Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 31 mai 1985 et le 30 septembre 1985, présentés pour la CHAMBRE SYNDICALE DE RERAFFINAGE, dont le siège social est ..., représentée par son président en exercice ; la CHAMBRE SYNDICALE DE RERAFFINAGE demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret n° 85-387 du 29 mars 1985 modifiant le décret n° 79-981 du 21 novembre 1979 portant réglementation de la récupération des huiles usagées en tant qu'il a méconnu le principe de priorité à la régénération,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité du 25 mars 1957 ;
Vu la directive n° 75-439 du conseil des communautés européennes du 16 juin 1975 concernant l'élémination des huiles usagées ;
Vu la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux ;
Vu la loi n° 80-531 du 15 juillet 1980 relative aux économies d'énergie et à l'utilisation de la chaleur ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Savoie, Auditeur,
- les observations de Me Delvolvé, avocat de la CHAMBRE SYNDICALE DE RERAFFINAGE,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le décret attaqué est revêtu de la signature du ministre de l'économie, des finances et du budget ; que, par suite, l'absence de contreseing du secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget et de la consommation ne saurait l'entacher d'illégalité ;
Considérant qu'il ressort clairement des stipulations de l'article 189 du traité du 25 mars 1957 que les directives du conseil des communautés européennes lient les Etats membres "quant aux résultats à atteindre" ; que si, pour atteindre le résultat qu'elles définissent, les autorités nationales, qui sont tenues d'adapter la législation et la réglementation des Etats membres aux directives qui leur sont destinées, restent seules compétentes pour décider de la forme à donner à l'exécution de ces directives et pour fixer elles-mêmes, sous le contrôle des juridictions nationales, les moyens propres à leur faire produire leurs effets en droits internes, ces autorités ne peuvent légalement édicter des dispositions qui ne seraient pas compatibles avec les objectifs définis par les directives dont il s'agit ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la directive du conseil du 16 juin 1975 concernant l'élimination des huiles usagées : "les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que, dans la mesure du possible, l'élimination des huiles usagées soit effectuée par réutilisation (régénération / ou combustion à des fins autres que la destruction)." ;
Considérant que la loi du 15 juillet 1975 sur l'élimination des déchets et la récupération des matériaux dispose en ses articles 2 et 15 que, d'une part, " ... l'élimination des déchets comporte les opérations de collecte, transport, stockage, tri et traitement nécessaires à la récupération des éléments et matériaux réutilisables ...", d'autre part, "l'élimination des déchets doit être assurée au stade correspondant à toutes les opérations mentionnées à l'article 2, alinéa 2, dans des conditions propres à faciliter la récupération des matériaux, éléments ou formes d'énergie réutilisables" ; qu'aux termes de l'article 23 de la loi du 15 juillet 1980 relative aux économies d'énergie et à l'utilisation de la chaleur : "les seules utilisations des huiles minérales et synthétiques qui, après usage, ne sont plus aptes à être utilisées en l'état, pour l'emploi auquel elles étaient destinées comme huiles neuves, et dont le rejet dans le milieu naturel est interdit en vertu des dispositions du décret n° 77-254 du 8 mars 1977, sont, lorsque la qualité de ces huiles usagées le permet, la régénération et l'utilisation industrielles comme combustible. Cette dernière utilisation ne peut être autorisée que dans des établissements agréés et lorsque les besoins des industries de régénération ont été préférentiellement satisfaites" ; que ces dispositions, qui donnent une préférence aux industries de regénération, sont compatibles avec les objectifs de la directive du 16 juillet 1975 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 7 modifié du décret contesté : "les seuls modes d'élimination autorisés pour les huiles usagées visés à l'article 1er sont le recyclage ou la régénération dans des conditions économiques acceptables ou, à défaut, l'utilisation industrielle comme combustible, conformément aux dispositions de l'article 23 de la loi n° 80-531 du 15 juillet 1980 relatives aux économies d'énergie et à l'utilisation de la chaleur" ; que ces dispositions autorisent des modes d'élimination qui doivent satisfaire préférentiellement les besoins des industries de régénération ; qu'en conséquence, le moyen tiré de la méconnaissance par le décret attaqué de la loi du 15 juillet 1975 n'est pas fondé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CHAMBRE SYNDICALE DE RERAFFINAGE n'est pas fondée à soutenir que le décret du 29 mars 1985 modifiant le décret du 21 novembre 1979 portant réglementation de la récupération des huiles usagées serait entaché d'illégalité ;
Article 1er : La requête de la CHAMBRE SYNDICALE DE RERAFFINAGE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la CHAMBRE SYNDICALE DE RERAFFINAGE, au Premier ministre et au ministre de l'environnement.