Vu le recours enregistré le 10 octobre 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le département de l'Isère, représenté par le président du conseil général ; le département de l'Isère demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision du 23 mars 1990 par laquelle la commission centrale d'aide sociale a annulé, à la demande de Mme X..., la décision de la commission départementale d'aide sociale de l'Isère du 24 janvier 1989 lui refusant l'attribution de l'allocation compensatrice "jusqu'à preuve de l'effectivité de la tierce personne" ;
2°) renvoie l'affaire devant la commission centrale d'aide sociale ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 et le décret n° 77-1549 du 31 décembre 1977 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Roul, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39 de la loi du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées dans sa rédaction alors en vigueur : "- I. Une allocation compensatrice est accordée à tout handicapé qui ne bénéficie pas d'un avantage analogue au titre d'un régime de sécurité sociale lorsque son incapacité permanente est au moins égale au pourcentage fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article 35 ci-dessus (C.s.s., art. L. 821-1), soit que son état nécessite l'aide effective d'une tierce personne pour les actes essentiels de l'existence, soit que l'exercice d'une activité professionnelle lui impose des frais supplémentaires ..." ; qu'aux termes de l'article 5 du décret du 31 décembre 1977 portant application des dispositions de la loi précitée : "L'allocation compensatrice pour aide d'une tierce personne ne peut être maintenue que si son bénéficiaire justifie qu'il a effectivement recours à l'aide qu'exige son état." ; qu'aux termes de l'article 6 du même décret : "Les personnes atteintes de cécité, c'est-à-dire dont la vision centrale est nulle ou inférieure à un vingtième de la normale, sont considérées comme remplissant les conditions qui permettent l'attribution et le maintien de l'allocation compensatrice au taux de 80 p. 100 de la majoration accordée aux invalides du troisième groupe prévu à l'article L. 310 L. 341-4 du code de la sécurité sociale" ;
Considérant, en premier lieu, que, si en vertu de l'article 5 du décret précité du 31 décembre 1977, le maintien de l'allocation compensatrice pour aide d'une tierce personne est subordonné à la condition que le bénéficiaire ait effectivement recours à l'aide qu'exige son état, il résulte des termes mêmes de l'article 6 du même décret que les dispositions de cet article 5 ne sont pas applicables aux personnes atteintes de cécité, lesquelles, du seul fait de leur infirmité, sont réputées remplir les conditions requises aussi bien pour l'attribution que pour le maintien de l'allocation au taux prévu ;
Considérant, en second lieu, qu'en prévoyant l'attribution et le maintien de l'allocation compensatrice aux personnes atteintes de cécité, sans subordonner le maintien de cette allocation à la justification qu'il y a effectivement recours à l'aide d'une tierce personne, le décret attaqué se borne, sans méconnaître un principe général du droit, à faire application des dispositions précitées de l'article 39 de la loi du 30 juin 1975 qui permettent d'accorder une allocation compensatrice à un handicapé dès lors que son état, en lui-même, nécessite une telle aide effective ; qu'ainsi, les moyens tirés de ce que la commission centrale d'aide sociale en rétablissant au profit de Mme X..., atteinte de cécité, qui avait cessé de recourir à l'aide d'une tierce personne, l'allocation compensatrice au taux de 80 % de la majoration accordée aux invalides du troisième groupe prévu à l'article L. 310 du code de la sécurité sociale, aurait commis une erreur de droit dans l'application de l'article 39 de la loi du 30 juin 1975 ou fait une interprétation inexacte de l'article 6 du décret du 31 décembre 1977 doivent être écartés ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le département de l'Isère n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision susvisée du 24 janvier 1989 de la commission centrale d'aide sociale qui a accueilli l'appel de Mme X... et l'a rétablie dans l'intégralité de ses droits à l'allocation compensatrice ;
Article 1er : Le recours du département de l'Isère est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au département de l'Isère, à Mme X..., à la Maison des cannes blanches de l'Isère et au ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville.