Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 19 septembre 1994 et 18 janvier 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le centre communal d'action sociale de la Rochelle, dont le siège est ... (17022) ; le centre communal d'action sociale de la Rochelle demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision du 21 juin 1994 par laquelle la commission centrale d'aide sociale a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 novembre 1993 par laquelle la commission départementale d'aide sociale de la Charente-Maritime a refusé la prise en charge par l'aide sociale des repas en foyer-restaurant de Mlle X... ;
2°) condamne le département à lui verser la somme de 10 000 F en application de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de la famille et de l'aide sociale, ensemble le décret n° 54-883 du 2 septembre 1954 modifié et notamment son article 15 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lévy, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du centre communal d'action sociale de la Rochelle,
- les conclusions de Mme Daussun, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi :
Considérant qu'aux termes de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue ... publiquement ... par un tribunal ... qui décidera ... des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil ... Le jugement doit être rendu publiquement ..." ;
Considérant que la décision attaquée, par laquelle la commission centrale d'aide sociale, saisie par la voie de l'appel, a statué sur le refus de prise en charge des repas de Mlle X... au foyer-restaurant pour personnes âgées géré par le centre communal d'action sociale de la Rochelle, a le caractère d'une décision juridictionnelle qui, relative à une prestation d'aide sociale, tranche une contestation sur des droits et obligations de caractère civil au sens des stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il ne ressort pas des mentions de la décision attaquée de la commission centrale d'aide sociale que cette juridiction ait siégé en séance publique et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que cette formalité n'a pas été respectée ; que le centre communal d'action sociale de la Rochelle est dès lors fondé à soutenir que la commission centrale d'aide sociale a statué selon une procédure irrégulière et à demander, pour ce motif, l'annulation de la décision attaquée ;
Sur les conclusions relatives à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du centre communal d'action sociale de la Rochelle tendant à l'application de ces dispositions ;
Article 1er : La décision, en date du 21 juin 1994, de la commission centrale d'aide sociale est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la commission centrale d'aide sociale.
Article 3 : Le surplus des conclusions du centre communal d'action sociale de la Rochelle est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au centre communal d'action sociale de la Rochelle, à Mlle X..., au département de la Charente-Maritime, au ministre de l'emploi et de la solidarité et au président de la commission centrale d'aide sociale.