Vu 1°/, sous le n° 182644, la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 25 septembre 1996 et 24 janvier 1997, présentés pour la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE (F.S.U.) dont le siège est 3 et ..., représentée par son secrétaire général en exercice ; la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE demande que le Conseil d'Etat annule le décret n° 96-658 du 24 juillet 1996 modifiant l'article 3 du décret n° 82-450 du 28 mai 1982 relatif au Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat ;
Vu 2°/, sous le n° 183499, la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 6 novembre 1996 et 5 mars 1997, présentés pour la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE (F.S.U.) ; la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE demande que le Conseil d'Etat annule le décret du 6 septembre 1996 publié au Journal officiel de la République française du 7 septembre 1996 portant nominations au Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 82-450 du 28 mai 1982 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Marchand, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Ryziger, Bouzidi, avocat de FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE et de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de l'Union des Fédérations CFDT des fonctions publiques et assimilées.
- les conclusions de M. Girardot, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les deux requêtes susvisées présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur l'intervention de l'Union des fédérations CFDT des fonctions publiques et assimilées :
Considérant que l'Union des fédérations CFDT des fonctions publiques et assimilées a intérêt au maintien des décrets attaqués ; qu'ainsi son intervention est recevable ;
Sur la légalité du décret du 24 juillet 1996 :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 13 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : "Le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat comprend en nombre égal des représentants de l'administration et des représentants des organisations syndicales de fonctionnaires. Il est présidé par le Premier ministre qui veille à l'application de la présente loi ..." ; qu'aux termes de l'article 17 de la même loi : "Un décret en Conseil d'Etat détermine, en application des articles 9 et 23 du titre 1er du statut général, la compétence, la composition, l'organisation et le fonctionnement des organismes consultatifs visés aux articles 13, 14, 15 et 16 ci-dessus, ainsi que les modalités de désignation de leurs membres" ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 133-2 du code du travail : "La représentativité des organisations syndicales est déterminée d'après les critères suivants : - les effectifs ; - l'indépendance ; - les cotisations ; - l'expérience et l'ancienneté du syndicat ; - l'attitude patriotique pendant l'occupation" ; que le décret attaqué dispose en son article 2 : "Le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat est composé de quarante membres nommés par décret dont vingt sur proposition des organisations syndicales de fonctionnaires de l'Etat les plus représentatives et vingt en qualité de représentants de l'administration. Les sièges attribués aux organisations syndicales sont répartis entre elles comme suit : 1° - un siège pour chaque organisation dont la représentativité s'étend à un nombre important de ministères et de professions exercées par des fonctionnaires de l'Etat ..." 2° Lesautres sièges à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne des voix obtenues pour chaque organisation syndicale lors des dernières élections intervenues, trois mois au moins avant la fin du mandat des membres du Conseil supérieur, pour la désignation des représentants ; que ledit décret énonce ainsi des critères précis permettant d'apprécier la représentation desdites organisations ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu'il aurait prévu une subdélégation illégale ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'en prévoyant, pour l'attribution d'un siège au Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat à chacune des organisations syndicales les plus représentatives, de retenir les critères d'interministérialité et d'interprofessionnalité, l'article 1er du décret attaqué a pour seul objet de permettre la prise en compte des effectifs des organisations syndicales dans différents secteurs d'activités professionnelles au sein de la fonction publique afin de déterminer leur représentativité au niveau du Conseil supérieur, organe consultatif dont la mission est notamment, aux termes de l'article 13 de la loi du 11 janvier 1984, de connaître : " ... de toute question d'ordre général concernant la fonction publique de l'Etat dont il est saisi soit par le Premier ministre, soit à la demande écrite du tiers de ses membres ..." ; que les critères d'interministérialité et d'interprofessionnalité ainsi retenus ne sont, eu égard à la mission dévolue au Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, entachés d'aucune erreur de droit ;
Considérant, en troisième lieu, qu'en prévoyant la répartition des autres sièges à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne des voix obtenues par chaque organisation syndicale lors des dernières élections intervenues trois mois au moins avant la fin du mandat des membres du Conseil supérieur pour la désignation des représentants du personnel aux commissions administratives paritaires, le décret attaqué n'a ni pour objet, ni pour effet d'interdire la prise en compte des résultats des élections professionnelles auxquelles sont appelés à participer les agents des corps non dotés de commissions administratives paritaires ;
Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE n'est pas fondée à demander l'annulation du décret du 24 juillet 1996 attaqué ;
Sur la légalité du décret du 6 septembre 1996 :
Considérant, en premier lieu, que le décret du 6 septembre 1996 portant nomination au Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat ne saurait être annulé par voie de conséquence de l'annulation du décret du 24 juillet 1996 qui, ainsi qu'il vient de l'être dit, n'est pas entaché d'illégalité ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des termes mêmes de l'article 17 précité de la loi du 11 janvier 1984 que le législateur a voulu que seules les modalités de désignation des membres du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat soient déterminées par décret en Conseil d'Etat ; qu'il incombait donc au gouvernement de nommer par un second décret les membres du Conseil supérieur conformément aux critères fixés par le décret déterminant les modalités de désignation au nombre desquels figuraient les notions d'organisations syndicales les plus représentatives et d'interprofessionnalité ; que la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE n'est donc pas fondée à soutenir que le décret du 6 septembre 1996 est entaché d'incompétence en tant qu'il n'a pas été pris en Conseil d'Etat ;
Considérant, en troisième lieu, que le gouvernement n'a pas commis d'erreurmanifeste d'appréciation en estimant que la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE n'était pas présente dans un nombre important de ministères et de professions ;
Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE n'est pas fondée à demander l'annulation du décret du 6 septembre 1996 ;
Sur les conclusions de la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE la somme de 15 000 F en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Article 1er : L'intervention de l'Union des fédérations CFDT des fonctions publiques et assimilées est admise.
Article 2 : Les requêtes n° 182644 et 183499 de la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION SYNDICALE UNITAIRE, à l'Union des fédérations CFDT des fonctions publiques et assimilées, au Premier ministre et au ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.