Vu, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les 30 avril et 30 juillet 1993, la requête sommaire et le mémoire complémentaire présentés pour le département de la Loire agissant poursuites et diligences du président du conseil général ; le département de la Loire demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Lyon a, sur déféré du préfet de la Loire, annulé l'avis de la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes du 8 juillet 1992, décidant qu'il n'y avait pas lieu de mettre le département de la Loire en demeure d'inscrire à son budget un crédit de 6 327 122 F, au titre de sa contribution aux dépenses de fonctionnement des services extérieurs du ministère de l'équipement mis à sa disposition ;
2°) rejette le déféré du préfet de la Loire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 82-213 du 2 mars 1982, modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Boulard, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Cossa, avocat du président du Conseil général de la Loire,
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 52 de la loi du 2 mars 1982, relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions : "Ne sont obligatoires pour les départements que les dépenses nécessaires à l'acquittement des dettes exigibles et les dépenses pour lesquelles la loi l'a expressément décidé. La chambre régionale des comptes saisie, soit par le représentant de l'Etat dans le département, soit par le comptable du département, soit par toute personne ayant intérêt, constate qu'une dépense obligatoire n'a pas été inscrite au budget du département ou l'a été pour une somme insuffisante. Elle opère cette constatation dans le délai d'un mois à partir de la saisine et adresse une mise en demeure au département intéressé. Si, dans le délai d'un mois, cette mise en demeure n'est pas suivie d'effet, la chambre régionale des comptes demande au représentant de l'Etat dans le département, d'inscrire cette dépense au budget départemental ... Le représentant de l'Etat dans le département règle et rend exécutoire le budget rectifié en conséquence. S'il s'écarte des propositions formulées par la chambre régionale des comptes, il assortit sa décision d'une motivation explicite" ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 30 de la loi du 2 mars 1982, dont les dispositions sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi n° 92-1255 du 2 décembre 1992, le 1er janvier 1993 : " ... restent à la charge du département les prestations de toute nature, y compris celles relatives à l'entretien et l'acquisition des matériels, qu'ils fournissent actuellement au fonctionnement ... des services extérieurs de l'Etat ainsi qu'à leurs agents" ; que ces dispositions, en visant expressément les prestations fournies à l'Etat antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 2 mars 1982, ont donné un caractère obligatoire, au sens de l'article 52 de cette loi, aux dépenses prises en charge par le département au profit des services extérieurs de l'Etat et, notamment, de la direction départementale de l'équipement ;
Considérant que, par lettre du 27 mai 1992, le préfet de la Loire a saisi la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes d'une demande tendant à ce que celle-ci constate que le département de la Loire n'avait pas inscrit à son budget de 1992 une dépense de 6 327 122 F correspondant à sa participation aux dépenses de fonctionnement des services extérieurs du ministère de l'équipement mis à la disposition du président du conseil général selon les termes d'une convention conclue en application du décret n° 87-100 du 13 février 1987 ; que, bien qu'elle ait constaté que cette dépense était au nombre des prestations visées par les dispositions précitées de l'article 30 de la loi du 2 mars 1982 et qu'elle constituait donc, pour le département de la Loire, une dépense obligatoire par détermination de la loi, au sens de l'article 52 de la même loi, la chambre régionale des comptes a estimé, dans l'avis qu'elle a rendu le 8 juillet 1992, qu'il n'y avait pas lieu, "en l'état du dossier", de mettre en demeure le département d'inscrire le crédit correspondant à son budget ; qu'elle a donné pour motif à cette décision que le tribunal administratif de Lyon se trouvait saisi par le président du conseil général de la Loire d'une demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 30 janvier 1991 par lequel le préfet de la Loire avait, en application de l'article 53 de la loi du 2 mars 1982, procédé au mandatement d'office de la fraction, non acquittée par le département, de sa participation aux dépenses de fonctionnement des services extérieurs du ministère de l'équipement au titre de l'année 1990 et que, "de ce fait", la créance que l'Etat entendait faire valoir, du même chef, à l'égard du département, au titre de l'année 1992, ne présentait "pas encore le caractère d'exigibilité requis" ;
Mais considérant que la chambre régionale des comptes était tenue d'adresser au département de la Loire la mise en demeure prévue par l'article 52 de la loi du 2 mars 1982, dès lors qu'elle avait, à bon droit, constaté que la dépense, non inscrite au budget départemental, sur laquelle portait sa saisine était de celles qui ont un caractère obligatoire par détermination de la loi, celles-ci n'étant soumises à aucune condition d'exigibilité susceptible de faire obstacle à la poursuite de la procédure engagée sur le fondement dudit article 52 ; qu'ainsi, en décidant, pour le motif ci-dessus indiqué, qu'il n'y avait pas lieu de mettre en demeure le département de la Loire d'inscrire à son budget de 1992 la somme de 6 327 122 F qu'il avait omis d'y porter, la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes a commis une erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le département de la Loire n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a, sur déféré du préfet de la Loire, annulé pour excès de pouvoir l'avis, ci-dessus analysé, de la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes du 8 juillet 1992 ;
Article 1er : La requête du département de la Loire est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au département de la Loire, au préfet de la Loire, au ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme et au ministre de l'intérieur.