Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juin 1993 et 7 octobre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société anonyme Carrefour, dont le siège est ... ; la société anonyme Carrefour demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 5 avril 1993 de la cour administrative d'appel de Lyon, en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa requête dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Marseille du 22 décembre 1989, rejetant sa demande en décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Vitrolles, au titre de l'année 1985 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'article 21 de la loi n° 88-1193 du 29 décembre 1988 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Monod, avocat de la société anonyme Carrefour,
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;
En ce qui concerne la régularité de la décision d'homologation du rôle :
Considérant qu'aux termes du III de l'article 21 de la loi de finances rectificative pour 1988, n° 88-1193 du 29 décembre 1988 : "Les rôles homologués avant la publication de la présente loi et jusqu'au 1er mars 1989 par un fonctionnaire de la direction générale des impôts ayant au moins le grade de directeur divisionnaire sont réputés régulièrement homologués" ; qu'ayant relevé que le rôle, mis en recouvrement le 31 octobre 1985, par la voie duquel la société anonyme Carrefour a été assujettie à la taxe professionnelle au titre de l'année 1985 dans la commune de Vitrolles (Bouches-du-Rhône), avait été signé par un fonctionnaire ayant au moins le grade de directeur divisionnaire des impôts, la cour administrative d'appel de Lyon en a à bon droit déduit, abstraction faite d'un motif surabondant, qu'il devait être réputé avoir été régulièrement homologué par application des dispositions précitées ; que, eu égard à l'objet de ces dernières, qui a été de valider, à la date même à laquelle elles ont été prises, les décisions de mise en recouvrement de la nature de celle qui est contestée par la société anonyme Carrefour, le moyen tiré par celle-ci de ce que la Cour aurait dû rechercher si, à la date de publication de la loi de finances rectificative pour 1988, le délai, prévu par l'article L. 174 du livre des procédures fiscales, dans lequel les omissions ou les erreurs concernant la taxe professionnelle peuvent être réparées par l'administration, était ou non expiré, est inopérant ;
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'exigeait que la décision d'homologation du rôle de la taxe professionnelle mise à la charge de la société anonyme Carrefour comportât les visas de la loi de finances autorisant la perception des impôts directs pour l'année 1985, de la délibération du conseil municipal de Vitrolles ayant fixé les taux des contributions directes locales pour la même année et de l'arrêté du préfet portant délégation au directeur des services fiscaux du pouvoir de rendre les rôles exécutoires ; qu'ainsi, le moyen tiré par la société anonyme Carrefour de l'absence de ces visas était, lui aussi et en tout état de cause, inopérant ; qu'il y a lieu de l'écarter par ce motif, substitué à celui qui a été retenu par l'arrêt attaqué, dont il justifie légalement, sur ce point, le dispositif ;
En ce qui concerne la régularité de la fixation par le conseil municipal de Vitrolles du taux de la part communale de la taxe professionnelle pour 1985 :
Considérant qu'en vertu de l'article 1639 A du code général des impôts, les décisions des collectivités locales relatives aux taux des impositions directes perçues à leur profit doivent être prises avant le 31 mars de chaque année ; que les articles 1636 B sexiès et 1636 B septiès du même code précisent les limites dans lesquelles les conseils régionaux, les conseils généraux et les conseils municipaux peuvent fixer et faire varier chaque année les taux respectifs des taxes foncières sur les propriétés bâties et sur les propriétés non bâties, de la taxe d'habitation et de la taxe professionnelle ; que les contribuables assujettis à ces taxes peuvent en demander la décharge ou la réduction en se prévalant des vices de la procédure d'adoption des délibérationsqui en ont fixé le taux pour l'année concernée ou de l'illégalité de celles-ci au regard des dispositions précitées ; qu'ils ne peuvent, en revanche, utilement invoquer, aux mêmes fins, le fait que les délibérations distinctes, par lesquelles l'assemblée de la collectivité locale au profit de laquelle l'imposition contestée est perçue a voté, pour la même année, son budget, auraient méconnu les règles de calendrier, de procédure ou de fond en conformité desquelles celui-ci doit être adopté, en recettes et en dépenses ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour contester la régularité de la fixation par le conseil municipal de Vitrolles du taux de la part communale de la taxe professionnelle pour l'année 1985, la société anonyme Carrefour s'est bornée, sans mettre en cause la légalité ou la régularité du vote de la délibération adoptée à cette fin le 21 février 1985, à faire valoir que les crédits inscrits tant dans le projet de budget primitif de la commune, arrêté par une délibération distincte du même jour, que dans le projet modifié de la section d'investissement de ce budget, adopté par une délibération du 25 avril 1985, auraient été votés en bloc et non chapitre par chapitre ainsi que l'exigeaient les dispositions, alors applicables, de l'article L. 212-2 du code des communes, que, contrairement aux dispositions, alors applicables, de l'article 8 de la loi du 2 mars 1982, le budget primitif approuvé le 21 février 1985 n'aurait pas été voté en équilibre réel du fait que des dépenses et des recettes nouvelles y auraient été ajoutées par la délibération du 25 avril 1985, et que, cette dernière ayant été votée après la date du 31 mars avant laquelle, aux termes de l'article 7 de la même loi, le budget de la commune devait être en son entier adopté, celui-ci serait entaché d'une rétroactivité illégale ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les irrégularités ainsi alléguées n'étaient, en tout état de cause, pas de nature à affecter la légalité de la délibération du conseil municipal de Vitrolles du 21 février 1985 qui a notamment fixé le taux de la part communale de la taxe professionnelle pour l'année 1985 ; qu'ainsi, les moyens soulevés par la société anonyme Carrefour devant la cour administrative d'appel au soutien de sa contestation de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Vitrolles au titre de l'année 1985, étaient inopérants ; qu'il y a lieu de les écarter pour ce motif, susbtitué à celui qui a été retenu par l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel, dont il justifie légalement, sur ce point aussi, le dispositif ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, en la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société anonyme Carrefour la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la société anonyme Carrefour est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société anonyme Carrefour et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.