La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/12/1994 | FRANCE | N°129250

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 09 décembre 1994, 129250


Vu le recours du ministre de l'intérieur enregistré le 3 septembre 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre de l'intérieur demande que le Conseil d'Etat annule le jugement du 25 juin 1991 par lequel le tribunal administratif de Lyon a, à la demande de M. Y... Kaya, annulé la décision du 21 novembre 1990 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de délivrer une carte de résident ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 modifiée du 2 novembre 1945 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des li

bertés fondamentales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des c...

Vu le recours du ministre de l'intérieur enregistré le 3 septembre 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre de l'intérieur demande que le Conseil d'Etat annule le jugement du 25 juin 1991 par lequel le tribunal administratif de Lyon a, à la demande de M. Y... Kaya, annulé la décision du 21 novembre 1990 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de délivrer une carte de résident ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 modifiée du 2 novembre 1945 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Jodeau-Grymberg, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M Abraham, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ...2. Il ne peut y avoir ingérence pour l'autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ; qu'aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dans sa rédaction issue de la loi du 2 août 1989 applicable à la date de la décision attaquée : "la carte de résident est délivrée de plein droit sans que puissent être opposées les dispositions des articles 6 et 9 de la présente ordonnance : 1° au conjoint étranger d'un ressortissant de nationalité française ..." ; que si le préfet du Rhône a refusé à M. X... la délivrance d'une carte de résident au motif que l'intéressé était irrégulièrement entré en France, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il se soit abstenu, avant de prendre cette décision et comme il lui appartenait de le faire en application des dispositions de l'article 8 précité de la convention européenne des droits de l'homme, d'examiner si son refus portait à la vie familiale de M. X... une atteinte disproportionnée ; qu'ainsi le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon s'est fondé, pour annuler la décision en date du 21 novembre 1990 du préfet du Rhône refusant à M. X... la carte de résident qu'il sollicitait comme conjoint d'un ressortissant français, sur ce que le préfet du Rhône n'aurait pas procédé à cet examen ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner l'autre moyen soulevé par M. X... devant le tribunal administratif du Lyon ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le chef du service des étrangers, signataire de la décision attaquée, bénéficiait, à la date à laquelle elle a été prise, d'une délégation régulière de signature publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture du Rhône ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant de délivrer une carte de résident à M. X..., le préfet du Rhône ait porté une atteinte disproportionnée à sa vie familiale ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Article 1er : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Lyon en date du 25 juin 1991 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et del'aménagement du territoire et à M. Y... Kaya.


Synthèse
Formation : 2 / 6 ssr
Numéro d'arrêt : 129250
Date de la décision : 09/12/1994
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ETRANGERS - SEJOUR DES ETRANGERS - REFUS DE SEJOUR - QUESTIONS GENERALES - Légalité au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme (droit au respect de la vie familiale) - Préfet devant examiner si le refus porterait une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale - Absence d'un tel examen ne ressortant pas des pièces du dossier.

335-01-04-01, 335-01-04-04, 35-04 Tribunal administratif ayant annulé la décision par laquelle le préfet a refusé de délivrer une carte de résident de plein droit, au motif que le préfet n'aurait pas examiné, avant de prendre sa décision, si son refus porterait une atteinte disproportionnée à la vie familiale du demandeur. Annulation de ce jugement dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se soit abstenu de procéder à cet examen comme il lui appartenait de le faire en application de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme.

ETRANGERS - SEJOUR DES ETRANGERS - REFUS DE SEJOUR - MOTIFS - Refus de délivrance d'une carte de résident - Préfet devant examiner si ce refus porterait une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale - Absence d'un tel examen ne ressortant pas des pièces du dossier.

FAMILLE - DROIT AU RESPECT DE LA VIE FAMILIALE (ARTICLE 8 DE LA CONVENTION EUROPEENNE DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES) - Entrée et séjour des étrangers - Refus de titre de séjour - Obligation pour le préfet en application de l'article 8 d'examiner - avant sa décision - l'atteinte portée à la vie familiale du demandeur - Absence d'examen ne ressortant pas des pièces du dossier.


Références :

Convention européenne du 04 novembre 1950 droits de l'homme art. 8
Loi 89-548 du 02 août 1989
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 15


Publications
Proposition de citation : CE, 09 déc. 1994, n° 129250
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: Mme Jodeau-Grymberg
Rapporteur public ?: M. Abraham

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1994:129250.19941209
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award