Vu la requête, enregistrée le 10 août 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT, dont le siège est ... (Cedex 05, 75231) ; l'ASSOCIATION FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 38 du décret n° 94-484 du 9 juin 1994 modifiant le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977, pris pour l'application de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976, relative aux installations classées pour la protection de l'environnement et du titre 1er de la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution et modifiant le livre V du code de l'urbanisme ;
2°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 5 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code pénal ;
Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976, modifiée, et le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977, modifié, pris pour son application ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle de Silva, Auditeur,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le 10°, ajouté par l'article 38 attaqué du décret n° 94-484 du 9 juin 1994 à l'article 43 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977, modifié, pris notamment pour l'application de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, punit de l'amende prévue pour les contraventions de la 5ème classe "quiconque aura mis en oeuvre des substances, des produits, des organismes ou des procédés de fabrication soumis à agrément en vertu du quatrième alinéa de l'article 4 de la loi du 19 juillet 1976 susvisée sans avoir obtenu l'agrément ou sans avoir respecté les conditions prévues par cet agrément" ;
Considérant qu'en vertu de l'article 3 de la loi du 19 juillet 1976, les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article 1er de cette loi sont soumises à autorisation préfectorale ; que l'article 18 de la même loi dispose que sera puni, notamment, d'une peine d'emprisonnement de deux mois à un an "quiconque exploite une installation sans l'autorisation requise ..." ; que, contrairement à ce que soutient l'ASSOCIATION FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT, l'agrément prévu par le quatrième alinéa de l'article 4 de la loi du 19 juillet 1976 est distinct de l'autorisation préfectorale requise par l'article 3 de la même loi ; que, par suite, l'article 38 du décret attaqué n'a pas institué une peine contraventionnelle se cumulant avec les sanctions pénales prévues par l'article 18 de la loi du 19 juillet 1976 ;
Considérant qu'aucun principe ne s'oppose à ce qu'une peine contraventionnelle soit fondée sur la méconnaissance de plusieurs dispositions ; qu'ainsi, à supposer qu'un même agissement relève à la fois du 10° ajouté à l'article 43 du décret du 21 septembre 1977 et d'autres dispositions du même article, l'article 38 du décret du 9 juin 1994 n'institue pas un cumul de peines à raison des mêmes faits ;
Considérant enfin, qu'aux termes de l'article 121-2 du nouveau code pénal : "Les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, sont pénalement responsables, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-17 et dans les cas prévus par la loi ou le règlement, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants" ; qu'il appartient au Gouvernement d'apprécier l'opportunité d'appliquer ou non aux personnes morales les sanctions pénales attachées aux contraventions qu'il définit ; que, par suite, l'ASSOCIATION FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT ne peut utilement reprocher aux auteurs du décret attaqué de n'avoir pas prévu que les personnes morales seraient responsables pénalement de la contravention, définie par l'article 38 de ce texte, qui serait commise, pour leur compte, par leurs organes ou représentants ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de l'ASSOCIATION FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT doit être rejetée ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'ASSOCIATION FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à ASSOCIATION FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT, au Premier ministre et au ministre de l'environnement.