Vu la requête présentée par M. Giresse demeurant ..., ladite requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 19 février 1988 et tendant à ce que le Conseil annule la décision en date du 24 décembre 1987 par laquelle le Garde des sceaux, ministre de la justice lui a refusé l'honorariat de ses fonctions de président de chambre à la cour d'appel de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée par la loi n° 80-844 du 29 octobre 1980 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Aberkane, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Garaud, avocat de M. André X...,
- les conclusions de M. de la Verpillière, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 77 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 dans sa rédaction résultant de la loi organique du 29 octobre 1980 : "Tout magistrat admis à la retraite est autorisé à se prévaloir de l'honorariat de ses fonctions. Toutefois, l'honorariat peut être refusé au moment du départ du magistrat par une décision motivée de l'autorité qui prononce la mise à la retraite après avis du conseil supérieur de la magistrature en ce qui concerne les magistrats du siège" ;
Considérant que les décisions prises en application de ces dispositions ne constituent pas des sanctions disciplinaires et ne sont, par suite, pas subordonnées à l'observation des règles de compétence et de procédure prévues par le chapitre VII de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ; qu'en l'espèce, M. Giresse a été dûment informé de l'intention du Garde des sceaux d'engager la procédure prévue par l'article 77 et a pu consulter son dossier ; qu'aucune disposition s'imposait ni que le Conseil supérieur de la magistrature entendît M. Giresse avant d'émettre son avis, ni que cet avis fût transmis à M. Giresse préalablement à la décision du ministre ;
Considérant que, pour prendre la décision attaquée, le Garde des sceaux a relevé : "... que M. Giresse, dans son ouvrage publié sous le titre "Seule la vérité blesse" s'est livré au dénigrement du fonctionnement des institutions de la République comme à la mise en cause offensante de nombre de ses collègues ; que les excès contenus dans cette publication justifient que M. Giresse ne puisse être autorisé à se prévaloir de l'honorariat de ses fonctions" ;
Considérant, d'une part, qu'en se fondant, exclusivement, sur la publication d'un ouvrage, le Garde des sceaux n'a pas commis d'erreur de droit au regard des pouvoirs que lui confère l'article 77 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ;
Considérant, d'autre part, qu'eu égard au contenu du livre "Seule la vérité blesse", le Garde des sceaux a pu légalement, pour les motifs reproduits ci-dessus, refuser à M. Giresse l'honorariat de ses fonctions ;
Considérant enfin que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Giresse n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 24 décembre 1987 qui lui refuse l'honorariat de ses fonctions de président de Chambre à la Cour d'appel de Paris ;
Article 1er : La requête de M. Giresse est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Giresse et au Garde des sceaux, ministre de la justice.