Vu, 1), sous le n° 140 150, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 4 août 1992 et 4 décembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France ; le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 17 mars 1992 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation d'un arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 29 septembre 1989 accordant à Mme X... l'autorisation de créer une officine de pharmacie, par voie dérogatoire, à Puteaux ;
2°) annule l'arrêté précité ;
Vu, 2), sous le n° 141 668, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 septembre 1992 et 25 janvier 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'union régionale des pharmacies d'Ile-de-France ; l'union régionale des pharmacies d'Ile-de-France demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 17 mars 1992 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation d'un arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 29 septembre 1989 accordant à Mme X... l'autorisation de créer une officine de pharmacie, par voie dérogatoire, à Puteaux ;
2°) annule l'arrêté précité ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Faure, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, avocat du conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France ; de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de Mme X... et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'union régionale des pharmacies d'Ile-de-France,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes présentées pour le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France et pour l'union régionale des pharmacies de l'Ile-de-France sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la requête du conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que par une délibération en date du 26 mars 1990, le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France a autorisé son président à agir en justice ; que le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France a intérêt à demander l'annulation de l'arrêté en date du 29 septembre 1989 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a autorisé la création d'une officine par la voie dérogatoire au CNIT, à Puteaux ; que, dès lors, la demande présentée par le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile de France et tendant à l'annulation de cet arrêté est recevable ;
Considérant qu'en vertu du cinquième alinéa de l'article L. 571 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de la loi du 30 juillet 1987, et par dérogation aux alinéas précédents du même article, l'autorisation de créer une officine de pharmacie peut être accordée par le préfet "si les besoins réels de la population résidente et de la population saisonnière l'exigent" ;
Considérant que par un arrêté en date du 29 septembre 1989, le préfet des Hauts-de-Seine a autorisé la création, par voie dérogatoire, d'une officine de pharmacie au CNIT, à Puteaux, au motif que : "la création d'une officine à l'emplacement proposé se justifie en raison du caractère très exceptionnel des équipements, de la vocation et de la fréquentation du CNIT et notamment du fait qu'une proportion importante de ses usagers sont appelés à y séjourner pour des durées et dans des conditions telles que leurs besoins sont à assimiler à ceux d'une population résidente ou saisonnière" ;
Considérant que les dispositions précitées du code de la santé publique excluent des critères susceptibles d'être retenus pour l'octroi d'une autorisation dérogatoire la population de passage ; qu'il ressort des pièces du dossier que le CNIT, espace composé d'un palais des congrès, d'auditoriums, de salles d'expositions, de bureaux et d'une galerie marchande n'abrite aucune population résidente au sens des dispositions précitées du code de la santé publique ; que seul un hôtel d'environ 200 chambres est appelé à abriter une population qui est insuffisante pour justifier à elle seule l'octroi d'une autorisation ; qu'en outre, 4 pharmacies sont situées à moins de 1 km de l'emplacement retenu pour l'officine litigieuse dont la plus proche se trouve à environ 250 mètres de celle-ci ; qu'ainsi, en accordant l'autorisation sollicitée, le préfet a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 571 du code de la santé publique ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a estimé que les usagers dudit centre commercial constituaient une population résidente ou saisonnière au sens de l'article L.571 du code de la santé publique et a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux ;
Sur la requête de l'union régionale des pharmacies d'Ile-de-France :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'arrêté en date du 29 septembre 1989 du préfet des Hauts-de-Seine est annulé par la présente décision ; que, dès lors, les conclusions de l'union régionale des pharmacies d'Ile-de-France tendant à l'annulation dudit arrêté sont devenues sans objet ;
Sur les conclusions de Mme X... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'aux termes de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue au dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ; que ces dispositions font obstacle à ce que l'union régionale des pharmacies d'Ile-de-France, qui n'est pas la partie perdante, soit condamnée à verser à Mme X... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement en date du 17 mars 1992 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : L'arrêté en date du 29 septembre 1989 du préfet des Hauts-de-Seine autorisant la création d'une officine de pharmacie par la voie dérogatoire au CNIT, à Puteaux, est annulé.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de l'union régionale des pharmacies d'Ile-de-France.
Article 4 : Les conclusions de Mme X... tendant à ce que l'union régionale des pharmacies d'Ile-de-France soit condamnée à lui verser 15 000 F en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à l'union régionale des pharmacies d'Ile-de-France, au conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France, à Mme X... et au ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville.