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14/01/1998 | FRANCE | N°186453

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 14 janvier 1998, 186453


Vu la requête, enregistrée le 25 mars 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNE D'HEM, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE D'HEM demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 21 février 1997 par laquelle le tribunal administratif de Lille a autorisé M. X... à déposer plainte avec constitution de partie civile aux lieu et place de la COMMUNE D'HEM, à l'encontre de l'association "Carrefour des emplois intermédiaires" et de ses dirigeants pour "faux en écriture, abus de confiance et gestion de fait de deniers publ

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2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le ...

Vu la requête, enregistrée le 25 mars 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNE D'HEM, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE D'HEM demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 21 février 1997 par laquelle le tribunal administratif de Lille a autorisé M. X... à déposer plainte avec constitution de partie civile aux lieu et place de la COMMUNE D'HEM, à l'encontre de l'association "Carrefour des emplois intermédiaires" et de ses dirigeants pour "faux en écriture, abus de confiance et gestion de fait de deniers publics" ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Lille ;
3°) de condamner M. X... à lui verser une somme de 17 000 F au titre de l'article 75-I de la loi n° 91-347 du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales, notamment son article L. 2132-5 ;
Vu le code des communes, deuxième partie ;
Vu le code des juridictions financières, notamment ses articles L. 211-1, L. 211-4 et L. 211-8 ;
Vu le décret n° 95-945 du 23 août 1995 relatif aux chambres régionales des comptes ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Prada Bordenave, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Roue-Villeneuve, avocat du maire de la COMMUNE D'HEM et de la SCP Monod, avocat de M. Alain X...,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2132-5 du code général des collectivités territoriales : "Tout contribuable inscrit au rôle de la commune a le droit d'exercer, tant en demande qu'en défense, à ses frais et risques, avec l'autorisation du tribunal administratif, les actions qu'il croit appartenir à la commune et que celle-ci, préalablement appelée à en délibérer, a refusé ou négligé d'exercer" ; qu'il appartient au tribunal administratif statuant comme autorité administrative, et au Conseil d'Etat, saisi d'un recours de pleine juridiction dirigé contre la décision du tribunal administratif, lorsqu'ils examinent une demande présentée par un contribuable sur le fondement de ces dispositions, de vérifier, sans se substituer au juge de l'action, et au vu des éléments qui leur sont fournis, que l'action envisagée présente un intérêt suffisant pour la commune et qu'elle a une chance de succès ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le maire d'Hem a été saisi le 7 octobre 1996 d'une demande de M. X... tendant à ce que la commune dépose plainte avec constitution de partie civile devant les juridictions compétentes à l'encontre de l'association "Carrefour des emplois intermédiaires" et de ses dirigeants pour "faux en écriture, abus de confiance et gestion de fait de deniers publics" ; que, dans une lettre du 18 octobre 1996, le maire a informé M. X... de ce qu'il n'avait pas l'intention d'inscrire à l'ordre du jour du conseil municipal une délibération l'autorisant à agir en justice à l'encontre de l'association "Carrefour des emplois intermédiaires" et de ses dirigeants ; que le refus explicite du maire doit être regardé comme exprimant le refus de la commune d'engager l'action ; que M. X..., en sa qualité de contribuable de la COMMUNE D'HEM était recevable à solliciter du tribunal administratif de Lille, en application des dispositions législatives précitées, l'autorisation d'intenter l'action au nom de la commune ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la COMMUNE D'HEM a, en 1992, versé à l'association "Carrefour des emplois intermédiaires", une subvention de 877 200 F, intégrant des participations de l'Etat et de la région à hauteur de 60 %, pour la rémunérationd'une équipe de maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale agissant dans le cadre d'une opération de développement social urbain de plusieurs quartiers de la commune ; que, toutefois, ne figurait en recettes, dans le compte d'exploitation de l'association déposé en préfecture, que la somme de 541 808,75 F ; qu'il n'est pas contesté que cette dernière somme correspond aux salaires effectivement versés aux membres de l'équipe de maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale ; qu'en revanche, des explications contradictoires ont successivement été apportées pour justifier de l'emploi des 362 391,25 F correspondant à la différence entre la subvention versée et la somme inscrite au compte d'exploitation ;
Considérant que la somme litigieuse provient à hauteur de 40 % du budget de la COMMUNE D'HEM ; que cette dernière n'a fait aucune diligence pour en assurer le recouvrement ; que le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile présente bien un intérêt suffisant pour la commune ;

Considérant que les faits sur lesquels repose la constitution de partie civile sont énoncés de façon suffisamment claire par M. X... ; qu'il n'est pas établi que des contrôles de la chambre régionale des comptes ou, des organismes de sécurité sociale auraient attesté du caractère régulier des comptes de l'association "Carrefour des emplois intermédiaires" ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, le Procureur de la République ne s'est pas borné à ouvrir une enquête préliminaire sur les faits reprochés aux dirigeants de l'association mais a engagé des poursuites ; qu'ainsi, l'action envisagée par M. X..., dans la mesure où elle tend à ce qu'il soit autorisé à se constituer partie civile au nom de la commune pour faux en écriture et abus de confiance ne peut être regardée comme dépourvue de chances de succès ; qu'en revanche, eu égard aux règles de procédure applicables au jugement, par la chambre régionale des comptes, des personnes déclarées comptables de fait, qui ne comportent pas d'intervention de la commune, l'action envisagée sur ce dernier point par M. X... ne présente pas, pour la commune, de chance sérieuse de succès ;
Considérant qu'il résulte de ce qui prècède que la COMMUNE D'HEM n'est fondée à demander l'annulation de la décision du 21 février 1997 du tribunal administratif de Lille qu'en tant que, par cette décision, le tribunal a autorisé M. X... à porter plainte, avec "constitution de partie civile" au nom de la commune, pour gestion de fait de deniers publics ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE D'HEM, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. X... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X... à payer à la COMMUNE D'HEM la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La décision du 21 février 1997 du tribunal administratif de Lille est annulée en tant qu'elle autorise M. X... à déposer plainte avec constitution de partie civile pour gestion de fait de deniers publics.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE D'HEM est rejeté.
Article 3 : Les conclusions de M. X... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE D'HEM, à M. X... et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

135-02-05-01-04 COLLECTIVITES TERRITORIALES - COMMUNE - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - EXERCICE PAR UN CONTRIBUABLE DES ACTIONS APPARTENANT A LA COMMUNE - CONDITIONS DE FOND -Chance sérieuse de succès - Absence - Action en vue de porter plainte pour gestion de fait des deniers publics.

135-02-05-01-04 Eu égard aux règles de procédure applicables au jugement, par la chambre régionale des comptes, des personnes déclarées comptables de fait, qui ne comportent pas d'intervention de la commune, l'action envisagée sur ce point par le contribuable d'une commune ne présente pas pour celle-ci de chance sérieuse de succès au sens de l'article L.2132-5 du code général des collectivités territoriales. Annulation de la décision du tribunal administratif en tant qu'elle autorise ce contribuable à porter plainte, avec constitution de partie civile , au nom de la commune, pour gestion de fait de deniers publics.


Références :

Code général des collectivités territoriales L2132-5
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation: CE, 14 jan. 1998, n° 186453
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: Mme Prada Bordenave
Rapporteur public ?: M. Bonichot

Origine de la décision
Formation : 1 / 4 ssr
Date de la décision : 14/01/1998
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 186453
Numéro NOR : CETATEXT000007964799 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1998-01-14;186453 ?
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