communautés européennes se soit prononcée sur la question de savoir si les stipulations de l'article 73 D du traité du 25 mars 1957 modifié instituant la communauté européenne, selon lesquelles l'interdiction de toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre Etats membres ne porte pas atteinte au droit qu'ont les Etats membres "de prendre des mesures justifiées par des motifs liés à l'ordre public ou à la sécurité publique", permettent à un Etat membre, en dérogation au régime de totale liberté ou de déclaration applicable aux investissements étrangers sur son territoire, de maintenir un régime d'autorisation préalable pour les investissements de nature à mettre en cause l'ordre public, la santé publique ou la sécurité publique, étant précisé que cette autorisation est réputée acquise un mois après la réception de la déclaration d'investissement présentée au ministre, sauf si celui-ci a, dans le même délai, prononcé l'ajournement de l'opération concernée. La question posée dans les motifs de la présente décision, laquelle est relative à l'interprétation des stipulations de l'article 73 B à 73 G du traité de Rome, est renvoyée à la Cour de justice des communautés européennes.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION "EGLISE DE SCIENTOLOGIE DE PARIS", au SCIENTOLOGY INTERNATIONAL RESERVES TRUST, au président de la Cour de justice des communautés européennes, au Premier ministre, au ministre des affaires étrangères et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.