Vu la requête enregistrée le 29 janvier 1996 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. André X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 29 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg, saisi par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques en application de l'article L. 52-15 du code électoral, l'a déclaré démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal de la commune de Moyeuvre-Grande et inéligible pour une durée d'un an aux fonctions de conseiller municipal, et a proclamé élue Mme Marie-Thérèse Y... ;
2°) annule la décision de la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques rejetant son compte de campagne ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 96-300 du 10 avril 1996 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Rousselle, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Hennuyer, avocat de M. André X...,
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le premier alinéa de l'article L. 52-4 du code électoral dispose que : "Pendant l'année précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du scrutin où l'élection a été acquise, un candidat à cette élection ne peut avoir recueilli des fonds en vue du financement de sa campagne que par l'intermédiaire d'un mandataire nommément désigné par lui, qui est soit une association de financement électorale, soit une personne physique dénommée "le mandataire financier"" ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 52-5 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : "L'association de financement électorale doit être déclarée selon les modalités prévues par l'article 5 de la loi du 1er juillet 1901 relatives au contrat d'association ... Le candidat ne peut être membre de sa propre association de financement électorale ..." ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 10 avril 1996 : "Pour l'élection des conseillers municipaux dont le dépôt des candidatures a été antérieur au 5 février 1996, l'interdiction faite par l'article L. 52-5 du code électoral à un candidat d'être membre de sa propre association de financement ne s'applique qu'au candidat tête de la liste (...). Ces dispositions de portée interprétative s'appliquent aux instances en cours dans les juridictions administratives ; elles ne portent pas atteinte à la validité de décisions juridictionnelles devenues définitives" ;
Considérant que pour déclarer M. X... démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal de la commune de Moyeuvre-Grande, le tribunal administratif de Strasbourg, par son jugement du 29 décembre 1995, antérieur à la loi précitée du 10 avril 1996, s'est fondé sur la circonstance que quatre candidats figurant sur la liste qu'il conduisait figuraient parmi les membres du bureau de l'"association de financement de la liste X...", créée le 28 février 1995 et enregistrée le 28 mars 1995 au greffe du tribunal d'instance ;
Considérant qu'il ressort de l'instruction que M. X..., candidat tête de liste, ne figurait pas parmi les membres des organes d'administration et de direction de ladite association ; que, par suite, et en application des dispositions précitées de l'article 1er de la loi du 10 avril 1996, il ne tombe pas sous le coup de l'interdiction faite par l'article L. 52-5 du code électoral ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à demander l'annulation du jugement du 29 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg, saisi par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, l'a déclaré démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal de la commune de Moyeuvre-Grande et inéligible pour une durée d'un an aux fonctions de conseiller municipal, et a proclamé élue Mme Y... en qualité de conseiller municipal ;
Sur les conclusions relatives au remboursement des dépenses électorales :
Considérant qu'il n'appartient pas au juge de l'élection de se prononcer sur les conclusions de M. X... relatives au remboursement forfaitaire des dépenses électorales par l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 52-11-1 du code électoral ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 29 décembre 1995 est annulé.
Article 2 : L'élection de M. X... en qualité de conseiller municipal de la commune de Moyeuvre-Grande est validée.
Article 3 : La saisine de la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques relative au compte de M. X... est rejetée.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. X... est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. André X..., à Mme Marie-Thérèse Y..., à la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et au ministre de l'intérieur.