Vu 1°), sous le n° 55 599, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 12 décembre 1983 et 10 avril 1984, présentés pour Mme Y..., née Yvette X..., demeurant ... ; Mme Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement en date du 12 octobre 1983 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses demandes en restitution de crédits de taxe sur la valeur ajoutée de 21 755,65 F et de 58 175,16 F qu'elle détenait aux 31 décembre 1977 et 1978 respectivement,
2°) ordonne la restitution des crédits de taxe contestés ;
Vu 2°), sous le n° 55 600, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 décembre 1983 et 10 avril 1984, présentés pour Mme Y... ; Mme Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement, en date du 12 octobre 1983, par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande en décharge de rappel de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er avril 1975 au 31 décembre 1977 et des pénalités correspondantes ;
2°) lui accorde la décharge de l'imposition contestée et des pénalités correspondantes ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977 ;
Vu le III de l'article 81 de la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986, modifié par l'article 93 de la loi n° 87-1060 du 30 décembre 1987 ;
Vu le livre des procédures fiscales modifié notamment par l'article 45 de la loi n° 90-1169 du 29 décembre 1990 portant loi de finances rectificative ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Teissier du Cros, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Roger, avocat de Mme Yvette Y...,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les deux requêtes de Mme Y..., présentent à juger des questions en partie communes ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ;
Sur le rappel de taxe contesté par la requête n° 55 600 :
Considérant qu'aux termes des dispositions, applicables en l'espèce, de l'article 287 A, second alinéa, du code général des impôts, issues du I-2, dernier alinéa, de l'article 3 de la loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977 : "La décision de recourir à la procédure de rectification d'office est prise par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal. Celui-ci vise la notification prévue à l'article 181 A" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la notification du 14 mars 1979 par laquelle l'administration a, conformément à l'article 181 A du code général des impôts, auquel renvoie, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, l'article 288 du même code, fait connaître à Mme Y... les bases et éléments retenus pour la détermination, par voie de rectification d'office, de son chiffre d'affaires taxable de la période du 1er avril 1975 au 31 décembre 1977, ne portait pas le visa d'un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal ; que la procédure d'imposition se trouve, dès lors, entachée d'irrégularité ; que, par ce moyen qu'elle est recevable à invoquer pour la première fois en appel en vertu des dispositions du III de l'article 81 de la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986, Mme Y... est fondée à demander l'annulation du jugement n° 11 660 du tribunal administratif de Besançon qui a rejeté sa demande en décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée de 73 485,80 F et des pénalités y ajoutées, auxquels elle a été assujettie au titre de la période ci-dessus indiquée, par avis de mise en recouvrement du 23 avril 1979 ;
Sur les remboursements de taxe sur la valeur ajoutée déductible demandés par la requête n° 55 599 :
En ce qui concerne le crédit de taxe déductible dont Mme Y... se prévaut au titre de l'année civile 1977 :
Considérant que, pour rejeter la demande de remboursement de ce crédit, d'un montant de 21 755,65 F, le tribunal administratif de Besançon a estimé qu'il y avait lieu, par application des dispositions de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales, d'opérer une compensation entre la somme ainsi réclamée par Mme Y... et celle de 23 713,96 F, correspondant à la fraction du complément de taxe sur la valeur ajoutée ayant fait l'objet de l'avis de mise en recouvrement du 23 avril 1979, ci-dessus mentionné, dont l'intéressée avait été constituée redevable pour la partie de la période d'imposition comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 1977 ; qu'en statuant ainsi, le tribunal a soulevé d'office un moyen qui n'est pas d'ordre public ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler son jugement n° 12 090, en tant qu'il s'est prononcé sur la demande, ci-dessus analysée, de Mme Y..., d'évoquer cette demande et d'y statuer immédiatement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 242-OA de l'annexe II au code général des impôts : "Le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée déductible dont l'imputation n'a pu être opérée ... porte sur le crédit de taxe déductible constaté au terme de chaque année civile" ;
Considérant, d'une part, que, si, pour un motif tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition, la présente décision prononce la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel Mme Y... avait été assujettie au titre de la période du 1er avril 1975 au 31 décembre 1977 et fait ainsi échec à toute mise en recouvrement des sommes correspondantes et, en particulier, de celle de 23 713,96 F, déjà mentionnée, elle ne s'oppose pas à ce que l'administration démontre que, comme elle le prétend, la reconstitution, à laquelle elle a procédé, du chiffre d'affaires réalisé par Mme Y... au cours de l'année 1977 avait fait ressortir une insuffisance de taxe sur la valeur ajoutée égale à cette somme de 23 713,96 F, qui, étant plus importante que la taxe déductible de 21 755,65 F dont se prévaut Mme Y... au titre de la même année civile, a eu pour effet d'annuler le crédit prétendûment constaté au terme de ladite année ;
Mais, considérant que, eu égard au caractère excessivement sommaire de sa méthode de reconstitution, l'administration ne justifie pas de la réalité de cette insuffisance ; que, dans ces conditions, l'existence au 31 décembre 1977 du crédit de taxe déductible dont Mme Y... demande le remboursement doit être tenue pour établie ;
Considérant, d'autre part, qu'en vertu de l'article 242-OJ de l'annexe II au code général des impôts, toute personne qui demande le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible dont l'imputation n'a pu être opérée, "peut, à la demande de l'administration, être tenue de présenter une caution solvable qui s'engage solidairement avec elle à reverser les sommes dont elle aurait obtenu indûment le remboursement" ; qu'il résulte des termes mêmes de ce texte que l'administration ne peut s'en prévaloir devant le juge de l'impôt pour s'opposer à ce que celui-ci ordonne le remboursement d'un crédit de taxe déductible auquel le redevable est en droit de prétendre ; qu'en faisant valoir que Mme Y... n'avait pas présenté la caution solvable qui lui avait été demandée, l'administration ne tient donc pas en échec le droit de l'intéressée au remboursement de son crédit de taxe déductible de 21 755,65 F ; que, dès lors, il y a lieu d'ordonner ce remboursement ;
En ce qui concerne le crédit de taxe déductible dont Mme Y... se prévaut au titre de l'année civile 1978 :
Considérant qu'en vertu des dispositions, seules applicables à la date de présentation de la réclamation contentieuse de Mme Y..., de l'article 242-OC de l'annexe II au code général des impôts, la demande de remboursement d'un crédit de taxe déductible constaté au terme d'une année civile doit être déposée au cours du mois de janvier de l'année suivante ;
Considérant que la demande de remboursement du crédit de taxe déductible de 58 175,16 F dont Mme Y... se prévaut au titre de l'année civile 1978, devait, en application de l'article 242-OC, être déposée le 31 janvier 1979 au plus tard ; que, n'ayant été déposée que le 13 septembre 1979, cette demande a été, à bon droit, rejetée comme tardive par l'administration ; que Mme Y... n'est, par suite, pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement n° 12 090, le tribunal administratif de Besançon a rejeté à son tour, pour le même motif, sa demande de remboursement ;
Article 1er : Le jugement n° 11 660 du tribunal administratif de Besançon du 12 octobre 1983 et le jugement n° 12 090 de même date du même tribunal, en tant qu'il a statué sur les conclusions de la demande de Mme Y... qui tendaient au remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible de 21 755,65 F au titre de l'année civile 1977 sont annulés.
Article 2 : Mme Y... est déchargée du complément de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes, auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er avril 1975 au 31 décembre 1977.
Article 3 : L'Etat remboursera à Mme Y... un crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible de 21 755,65 F..
Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande n° 12 090 présentée par Mme Y... devant le tribunal administratif de Besançon et le surplus des conclusions de la requête n° 55 599 qu'elle a présentée devant le Conseil d'Etat, sont rejetés.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Y... et au ministre délégué au budget.