Vu la requête, enregistrée le 12 février 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°/ annule la décision, en date du 11 décembre 1985, par laquelle la commission départementale des handicapés de l'Aube a rejeté sa demande dirigée contre la décision, en date du 15 novembre 1984, par laquelle la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel du même département a refusé de lui reconnaître la qualité de travailleur handicapé,
2°/ renvoie l'affaire devant la commission départementale des handicapés de l'Aube,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Schneider, Maître des requêtes,
- les observations de Me Blanc, avocat de M. Alain X...,
- les conclusions de M. Lévis, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 323-34 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur au 11 décembre 1985, que les commissions départementales des handicapés sont des juridictions lorsqu'elles statuent notamment sur des contestations relatives à la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé ; qu'il suit de là que ces commissions doivent observer les règles de procédure qui n'ont pas été écartées par une disposition législative expresse et qui ne sont pas incompatibles avec leur organisation ; qu'au nombre de ces règles figure celle selon laquelle les décisions juridictionnelles doivent mentionner le nom des juges qui ont siégé à la séance au cours de laquelle elles ont été adoptées ; que la décision de la commission départementale des handicapés de l'Aube ne satisfait pas à cette obligation ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. X... est fondé à en demander l'annulation ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 323-10 du code du travail : "Est considéré comme travailleur handicapé ... toute personne dont les possibilités d'obtenir ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par suite d'une insuffisance ou d'une diminution de ses capacités physiques ou mentales" ;
Considérant qu'il résulte des pièces versées au dossier que M. X..., qui a exercé les fonctions de professeur puis de cadre administratif dans diverses entreprises privées, a une vision de l'oeil gauche inféreure à 1/10 ; qu'eu égard notamment à sa formation et aux emplois qu'il a vocation à exercer, cette baisse de l'acuité visuelle d'un oeil ne constitue pas pour l'intéressé un handicap au sens des dispositions législatives précitées ; que M. X... n'est, par suite, pas fondé à demander l'annulation de la décision, en date du 21 novembre 1984, par laquelle la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel de l'Aube a refusé de lui reconnaître la qualité de travailleur handicapé ;
Article 1er : La décision de la commission départementale des handicapés de l'Aube, en date du 11 décembre 1985, est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant la commission départementale des handicapés de l'Aube et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale.