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09/10/1992 | FRANCE | N°116181

France | France, Conseil d'État, Pleniere, 09 octobre 1992, 116181


Vu la requête sommaire, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 18 avril 1990, et le mémoire complémentaire, enregistré le 25 juillet 1990, présentés pour M. Maurice X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1) d'annuler l'arrêt du 6 mars 1990 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a remis à sa charge l'intégralité des cotisations à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1981, 1982 et 1983 ;
2) de lui accorder, en règlant l'affaire au fond, la réduction des impositions contestées ;<

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Vu le code général des impôts ;
Vu...

Vu la requête sommaire, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 18 avril 1990, et le mémoire complémentaire, enregistré le 25 juillet 1990, présentés pour M. Maurice X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1) d'annuler l'arrêt du 6 mars 1990 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a remis à sa charge l'intégralité des cotisations à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1981, 1982 et 1983 ;
2) de lui accorder, en règlant l'affaire au fond, la réduction des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Dulong, Maître des requêtes,
- les observations de Me Choucroy, avocat de M. Maurice X...,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 13 du code général des impôts : "1. Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages dont le contribuable a joui en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu. 2. Le revenu global net annuel servant de base à l'impôt sur le revenu est déterminé en totalisant les bénéfices ou revenus nets visés aux I à VII bis de la 1ère sous-section de la présente section, compte tenu, le cas échéant, du montant des déficits visés à l'article 156-I et I bis, des charges énumérées au II dudit article et de l'abattement prévu à l'article 157 bis. 3. Le bénéfice ou revenu net de chacune des catégories de revenus visées au 2 est déterminé distinctement suivant les règles propres à chacune d'elles. Le résultat d'ensemble de chaque catégorie de revenus est obtenu en totalisant, s'il y a lieu, le bénéfice ou revenu afférent à chacune des entreprises, exploitations ou professions ressortissant à cette catégorie et déterminé dans les conditions prévues pour cette dernière" ; qu'aux termes de l'article 83 du même code qui concerne l'imposition de revenu dans la catégorie des traitements et salaires : "Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés ... 3°) les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales" ; qu'enfin, l'article 156-I du même code autorise sous certaines conditions que soit déduit du revenu global d'un contribuable le "déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus", tandis que l'article 156-II énumère les charges qui sont déductibles du revenu global "lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories" ;

Considérant qu'en vertu de ces dispositions, les sommes qu'un salarié qui, s'étant rendu caution d'une obligation souscrite par la société dont il est le dirigeant de droit ou de fait, a dû payer au créancier de cette dernière, sont déductibles de son revenu imposable de l'année au cours de laquelle ce paiement a été effectué, à condition que son engagement comme caution se rattache directement à sa qualité de dirigeant, qu'il ait été pris en vue de servir les intérêts de l'entreprise et qu'il n'ait pas été hors de proportion avec les rémunérations servies à l'intéressé au moment où il l'a contracté ; que, dans le cas où il s'est rendu caution d'une obligation souscrite, non par sa société, mais par une tierce personne, telle qu'un client de la société, le dirigeant doit, en outre, justifier, que la société n'était pas en état de se porter elle-même caution de cette obligation et que, s'il l'a personnellement cautionnée, c'était afin d'éviter que les activités de la société ne soient mises en péril par une éventuelle défaillance du débiteur principal et de préserver, ainsi, ses propres rémunérations ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. X..., qui était, à l'époque, ainsi qu'il n'est pas contesté, le dirigeant de fait salarié de la société anonyme Bussoz, spécialisée dans la gestion d'un "parc" de jeux automatiques, de billards automatiques et d'électrophones placés dans les cafés, a dû, s'étant rendu caution d'obligations souscrites par deux personnes présentées comme étant des clients de cette société auprès d'établissements financiers qui leur avaient consenti des avances, payer à ces derniers, aux lieu et place des débiteurs principaux, des sommes de 227 908 F en 1981, 135 276 F en 1982 et 135 276 F en 1983 qu'il a demandé à déduire, en tant que frais inhérents à sa fonction, des salaires retenus dans l'assiette de l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de ces trois années ; que, pour faire droit au recours formé par le ministre délégué au budget contre le jugement du tribunal administratif de Paris qui avait accueilli cette demande, la cour administrative d'appel de Paris a jugé qu'il n'entrait pas dans l'exercice normal des fonctions d'un dirigeant de société de se porter caution de clients de son entreprise ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les sommes payées en qualité de caution par M. X... satisfaisaient aux conditions de déductibilité qui ont été précisées ci-dessus, la cour n'a pas donné une base légale à sa décision ; que M. X... est, par suite, fondé à en demander l'annulation ;

Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "règler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de règler l'affaire au fond ;
Considérant que M. X... ne justifie, ni que la société anonyme Bussoz était dans une situation financière l'empêchant de se porter elle-même caution, ni d'ailleurs, qu'en se portant lui-même garant d'obligations souscrites auprès d'établissements financiers par les deux personnes qu'il présente comme des clients de la société, il aurait eu en vue, comme il le prétend, de leur faciliter l'obtention de fonds destinés à l'acquisition d'appareils de jeux automatiques auprès de la société anonyme Bussoz et de contribuer, ainsi, au maintien des activités de cette dernière ; qu'il ne remplissait donc pas les conditions exigées par les dispositions précitées du code général des impôts pour être autorisé à déduire de ses revenus imposables les sommes qu'il a dû payer comme caution ; que le moyen tiré de ce que l'administration aurait admis la déduction des sommes qu'il a dû verser en 1985 en application des engagements litigieux est inopérant ; que, dès lors, le ministre délégué au budget est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris lui a accordé le bénéfice de cette déduction ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 6 mars 1990 et le jugement du tribunal administratif de Paris du 16 février 1989 sont annulés.
Article 2 : M. X... est rétabli aux rôles de l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1981, 1982 et 1983, à raison de l'intégralité des droits qui lui avaient été assignés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre du budget.


Synthèse
Formation : Pleniere
Numéro d'arrêt : 116181
Date de la décision : 09/10/1992
Sens de l'arrêt : Annulation assujetissement impôt sur le revenu
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

- RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU - DETERMINATION DU REVENU IMPOSABLE - CHARGES DEDUCTIBLES - Existence - Engagements de caution souscrit par un dirigeant salarié au profit d'un client de la société - Déductibilité des sommes payées à ce titre - Conditions (1).

19-04-01-02-03-04, 19-04-02-07-02 Les sommes qu'un salarié qui, s'étant rendu caution d'une obligation souscrite par la société dont il est le dirigeant de droit ou de fait, a dû payer au créancier de cette dernière, sont déductibles de son revenu imposable de l'année au cours de laquelle ce paiement a été effectué, à condition que son engagement comme caution se rattache directement à sa qualité de dirigeant, qu'il ait été pris en vue de servir les intérêts de l'entreprise et qu'il n'ait pas été hors de proportion avec les rémunérations servies à l'intéressé au moment où il a été contracté. Dans le cas où il s'est rendu caution d'une obligation souscrite, non par sa société, mais par une tierce personne, telle qu'un client de la société, le dirigeant doit, en outre, justifier que la société n'était pas en état de se porter elle-même caution de cette obligation et que, s'il l'a personnellement cautionnée, c'était afin d'éviter que les activités de la société ne soient mises en péril par une éventuelle défaillance du débiteur principal et de préserver, ainsi, ses propres rémunérations.

- RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - TRAITEMENTS - SALAIRES ET RENTES VIAGERES - DEDUCTIONS POUR FRAIS PROFESSIONNELS - Frais réels - Engagement de caution accordé par un dirigeant salarié - Engagement de caution souscrit par un dirigeant salarié au profit d'un client de la société - Déductibilité des sommes payées à ce titre - Conditions (1).


Références :

CGI 13, 83, 156
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987

1. Inf. CAA de Paris, 1990-03-06, Ministre du budget c/ Sérafini, T. p. 739.


Publications
Proposition de citation : CE, 09 oct. 1992, n° 116181
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: M. Dulong
Rapporteur public ?: M. Ph. Martin
Avocat(s) : Me Choucroy, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:116181.19921009
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