Vu la requête, enregistrée le 16 février 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le Centre hospitalier régional et universitaire de Caen, représenté par son directeur-général en exercice, dûment habilité pour ce faire ; le Centre hospitalier régional et universitaire de Caen demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 17 novembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé la décision de son directeur-général refusant à Mme X..., praticien hospitalier en période probatoire, le bénéfice d'un congé postnatal ; 2°) de rejeter la demande de Mme X..., présentée à ce tribunal, et dirigée contre cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 84-131 du 24 février 1984 modifié, portant statut des praticiens hospitalier ;
Vu la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Chantepy, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Mattei-Dawance, avocat de Mme Anne X...,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 18 du décret n° 84-131 du 24 février 1984, portant statut des praticiens hospitaliers : "Les candidats recrutés au titre des concours mentionnés aux articles 6-3 et 6-4 sont nommés pour une période probatoire d'un an, à l'issue de laquelle ils sont, après avis de la commission statutaire ... mentionnée à l'article 25, ... soit nommés dans un emploi de praticien à titre permanent, soit admis à prolonger leur période probatoire pour une nouvelle durée d'un an, soit licenciés pour inaptitude à l'exercice des fonctions en cause" ; qu'aux termes de l'article 43 du même décret : "Le praticien hospitalier peut être placé hors de son établissement d'affectation, dans la position de congé postnatal, non rémunérée, pour élever son enfant. Cette position est accordée à la mère après un congé pour maternité ou au père après la naissance et jusqu'au troisième anniversaire de l'enfant ... Le congé postnatal est accordé de droit à l'occasion de chaque naissance ... dans les conditions prévues ci-dessus, sur simple demande, à la mère ou au père praticien hospitalier" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le droit au congé postnatal s'étend, en l'absence de toute restriction expressément prévue par le statut des praticiens hospitaliers, à l'ensemble de ces derniers, y compris ceux qui effectuent un stage probatoire en application de l'article 18 précité du décret du 24 février 1984 ; qu'il suit de là que Mme X..., praticien hospitalier en période probatoire, s'est vue illégalement refuser le renouvellement de son congé postnatal à la naissance de son deuxième enfant, au motif que le droit à ce congé serait réservé aux praticiens hospitaliers titulaires ;
Considérant, il est vrai, que le Centre hospitalier régional et universitaire de Caen soutient que Mme X... aurait demandé le renouvellement de son congé postnatal pour des motifs de convenance personnelle, étrangers à la naissance de son deuxième enfant ;
Mais considérant que l'article 43 du décret du 24 février 1984 susvisé se borne à prévoir que : "Le directeur de l'établissement fait procéder aux enquêtes nécessaires en vue de s'assurer que l'activité du praticien placé en congé postnatal est réellement consacrée à élever son enfant", et que "si le contrôle révèle que le congé n'est pas utilisé à cette fin, il peut être mis fin au congé, après que l'intéressé a été invité à présenter ses observations" ; que ces dispositions n'étaient pas de nature à fonder légalement un refus ; qu'il aurait seulement appartenu au centre hospitalier, après avoir accordé à l'intéressée le congé qu'elle demandait, d'y mettre fin au cas où il lui serait apparu qu'une telle mesure était justifiée au regard des dispositions de l'article 43, précitées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Centre hospitalier régional et universitaire de Caen n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a annulé la décision prise par son directeur-général de refuser à Mme X... le renouvellement de son congé postnatal ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le Centre hospitalier régional et universitaire de Caen à verser à Mme X... la somme de 10 000 F qu'elle réclame au titre des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ;
Article 1er : La requête du Centre hospitalier régional et universitaire de Caen est rejetée.
Article 2 : Le Centre hospitalier régional et universitaire de Caen paiera à Mme X... la somme de 10 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au Centre hospitalier régional et universitaire de Caen, à Mme Anne X... et au ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville.