Vu 1°), sous le n° 115203, la requête enregistrée le 2 mars 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jean-Michel Y..., demeurant Kerlescoat à Spezet (29135) ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat annule le jugement du 27 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération du 8 novembre 1985 du conseil municipal de Spezet (Finistère) décidant la réalisation de travaux sur le chemin rural reliant Kerlescoat à Kerpunz ;
Vu 2°), sous le n° 115245, la requête et le mémoire complémentaire enregistrés le 5 mars 1990 et le 2 juillet 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Michel Y..., demeurant Kerlescoat à Spezet (29135) ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat annule le jugement du 27 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération du 8 novembre 1985 du conseil municipal de Spezet (Finistère) décidant la réalisation de travaux sur le chemin rural reliant Kerlescoat à Kerpunz ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code rural ;
Vu le code des communes ;
Vu le code de la voirie ;
Vu le code civil ;
Vu l'ordonnance n° 59-115 du 7 janvier 1959 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 :
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Rousselle, Maître des requêtes,
- les observations de Me Guinard, avocat de M. Jean-Michel Y...,
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la requête n° 115203 enregistrée le 2 mars 1990 et la requête n° 115245 formées pour M. Y... sont dirigées contre le même jugement du 27 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération du 8 novembre 1985 du conseil municipal de Spezet décidant la réalisation de travaux sur le chemin rural de Kerlescoat à Kerpunz ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant, en premier lieu, que les consorts X... sont riverains du chemin de Kerlescoat à Kerpunz et contribuables de la commune de Spezet ; que dès lors ils ont intérêt à attaquer la délibération du 8 novembre 1985 par laquelle le conseil municipal leur a enjoint d'élaguer, à leurs frais, les arbres, branches et racines qui avancent sur le sol dudit chemin et a décidé de procéder à des travaux sur celui-ci ;
Considérant, en second lieu, que si le recours formé contre ladite délibération a été enregistré par le greffe du tribunal administratif de Rennes le 13 janvier 1986, alors que celle-ci aurait été affichée dès le 8 novembre 1985, d'une part, l'une des deux décisions contenues dans cette délibération a fait l'objet d'une notification individuelle aux consorts X... le 15 novembre 1985 ; d'autre part, il ne ressort pas du dossier que la délibération ait été affichée antérieurement au 12 novembre ; que, dès lors, la demande dirigée contre la délibération n'était pas tardive ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que le tribunal administratif de Rennes a visé les mémoires des consorts X... du 9 octobre 1989 et du requérant du 12 décembre 1989, parvenus avant clôture de l'instruction ; que ces mémoires ne contenaient ni conclusions, ni moyens nouveaux ; que, dans ces conditions, le défaut de communication allégué de ces mémoires aux parties n'a pas entaché d'irrégularité la procédure suivie devant le tribunal administratif ; qu'il ressort des mentions du jugement en date du 13 décembre 1989 que les parties ont été dûment convoquées à l'audience publique ; que la commune ne saurait utilement affirmer n'avoir pas été avertie de cette date, ces mentions faisant foi par elles-mêmes jusqu'à preuve contraire ; qu'enfin l'appréciation qui avait été portée par le commissaire du gouvernement sur les moyens présentés par les demandeurs est sans influence sur la régularité du jugement ;
Sur la légalité de la délibération attaquée :
Considérant, d'une part, qu'aux termes des articles 59 et 60 du code rural : "les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales" et "l'affectation à l'usage du public peut s'établir notamment par la destination du chemin, jointe soit au fait d'une circulation générale et continue, soit à des actes réitérés de surveillance et de voirie de l'autorité municipale" ; qu'il résulte de l'ensemble des pièces du dossier que ces conditions n'étaient pas réunies à la date où a été prise la délibération attaquée ; que c'est à tort que celle-ci a qualifié le chemin de chemin rural ; que dès lors, le conseil municipal ne pouvait pas légalement décider d'engager des travaux sur le chemin litigieux, ni enjoindre aux riverains de procéder eux-mêmes à des travaux d'élagage, ses pouvoirs ne pouvant s'étendre aux chemins et sentiers d'exploitation et aux chemins privés ;
Considérant que, pour affirmer l'absence de propriété de la commune sur ce chemin, le tribunal administratif de Rennes a pu à bon droit se référer à un arrêt de la cour rappel de Rennes qualifiant ledit chemin de "chemin d'exploitation" ; que, si le requérant a formé tierce opposition contre cet arrêt, il est constant que celle-ci a été rejetée, et que ledit arrêt est ainsi définitif ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération du 8 novembre 1985 du conseil municipal de Spezet ;
Sur l'application des dispositions de la loi du 10 juillet 1991 ;
Considérant que les consorts X... ne sont pas la partie perdante et que les dispositions de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à leur condamnation à payer les frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y, a par ailleurs pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application desdites dispositions en condamnant M. Y... à payer aux consorts X... les frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions des consorts X... tendant à ce que M. Y... soit condamné à leur payer les frais irrépétibles sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Y..., aux consorts X..., à la commune de Spezet et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.