Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 24 mars 1992, présentée pour M. Jean X..., demeurant ... au Kremlin-Bicêtre (94270) ; M. X... demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 26 décembre 1991 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté sa requête aux fins de décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et des pénalités auxquels il a été assujetti au titre de chacune des années 1978, 1979 et 1980 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de commerce ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Urtin-Petit, Rousseau-Van Troeyen, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 124 du code général des impôts, les intérêts perçus en rémunération d'un prêt consenti par une personne physique de fonds prélevés par celle-ci sur son patrimoine civil sont soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que, si l'article 34 du même code dispose : "Sont considérés comme des bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale ...", ces dispositions, qui visent les profits tirés de l'accomplissement, dans des conditions caractéristiques de l'exercice d'une activité professionnelle, d'actes réputés "de commerce" par l'article 632 du code de commerce, sont sans incidence en ce qui concerne le régime d'imposition de revenus qui, tels les intérêts ci-dessus mentionnés, résultent de l'accomplissement d'opérations non qualifiées d'"actes de commerce", et ne sauraient donc affecter la portée des dispositions qui, telles celle de l'article 124 du code général des impôts, rangent ces revenus dans une catégorie spécifique au regard de l'impôt ;
Considérant qu'il suit de là qu'en jugeant, par l'arrêt attaqué, que les prêts consentis par M. X... à des particuliers de fonds provenant de son patrimoine civil, et en rémunération desquels il a perçu des intérêts au cours des années 1978, 1979 et 1980, "dénotent, tant en raison de leur nombre et de leur importance que de leur caractère habituel, l'exercice d'une activité professionnelle commerciale au sens de l'article 34" du code général des impôts, et qu'ainsi, l'administration avait à bon droit imposé lesdits intérêts, non comme des revenus de capitaux mobiliers, mais comme des bénéfices industriels et commerciaux, la cour administrative d'appel a fait une inexacte application des dispositions des articles 34 et 124 du code général des impôts ; que M. X... est, dès lors, fondé à demander que l'arrêt attaqué soit annulé ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant la cour administrative d'appel de Nancy statuant dans une autre formation ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 26 décembre 1991 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Nancy dans une autre formation.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Jean X... et au ministre de l'économie et des finances.