Vu la requête, enregistrée le 18 mars 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Jeanine X..., demeurant ..., agissant en exécution d'un jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris en date du 28 novembre 1995 ; Mme X... demande au Conseil d'Etat d'apprécier la légalité du décret du 5 septembre 1989 fixant les modalités du transfert au 1er janvier 1989 au régime général de sécurité sociale et au régime d'assurance vieillesse des industriels et commerçants des obligations contractées par la caisse d'allocation vieillesse des officiers ministériels, des officiers publics et des compagnies judiciaires (C.A.V.O.M.) à l'égard des agents de change et anciens agents de change ainsi que de leurs ayants droit pour la couverture du risque vieillesse, en tant qu'il soumet la réversion de la rente dont bénéficiaient les agents de change en retraite au titre du régime de base d'assurance vieillesse aux conditions d'ouverture de droit définies pour les pensions de réversion du régime général, et de déclarer que ce décret est, dans cette mesure, entaché d'illégalité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989 portant diverses mesures d'ordre social ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Fombeur, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de Mme Jeanine X...,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 19 de la loi du 13 janvier 1989 portant diverses mesures d'ordre social : "A compter du 1er janvier 1989, les obligations de la caisse d'allocation vieillesse des officiers ministériels, des officiers publics et des compagnies judiciaires sont, en ce qui concerne le régime de base d'assurance vieillesse dont bénéficiaient les agents de change en retraite ou ayant exercé cette activité ainsi que leurs ayants droit, transférées au régime général de sécurité sociale. - Pour les agents de change qui continuent d'exercer cette activité, ces mêmes obligations sont transférées aux régimes de base d'assurance vieillesse auxquels les intéressés sont affiliés en raison de la modification du mode d'exercice de leur activité. - Les modalités de ce transfert sont prévues par un décret qui fixe les adaptations nécessaires aux règles de détermination du salaire annuel de base, de la durée d'assurance et du taux de pension, mentionnées aux deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale. - Ce transfert ne peut concerner que les droits acquis ou en cours d'acquisition auprès de la caisse d'allocation vieillesse des officiers ministériels, des officiers publics et des compagnies judiciaires pour les périodes au cours desquelles les agents de change ont exercé une activité exclusivement libérale" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu transférer au régime général de sécurité sociale l'intégralité des obligations de la caisse d'allocation vieillesse des officiers ministériels, des officiers publics et des compagnies judiciaires, en ce qui concerne notamment le régime de base d'assurance vieillesse dont bénéficiaient les agents de change en retraite ou ayant exercé cette activité ainsi que leurs ayants droit, pour les périodes au cours desquelles les agents de change ont exercé une activité exclusivement libérale ; que figurent au nombre de ces obligations les allocations de réversion auxquelles auraient eu droit les conjoints survivants d'agents de change en retraite ou ayant exercé cette activité si la pension principale de ces derniers avait continué à être servie par la caisse d'allocation vieillesse des officiers ministériels, des officiers publics et des compagnies judiciaires, dans les conditions d'ouverture du droit applicables dans le régime de base d'assurance vieillesse des professions libérales ; que, par suite, Mme X... est fondée à soutenir que le décret du 5 septembre 1989 fixant les modalités du transfert au 1er janvier 1989 au régime général de sécurité sociale et au régime d'assurance vieillesse des industriels et commerçants des obligations contractées par la caisse d'allocation vieillesse des officiers ministériels, des officiers publics et des compagnies judiciaires à l'égard des agents de change et anciens agents de change ainsi que de leurs ayants droit pour la couverture du risque vieillesse est entaché d'illégalité en tant qu'il soumet la réversion de la pension dont bénéficiaient les agents de change en retraite au titre du régime de base d'assurance vieillesse des professions libérales aux conditions d'ouverture de droit définies pour les pensions de réversion du régime général ;
Article 1er : Il est déclaré que l'article 1er du décret du 5 février 1989 fixant les modalités du transfert au 1er janvier 1989 au régime général de sécurité sociale et au régime d'assurance vieillesse des industriels et commerçants des obligations contractées par la caisse d'allocation vieillesse des officiers ministériels, des officiers publics et des compagnies judiciaires(C.A.V.O.M.) à l'égard des agents de change et anciens agents de change ainsi que de leurs ayants droit pour la couverture du risque vieillesse est entaché d'illégalité en tant qu'il fixe les conditions de réversion de la pension dont bénéficiaient les agents de change en retraite au titre du régime de base d'assurance vieillesse des professions libérales.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Jeanine X..., à la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés, au président du tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris, au Premier ministre, au ministre de l'emploi et de la solidarité et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.